Les limites d’Internet

par enoia
mercredi 5 septembre 2007

Article qui montre qu’Internet n’est pas forcément un outil capable d’apporter des changements politiques et économiques significatifs.

Internet est présenté par beaucoup comme un atout, voire un sauveur potentiel pour la démocratie, et un outil formidable pour les entreprises de toute taille. Malheureusement des évolutions techniques et commerciales remettent en cause ces belles affirmations.

Dans les dictatures Internet facilite la diffusion des idées des opposants politiques, cependant c’est une arme à double tranchant, puisque les dictateurs utilisent aussi ce média pour diffuser à grande échelle leur manière de penser, autrement dit Internet peut aider ceux qui combattent un régime tyrannique, mais aussi contribuer à renforcer l’influence des dictateurs. En outre Internet rend beaucoup plus vulnérables à la répression les opposants politiques, car les ordinateurs reliés à Internet sont de vraies balises indiquant très précisément la position de leurs utilisateurs. Grâce à eux les autorités chargées de réprimer les opposants disposent d’un très bon moyen pour localiser les « menaces » contre la stabilité du régime. En plus Internet est un outil idéal pour véhiculer en quelques jours des virus et, surtout, des programmes-espions comme les chevaux de Troie, les vers... dans des milliers d’ordinateurs. Les programmes-espions permettent aux milices spécialisées dans la répression de connaître le contenu d’un ordinateur en quelques minutes, ou de découvrir en moins de dix minutes toutes les pages web par lesquelles est passé un internaute, au cours des dernières semaines ou mois. Il faut admettre qu’à cause d’Internet, dans des milliers de cas, les autorités des pays qui sanctionnent les citoyens pour leur opinion n’ont pas eu besoin de passer des semaines ou des mois à enquêter pour avoir des preuves qui appuient leur répression, mais seulement quelques minutes. En d’autres termes, Internet renforce considérablement les capacités d’action des services de répression des dictateurs. Les fameux programmes pare-feu ne protègent pas forcément des programmes-espions, en effet les vers et les chevaux de Troie possèdent plusieurs fonctions, ils servent à espionner mais aussi à neutraliser les pare-feu.

Dans les démocraties, Internet aide les partis politiques et certaines associations spécialisées dans le développement des valeurs civiques, comme SOS racisme, à répandre plus facilement leurs idées. Cependant Internet apporte aussi aux organisations combattant les idéaux démocratiques une vitrine visible par des dizaines de millions de personnes. A titre d’information le nombre de sites vantant le nazisme, le fascisme, etc., accessibles en France se chiffre en milliers.

En théorie Internet apporterait aux petites entreprises la possibilité de disposer d’un rayonnement international, comme les grandes entreprises, vu qu’un site Internet d’une boucherie chevaline de la Sarthe par exemple, peut être consulté par des Bavarois d’Allemagne, des Esquimaux du Groenland, etc. Le problème est que les moteurs de recherche, comme Yahoo, Voilà, Google... attribuent les places dans leur classement de sites selon le principe de l’enchère. Comme les grandes entreprises disposent de capacités à surenchérir bien supérieures aux petites et aux moyennes entreprises, cela leur permet de disposer d’un accès très privilégié sur les moteurs de recherche. Ainsi quand une personne fait une recherche sur Internet, dans le but d’acheter un objet (livre, vêtement...), sauf cas particulier, elle aura accès sur les dix premières pages du moteur de Lycos, Orange, etc. présentant les résultats de la recherche, surtout à des sites Internet créés par des grandes entreprises. Certes il existe d’autres espaces publicitaires que les moteurs de recherche, un site sur les jeux vidéo peut faire de la publicité pour une marque de lessive, mais cela n’empêche pas les grandes entreprises de s’avérer très avantagées par rapport aux petites et moyennes entreprises. Les milliards d’euros de trésorerie d’une multinationale lui permet de louer des milliers, voire des millions d’emplacements publicitaires numériques sur les sites Internet. Leurs moyens financiers énormes et la très grande importance qu’elles accordent à la publicité (ces 20 dernières années, les 500 plus grandes multinationales ont dépensé plus de 1000 milliards d’euros dans des campagnes publicitaires) font que les multinationales ont les moyens de monopoliser les espaces publicitaires numériques les plus porteurs, et de ne laisser aux petites et aux moyennes entreprises que les espaces publicitaires les moins intéressants, ceux qui sont situés sur des sites Internet visités par moins de 100 internautes par an par exemple.

En outre, il est vrai qu’Internet peut aider sérieusement les entreprises dans la recherche d’informations juridiques, de partenariats intéressants, etc. Mais comme des dizaines de milliers de sociétés profitent des possibilités du réseau, affirmer qu’ Internet offre des avantages particuliers à une entreprise vis-à-vis de ses concurrents est franchement optimiste.

Ce texte ne remet pas en cause l’utilité d’Internet, qui s’avère une mine d’informations. Il a seulement pour but de démystifier Internet, de montrer qu’il ne favorise pas spécialement les évolutions politiques positives (grâce à Internet la police chinoise a pu durant les années 2000 localiser puis arrêter des dizaines de chefs de groupes d’opposants au régime communiste et leur faire connaître les camps de rééducation, ce genre de lieu où soit on devient fou soit on perd tout libre-arbitre, etc.). Internet ne génère par un regain de civisme dans les démocraties. Sous-estimer l’impact négatif des très nombreux sites vantant des idées antidémocratiques est une erreur, un chef charismatique attire plus que des parlementaires au crédit limité.

Internet ne provoque pas de changements économiques majeurs. Présenter Internet comme un moyen d’aider les petites et les moyennes entreprises (PME) à rivaliser avec les multinationales et les conglomérats est audacieux, vu que l’espace publicitaire dans le monde numérique comme dans le monde réel est dominé par la présence des multinationales. Quant aux possibilités du réseau Internet, elles ne sont pas un outil d’évolution très efficace ; il est très difficile pour une entreprise de se distinguer de la concurrence avec un outil utilisé par la majorité de ses rivales.


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