Le voile, chiffon rouge ou ?...

par nemo3637
dimanche 10 novembre 2019

Le voile, tous les accessoires à caractère religieux, finissent souvent par faire perdre le sens de la raison, deviennent jouet de toutes les manipulations... Comme par hasard quand des problèmes sociaux et politiques embrassent la société, on tente de détourner l'attention en montrant un hochet, un chiffon rouge, en l'occurence le voile.

C'est un point de vue partisan : rationaliste et athée qui va être développé ici. Subjectif aussi sans doute à la pensée de mes amies algériennes, assassinées parce que refusant de se plier à des règles et usages rétrogrades. Plus largement je garde en mémoire le sort fait ou promis à tous mes sœurs et frères maghrébins athées et persécutés.

Je n'oublie pas pour autant les méfaits et crimes commis par toutes les Eglises chrétiennes, inquisitoriales, qu'elles soient ou non catholiques. Et j'apprécie l'avantage de vivre aujourd'hui dans un pays certes bien imparfait, mais où l'athéisme est cependant la conviction de près de 80% d'un peuple dont l'Histoire est aussi celle du combat contre l'obscurantisme religieux.

Le dicton révolutionnaire « Pas de liberté pour les ennemis de la Liberté ! » y est toujours enraciné au grand dam de tous les « hommes de Dieu »...

I. UNE HISTOIRE PARTICULIERE MARQUEE PAR L'ATHEISME…

La controverse autour du voile prend en France des proportions inimaginables dans d'autres pays. On se rend compte, comme ailleurs, que religion et pratiques religieuses cachent depuis longtemps d'autres enjeux et sont prétextes à discorde.

L'islamophobie est une vision confuse avant tout raciste manipulée par l'extrème-droite qui cherche à exclure toute une communauté, où les considérations religieuses restent accessoires. Etre « pour » ou « contre » l'islamophobie c'est tomber dans un piège tendu par cette même extrème-droite.

Avant d'aller plus loin, il est nécessaire de rappeler certains repères...

Les religions et l'athéisme occupent en France, une place particulière. Du XVIe siècle et ses guerres de Religion entre Catholiques et Protestants à l'athéisme révolutionnaire, en passant par le Siècle des Lumières anti-clérical, jusqu'à la Loi de Séparation de l'Eglise et de l'Etat de 1905, on distingue la progression d'un athéisme historique en lutte séculaire contre la Religion. Aujourd'hui près de 80% des Français s'estiment athée. Il en est de même chez les populations d'origine émigrée dont l'immense majorité n'est pratiquante d'aucun culte.

L'Islam, religion ennemie de l'Occident chrétien, fut longtemps considéré par la suite comme une croyance exotique inoffensive, instrument commode dont le colonisateur français se servit pour asservir encore mieux les populations autochtones d'Afrique du nord (1).

Le corps, la sexualité, la place de la femme sont considérés sous le même angle par les Chrétiens et les Musulmans. Des règles impliquent la soumission de celle-ci à l'homme Cette conception de l'inféroririté de la femme se heurte à un mouvement général d'émancipation qui a touché aussi bien « l'Occident chrétien » que « le monde musulman ».

II. LE VRAI ROLE DU VOILE.

Dans celui-ci des groupes et sectes comme les Salafistes, soutenus par des Etats, tentent depuis des décennies de revenir à un Islam des premiers siècles. Alors que dans les années 1970 les femmes musulmanes ne portaient plus le voile, il revient aujourd'hui en force, comme un cheval de Troie, avec une tenue appropriée, obligatoire, excluant par exemple le port de la jupe.

Le voile n'est pas seulement un signe religieux permettant de se distinguer des non musulmans ; il est aussi message d'inégalité, de soumission de la femme à l'homme. Cette nouvelle influence religieuse est insidieuse.

Quand on interroge une femme voilée, elle répond souvent qu'il s'agit là d'un acte individuel, qu'elle méconnait l'Histoire, que c'est simplement sa façon personnelle de montrer son adhésion à la religion. Mais nous faisons tous partie de mouvements historiques qui dépassent notre libtre arbitre.

De même qu'un courant conservateur et réactionnaire touche globalement toute la société française, toutes les sociétés européennes, le voile est lui-même, de façon souvent hypocrite et inavouée, un signe moralisateur et politique comme peut l'être le crane rasé couvert d'un béret de para de certains.

Le voile s'affichant dans une société non musulmane où le féminisme est une valeur reconnue, apparaît bien comme une provocation. Il apparaît en même temps que se développe l'intégrisme et le terrorisme et peut logiquement être assimilé à un acte de prosélitisme affirmant l'infériorité de la femme, et non pas une simple « différence » comme le prétend certains musulmans.

III. LA NEGATION DU CORPS.

Les particularismes vestimentaires, comme le burkini, sont souvent le signe d'un message religieux et politique que l'on cherche à faire passer...au nom de la « Liberté » ! Ne pas voir, ne pas toucher, ne pas s'assoir à côté d'un homme ou d'une femme... On tente dimposer tous ces gestes et attitudes d'exclusion dans notre quotidien.

Les religions monothéistes, chrétiennes, juives ou musulmanes ont toujours cherché à incarcérer, à revêtir les corps de vêtements. Le nudisme, liberté du corps, accepté dans l'Antiquité y a été toujours sévèrement combattu. Il a vite représenté une affirmation d'émancipation contre toutes les contraintes du pouvoir étatique et religieux. Citons en France la secte des Turlupins (2) dont les membres finirent bien entendu tous sur le bûcher.

