Les faux mémoires du Prince Jean sont écrits par...
par Babar
jeudi 3 décembre 2009
Qui est Jean Sarkozy ? Le fils du président de la république vient de publier chez Nova éditions ses mémoires : Ma vie, mon oeuvre, mon scooter. Ah non, ce n’est pas lui. C’est d’ailleurs écrit en gros et sur fond rouge sur la couverture : Les faux mémoires du prince Jean. Peu importe. La question reste valable : qui est Jean Sarkozy qui signe ce pastiche, cette satire, exercice on le sait fort prisé en France ?
Le papa était servi, le fils l’est également, désormais. A moins qu’à travers le fils on cherche à atteindre le père. C’est bien de cela qu’il s’agit quand on a refermé cet opuscule (139 pages, 11 euros, pas plus pas moins) réjouissant, vif et ficelé entre le navrant épisode de l’Epad et les vingt ans de la chute du mur. Un vrai morceau de communication présidentielle passé au scanner.
Marc Grinsztajn, patron de Nova éditions qui publie ce livre, n’en est pas à son coup d’essai. C’est lui qui, aux éditions Panama, avait
édité Madame, Monsieur, Bonsoir... Ecrit par cinq journalistes de TF1 ce pamphlet dont on n’a jamais pu connaître l’identité des auteurs s’en prenait au JT de 20 heures le plus vu de France.
Nous avons interviewé Marc Grinsztajn pour savoir qui se cache derrière le pseudonyme de Jean Sarkozy...
OB : Pourquoi avoir publié ce livre ?
Marc Grinsztajn : On a assisté au cours du mois d’octobre à la tragi-comédie de l’Epad. On avait là un jeune homme bien de sa personne, extrêmement dynamique, sans doute plein de qualités. C’est le plus jeune conseiller général dans le département le plus riche de France et voilà qu’il s’apprête à prendre la présidence d’un établissement public sans aucune compétence ni militante, ni politique, ni administrative. Ça me semblait assez représentatif d’un mode d’exercice du pouvoir, le fait du prince érigé en principe de gouvernement. Une délégation de souveraineté un peu autoritaire.
OB : Pourquoi avoir publié ce livre ?
Marc Grinsztajn : On a assisté au cours du mois d’octobre à la tragi-comédie de l’Epad. On avait là un jeune homme bien de sa personne, extrêmement dynamique, sans doute plein de qualités. C’est le plus jeune conseiller général dans le département le plus riche de France et voilà qu’il s’apprête à prendre la présidence d’un établissement public sans aucune compétence ni militante, ni politique, ni administrative. Ça me semblait assez représentatif d’un mode d’exercice du pouvoir, le fait du prince érigé en principe de gouvernement. Une délégation de souveraineté un peu autoritaire.
Pour nous ce n’était pas un micro événement politique, mais c’est assez représentatif d’un état de la politique. C’est attristant, mais plutôt que de s’en attrister on a choisi d’en rire d’autant que ça avait été l’occasion d’une sorte de débordement de rhétorique sarkozienne, ce que Laurent Joffrin avait appelé l’orchestre des roquets perroquets. Ils s’en sont donné à coeur joie. Il y a une rhétorique sarkozienne qu’on a voulu pasticher. On a avoulu rendre compte de manière satirique de la langue de Jean Sarkozy en grande partie empruntée à celle de Nicolas Sarkozy. Mais le but n’était pas de révéler des secrets. Tout ce qui est authentique dans le livre est public. On a mêlé des faits notoires à des éléments de pure fantaisie, inventés.
OB : S’attaquer au fils c’est s’attaquer au père ?
MG : On ne s’est pas attaqué au fils. Ce n’est pas une charge contre Jean Sarkozy...
OB : Enfin bon, dès le titre, Ma vie, mon oeuvre, mon scooter, on voit bien que c’est au moins un peu moqueur
MG : C’est un peu moqueur, mais le livre décrit l’itinéraire d’un jeune homme doué qui est un peu instrumentalisé, à qui l’ont fait parler une langue qui n’est pas la sienne et qui va finir par conquérir son autonomie. C’est un peu ça la trame, résumée brièvement, d’un livre.
