Les Frères mususlmans ne sont pas le seul problème de l’Egypte

par Mohamed BOUHOUCH
samedi 7 mars 2015

 Les exploitations agricoles de la vallée du Nil, les entrées du Canal de suez et les apports du tourisme n'ont jamais suffi à nourrir une population égyptienne sans cesse en augmentation. les problèmes que connaît l'Egypte depuis ces dernières années proviennent, en premier lieu, de sa situation économique et sociale catastrophique, face à une croissance démographique parmi les plus fortes en Afrique. L'Egypte est le pays le plus peuplé après le Nigéria et l'Ethiopie. Dans le monde arabe, elle occupe la première place avec ses 84 millions d'habitants. 

 Plus d'un tiers des jeunes n'ont pas d'emploi selon les estimations de la BNP Paribas et 18 % de la population vit avec moins d'un dollar par jour (chiffre communiqué par la banque mondiale). Avec une démographie galopante, cette situation s'empire chaque jour davantage et le niveau de vie des habitants devient de plus en plus précaire, surtout dans les milieux ruraux : cherté de la vie, manque de logements, couverture sanitaire insuffisante. On comprend dès lors les difficultés des gouvernants égyptiens à juguler le mécontentement d'une population en colère, prête à s'aligner avec n'importe quel mouvement protestataire qu'il soit nationaliste, islamiste, voire même communiste. 

 Le vote pour Mohamed Morsi à l'élection présidentielle en 2012 ne nous paraît pas comme étant une préférence pour les Islamistes pour gouverner le pays, mais avant tout, un vote de dépit et de sanction de l'administration Moubarak. L'âge moyen de la population est de 24 ans et un Egyptien sur trois a moins de 15 ans. Quand on sait que la plupart des détenteurs de diplômes aussi bien secondaires qu'universitaires, n'arrivent pas à trouver un emploi, on comprend les causes profondes des manifestations immenses que connaît de temps à autre, la place "Sahat At Tahrir". La présidence éphémère du leader islamique n'ayant pas pu ou n'a pas eu le temps suffisant et les moyens de résoudre la crise égyptienne, l'armée a repris le pouvoir et le rêve des Islamistes et des démocrates s'est vite évaporé.... 

 Certes, selon un grand nombre d'observateurs, un gouvernement islamique en Egypte avec la plus grande armée du Moyen Orient, créerait un déséquilibre des forces dans cette région très sensible et ne serait donc pas de nature à rassurer la communauté internationale. Seulement voilà : la manière avec laquelle le maréchal Sissi a réprimé les partisans du président déchu, arrêtés et condamnés, par centaines, à mort ou à la prison à vie, préoccupe l'opinion publique à l'intérieur comme à l'extérieur du pays. La situation économique et sociale n'a pas évoluée non plus, malgré les aides substantielles de l'Occident et des Etats du Golfe. Disons enfin que les disparités sociales et la corruption sont toujours là, constituant le trait dominant du pays des Pharaons. Comme l'a si bien dit Steven A. Cook (le monde du 22/8/13)," c'est toujours l' Egypte de Moubarak". 

  Après l'assassinat des 21 coptes et l'intervention militaire des autorités du Caire qui a suivi, le retour forcé vers leur pays de centaines de milliers de travailleurs égyptiens en Libye est venu aggraver encore davantage le problème du chômage, une calamité qui reste, avec la sécurité, le souci majeur des autorités du Caire et l'un des facteurs de la rébellion. Plus de dix millions de sans emploi, en majorité des jeunes, attendent aujourd'hui de trouver un gagne pain. 

 Les frères musulmans ne sont donc pas le seul problème de l'Egypte. Au contraire c'est la situation désastreuse que connaissait le pays et la mauvaise gestion du gouvernement militaire qui a conduit les électeurs à donner leurs suffrages au parti de Mohamed Morsi, un acte de désespoir plutôt que de conviction. 


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