En Asie, le musulman Ibn Battûta raconte son échec à imposer le voile aux femmes indiennes dénudées. En Afrique subsaharienne, dans l'empire du Mali musulman, il déplore encore la nudité affichée et traditionnelle des femmes qui n'est en rien un signe d'asservissement (3).

IV. ASSERVISSEMENT DES FEMMES, MUTILATIONS, REFUS DE LA MEDECINE.

A côté des obligations vestimentaires, il y a aussi, justifiée par la religion, les mutilations physiques comme l'excision, le refus de l'avortement, celui de la vaccination et de la transfusion sanguine chez les Témoins de Jéhovah...

Au nom de croyances irrationnelles, d'usages traditionnelles barbares, des sociétés, des familles agressent les corps des femmes et des enfants, les condamnent parfois à mort.

Certes l' Inquisition et ses tribunaux, abolie en Espagne seulement au début du XIXe siècle par Napoléon, n'existent plus. Mais pour que l'obscurantisme que représente les religions soit repoussé il a fallu mener un long combat résolu contre des puissants, combat qui n'est pas terminé.

V. EMIGRATION, INTEGRATION, COMMUNAUTARISME...

Il est un lieu commun de dire que les émigrés, dont beaucoup sont musulmans, ne s'intègrent pas en France.

Pour les excuser ou mieux les exclure, on invoque les difficultés économiques, l'emprise du marché de la drogue sur des territoires entiers, comme la Seine Saint-Denis, sous la coupe des intégristes et des criminels des trafics, ne formant finalement qu'un seul corps.

On voit ainsi dans certains lieux, comme sur les quais de gares, des grappes d'individus pauvres, habillés comme au Caire, aux oripeaux pendant, des femmes avec une serpîllère sur la tête... Ces images de quais de banlieue sont indéniables. Elles montrent qu'un certain nombre d'émigrés continuent à vivre en marge de la société française ou européenne.

Mais combien sont-ils ? Que représentent-ils réellement ? Ils forment certes des communautés localisés à Paris, à la Goutte d'or, en banlieue parisienne, à Marseille.

Mais par contre qui dira combien de ces émigrés se sont assimilés ? Ceux-là, s'ils existent bel et bien ont disparu du paysage, passant inaperçu, pratiquant leur religion avec discrétion, n'en pratiquant souvent aucune. Et c'est justement, malgré les difficultés économiques, l'attitude de l'immense majorité des cinq millions de musulmans – ou considérés comme tel ! – vivant en France. Il est vrai aussi que ceux qui ont du mal à s'intégrer économiquement deviennent d'autant plus les proies faciles des intégristes qui vont vanter leur « différence ». N'est-ce pas normal que l'on soit exclus dans ce pays d'impies ?

Pour se construire une identité, tenter de se valoriser, comme peuvent le faire par ailleurs des Français mettant en avant leurs racines « gauloises », on se rabat sur la religion que l'on pratique à sa façon... avec un voile pour mieux se distinguer (4)

VI. LE DROIT A L'ATHEISME ET DONC A L'ISLAMOPHOBIE

L'exclusion d'une religion en particulier, comme l'Islam, fait aussi partie d'enjeux politiques. Ainsi, stigmatisant ceux qui sont « inacceptables », « trop différents », l'extrème-droite rejettent aujourd'hui les Musulmans - en réalité "les Arabes", les étrangers - comme elle rejettait hier les Juifs.

Pour ma part, ce n'est pas une seule religion que je déteste, mais TOUTES les religions. Etablir des différences entre les unes et les autres, sous prétexte que l'une ou l'autre serait persécutée, marginalisée, c'est tomber dans le piège de l'irrationnel, de ceux qui nous manipulent.

C'est la Raison qui doit guider nos actes et non pas l'abandon de notre réflexion personnelle, de l'intelligence, entre les mains des prêtres, des « fous de Dieu », de tous les censeurs.

Encore une fois, ce droit à la critique de la Religion a été conquis de haute lutte. Pendant des siècles elle était impossible, passible de torture et de mise à mort comme aujourd'hui dans nombre de pays musulmans.

Après avoir été combattues par des dictatures athées, comme l'hitlerisme ou le « communisme », les religions « classiques » ont été souvent évincées par une autre : celle de la marchandise.

Le chemin de la Liberté est donc difficile à trouver et à suivre. Mais relever un tel défi, contre la soumission et la passivité ambiente, ne mérite-il pas d'être vécu ?

Comme d'autres, je vis les processions, les manifestations cultuelles à Lourdes ou ailleurs, le port du voile lui-même, le matraquage des pubs de bagnoles, comme des agressions pire que la vue des Turlupins à poil de jadis. La laïcité met trop souvent de côté, au nom du « respect des religions », l'athéïsme représentant cependant la majorité de la population.

(1) Dans sa conquête de l'Algérie, au XIXe siècle, le Général Bugeaud prit soin de se concilier l'Islam en s'appuyant sur les « hommes de Dieu » pour établir le pouvoir colonial.

(2) Les Turlupins formaient, au XIVe siècle, une secte naturiste, conduite par une femme, qui préconisaient, pour honorer Dieu, la satisfaction des sens...

(3) « La nudité n'est pas un péché en Islam », Farhat Othman, sur le site nawaat.org .

(4) Le voile, dans l'Islam, comme dans le christianisme, n'est pas obligatoire.


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