OB : Instrumentalisé par qui ?
MG : Par son père, l’entourage de son père, les conseillers de son père.
OB : Vous le pensez vraiment ?
MG : Oui, je le pense. Mais est-ce que vous pouvez me citer un conseiller général élu à cet âge ? Il n’y en a pas... Est-ce qu’on peut croire que c’est sur ses seules qualités qu’il a été élu à cet âge ?
OB : C’est un coup éditorial, ce livre
MG : On le revendique très volontiers. Un éditeur c’est quelqu’un qui diffuse des idées, du savoir, de la culture, de l’humour, etc. et qui fait commerce de livres. La relation entre le commerce et l’édition est assez consubstantielle donc oui quand on fait des livres on espère qu’ils atteignent leur public, on espère les vendre. Ça ne me semble pas honteux. Quand Dominique Paillé disait que c’est un livre vite fait pour faire du fric, on est une entreprise d’édition, on a vocation à dégager des bénéfices comme toutes les PME célébrées à longueur de journées par Christine Lagarde et Hervé Novelli. Les maisons d’édition ont avec l’argent et le succès un rapport beaucoup plus décomplexé que bien des hommes politiques.
OB : Combien en avez-vous mis en place ?
MG : Il est sorti entre lundi et mardi. Le premier tirage a été de 15 000 exemplaires. Il a été épuisé quasiment à la mise en place et on a réimprimé 10 000 exemplaires qui sont également épuisés aujourd’hui mercredi. Ce qu’on sait c’est ce qui sort des stocks du distributeur. Ce qu’on ne sait pas encore c’est ce qui se passe dans les librairies. C’est trop tôt pour le dire. Le livre a été travaillé sous X. C’est-à-dire que les libraires ont commandé un livre qui n’avait pas de titre et pas d’auteur. On voulait préserver le secret. C’est un procédé qui a beaucoup été utilisé, parfois trop, pour des livres médiocres ou qui ne présentaient pas les révélations qu’ils avaient suggérées donc les libraires sont réticents à commander des livres dont ils ne savent rien. Ça veut donc dire que les libraires qui en auraient pris six, s’ils avaient eu connaissance de l’objet, en ont pris un. Je pense qu’il y a eu une sorte de réassort de précaution ou de couverture qui a suivi l’annonce de la parution dans Libération.
OB : Pourquoi avoir utilisé le nom de Jean Sarkozy et pas un pseudo ?
MG : En général le pastiche est signé du pastiché et souvent on ajoute le pasticheur. Mais ce dernier apparaît soit parce que c’est pour lui un gage de talent de dire qu’il a réussi à pasticher l’auteur ou c’est une manière de bien marqué que ce n’est pas le livre du pastiché, d’empêcher la confusion. Nous on a voulu pousser à l’extrême le procédé du pastiche et pour empêcher la confusion, ce qui est un peu l’équivalent de la mise en avant du nom de l’auteur on a mis une fausse bande qui fait qu’il n’y a aucune confusion possible.
OB : Avez-vous mesuré les risques que vous avez pris en publiant ce livre sous ce nom ?
MG : On les a mesurés et encore une fois on a veillé à ce qu’il n’y ait aucune confusion possible entre l’éventuel original et la copie. Même pour un lecteur très pressé ou très malvoyant ou très malveillant personne ne peut raisonnablement penser que ce livre a été écrit par Jean Sarkozy. Le titre est délibérément loufoque, vous avez dit moqueur, la bande est explicite, la quatrième de couverture est également absurde. Dès la première page il apparaît une voiture à pédales et une phrase qui ne laisse place à aucune confusion.
OB : Vous vous attendez malgré tout à une condamnation ?
MG : Je ne peux rien dire là-dessus. Je ne peux pas préjuger des réactions.
OB : L’intéressé a-t-il réagi ?
MG : On lui a fait parvenir le livre comme il se doit...
OB : Avec une dédicace ?
MG : Non, sans, car pour le coup ça aurait été de mauvais goût. On lui a adressé dès lundi après-midi au conseil général. On n’a eu aucune réaction. On sait que des journalistes ont essayé de l’interroger, lui et son avocat. Il a fait répondre qu’il était trop occupé cette semaine pour répondre aux sollicitations de la presse. La seule réaction officielle est celle de Dominique Paillé qui s’est exprimé hier sur Canal+ en disant que c’était un livre d’une grande bassesse parce que non signé et presque abject.
OB : Presque, seulement...
MG : J’aurais aimé qu’il le soit totalement. Mais abject me semble un peu fort de café. C’est vrai qu’on n’a pas fait l’apologie de tourisme sexuel en Thaïlande sinon on l’aurait été totalement.
OB : le livre commence par cette phrase très gaullienne : "Toute ma vie je me suis fait une certaine idée de Neuilly" . Cela donne-t-il une indication sur l’auteur ?
MG : Le livre est parsemé d’indications sur l’auteur. A bon entendeur salut, je ne peux rien dire de plus. Ce que l’on souhaite c’est créer le buzz sur le livre, sur le pastiche. On voulait un livre qui soit drôle. Je pense que nous avons atteints notre but. Après je ne veux pas buzzer sur le fait que l’auteur est un homme politique de droite, de gauche, André Santini, François Hollande...
OB : Ce n’est pas anodin que l’auteur soit un politique...
MG : Oui, mais on se tient à notre ligne et on ne répond à aucune question sur l’identité de l’auteur. Après on nous dit « vous êtes une maison de gauche », certes, mais nous n’avons pas que des amis de gauche... Si on le lit bien, j’ai plus l’impression, mais peut-être que je me trompe, j’ai plus l’impression d’un livre écrit par un homme politique que par un journaliste.
OB : S’attaquer au fils c’est s’attaquer au père ?
MG : On ne s’est pas attaqué au fils. Ce n’est pas une charge contre Jean Sarkozy...
OB : Enfin bon, dès le titre, Ma vie, mon oeuvre, mon scooter, on voit bien que c’est au moins un peu moqueur
MG : C’est un peu moqueur, mais le livre décrit l’itinéraire d’un jeune homme doué qui est un peu instrumentalisé, à qui l’ont fait parler une langue qui n’est pas la sienne et qui va finir par conquérir son autonomie. C’est un peu ça la trame, résumée brièvement, d’un livre.
OB : Instrumentalisé par qui ?
MG : Par son père, l’entourage de son père, les conseillers de son père.
OB : Vous le pensez vraiment ?
MG : Oui, je le pense. Mais est-ce que vous pouvez me citer un conseiller général élu à cet âge ? Il n’y en a pas... Est-ce qu’on peut croire que c’est sur ses seules qualités qu’il a été élu à cet âge ?
OB : C’est un coup éditorial, ce livre
MG : On le revendique très volontiers. Un éditeur c’est quelqu’un qui diffuse des idées, du savoir, de la culture, de l’humour, etc. et qui fait commerce de livres. La relation entre le commerce et l’édition est assez consubstantielle donc oui quand on fait des livres on espère qu’ils atteignent leur public, on espère les vendre. Ça ne me semble pas honteux. Quand Dominique Paillé disait que c’est un livre vite fait pour faire du fric, on est une entreprise d’édition, on a vocation à dégager des bénéfices comme toutes les PME célébrées à longueur de journées par Christine Lagarde et Hervé Novelli. Les maisons d’édition ont avec l’argent et le succès un rapport beaucoup plus décomplexé que bien des hommes politiques.
OB : Combien en avez-vous mis en place ?
MG : Il est sorti entre lundi et mardi. Le premier tirage a été de 15 000 exemplaires. Il a été épuisé quasiment à la mise en place et on a réimprimé 10 000 exemplaires qui sont également épuisés aujourd’hui mercredi. Ce qu’on sait c’est ce qui sort des stocks du distributeur. Ce qu’on ne sait pas encore c’est ce qui se passe dans les librairies. C’est trop tôt pour le dire. Le livre a été travaillé sous X. C’est-à-dire que les libraires ont commandé un livre qui n’avait pas de titre et pas d’auteur. On voulait préserver le secret. C’est un procédé qui a beaucoup été utilisé, parfois trop, pour des livres médiocres ou qui ne présentaient pas les révélations qu’ils avaient suggérées donc les libraires sont réticents à commander des livres dont ils ne savent rien. Ça veut donc dire que les libraires qui en auraient pris six, s’ils avaient eu connaissance de l’objet, en ont pris un. Je pense qu’il y a eu une sorte de réassort de précaution ou de couverture qui a suivi l’annonce de la parution dans Libération.
OB : Pourquoi avoir utilisé le nom de Jean Sarkozy et pas un pseudo ?
MG : En général le pastiche est signé du pastiché et souvent on ajoute le pasticheur. Mais ce dernier apparaît soit parce que c’est pour lui un gage de talent de dire qu’il a réussi à pasticher l’auteur ou c’est une manière de bien marqué que ce n’est pas le livre du pastiché, d’empêcher la confusion. Nous on a voulu pousser à l’extrême le procédé du pastiche et pour empêcher la confusion, ce qui est un peu l’équivalent de la mise en avant du nom de l’auteur on a mis une fausse bande qui fait qu’il n’y a aucune confusion possible.
OB : Avez-vous mesuré les risques que vous avez pris en publiant ce livre sous ce nom ?
MG : On les a mesurés et encore une fois on a veillé à ce qu’il n’y ait aucune confusion possible entre l’éventuel original et la copie. Même pour un lecteur très pressé ou très malvoyant ou très malveillant personne ne peut raisonnablement penser que ce livre a été écrit par Jean Sarkozy. Le titre est délibérément loufoque, vous avez dit moqueur, la bande est explicite, la quatrième de couverture est également absurde. Dès la première page il apparaît une voiture à pédales et une phrase qui ne laisse place à aucune confusion.
OB : Vous vous attendez malgré tout à une condamnation ?
MG : Je ne peux rien dire là-dessus. Je ne peux pas préjuger des réactions.
OB : L’intéressé a-t-il réagi ?
MG : On lui a fait parvenir le livre comme il se doit...
OB : Avec une dédicace ?
MG : Non, sans, car pour le coup ça aurait été de mauvais goût. On lui a adressé dès lundi après-midi au conseil général. On n’a eu aucune réaction. On sait que des journalistes ont essayé de l’interroger, lui et son avocat. Il a fait répondre qu’il était trop occupé cette semaine pour répondre aux sollicitations de la presse. La seule réaction officielle est celle de Dominique Paillé qui s’est exprimé hier sur Canal+ en disant que c’était un livre d’une grande bassesse parce que non signé et presque abject.
OB : Presque, seulement...
MG : J’aurais aimé qu’il le soit totalement. Mais abject me semble un peu fort de café. C’est vrai qu’on n’a pas fait l’apologie de tourisme sexuel en Thaïlande sinon on l’aurait été totalement.
OB : le livre commence par cette phrase très gaullienne : "Toute ma vie je me suis fait une certaine idée de Neuilly" . Cela donne-t-il une indication sur l’auteur ?
MG : Le livre est parsemé d’indications sur l’auteur. A bon entendeur salut, je ne peux rien dire de plus. Ce que l’on souhaite c’est créer le buzz sur le livre, sur le pastiche. On voulait un livre qui soit drôle. Je pense que nous avons atteints notre but. Après je ne veux pas buzzer sur le fait que l’auteur est un homme politique de droite, de gauche, André Santini, François Hollande...
OB : Ce n’est pas anodin que l’auteur soit un politique...
MG : Oui, mais on se tient à notre ligne et on ne répond à aucune question sur l’identité de l’auteur. Après on nous dit « vous êtes une maison de gauche », certes, mais nous n’avons pas que des amis de gauche... Si on le lit bien, j’ai plus l’impression, mais peut-être que je me trompe, j’ai plus l’impression d’un livre écrit par un homme politique que par un journaliste.
Olivier Bailly : Vous êtes l’auteur du livre ?
MG : Non. Je n’ai pas le talent nécessaire.
MG : Non. Je n’ai pas le talent nécessaire.
Crédit photo : De source sûre