Les Verts : cesser de se tromper d’ennemis

par Yoann Gontier
vendredi 24 août 2007

Dans un communiqué de presse daté du 21 août, l’association Agir vite invite les Verts à cesser de se tromper d’ennemis pour mener à bien la nécessaire refondation de l’Ecologie politique.

Extrait : « Cela fait treize ans que les Verts essayent de faire passer dans l’opinion que toute écologie qui n’est pas "de gauche" est erronée, et qu’elle doit être dénoncée et combattue. Non seulement ils n’y sont pas parvenus sur cette durée, mais leur influence est même actuellement en nette régression. Ils ont voulu tout à la fois, et n’ont rien obtenu ou presque. Entre-temps, la question environnementale est devenue un problème majeur, vital. Et la prise de conscience de ce danger est devenue largement majoritaire dans l’opinion ».

Yves Cochet le reconnaissait lui-même lors du Conseil inter-régional des Verts réuni à Montreuil le 23 juin dernier : « Nous [les Verts] n’avons pratiquement pas progressé depuis trente-trois ans, l’écologie politique n’a pas fait progresser l’état de la planète, nous avons échoué ». De ce constat était née sa courageuse proposition de dissoudre le Verts en tant que parti pour mener la nécessaire refondation de l’Ecologie politique en concertation avec tous les mouvements se réclamant du Développement durable. Réuni à Paris le même jour, le Conseil exécutif de Génération écologie avait, conformément à la ligne politique adoptée en Congrès en août 2005, une nouvelle fois appelé au rassemblement de tous les écologistes pour construire le grand parti du Développement durable du XXIe siècle. Sur ce dossier, la Direction nationale des Verts, sa Secrétaire nationale en tête, s’était empressée de reprendre la main et de tuer dans l’œuf la proposition du député de Paris (lire le billet Yves Cochet appelle à la dissolution des Verts). La crédibilité politique des Verts prenait alors un nouveau coup. Pire encore, le sectarisme des plus radicaux fait peser le risque de maintenir l’écologie politique à la marge et dans l’inefficacité.

Une semaine plus tard, les Verts décidaient de se refonder... sur eux-mêmes et en direction de la gauche anti-libérale plutôt que de s’ouvrir aux autres formations écologistes en s’alliant avec les dix-sept députés communistes pour fonder un groupe parlementaire dit « technique », dont l’intitulé « Gauche démocratique et républicaine », vierge de toute référence à un objectif écologique quelconque, dissimule mal l’orientation politique encore un peu plus affirmée du parti. Nouvelle marginalisation à la gauche de la gauche que s’imposent les Verts au moment même où le paysage politique français est en pleine mutation.

Quelles conséquences en tirer ? Pour l’association Agir vite, « un partenariat électoral entre partis écologistes, sans exclusives idéologiques, est la seule voie pragmatique ayant une chance de créer un nouveau rapport de forces avec les grands partis, à même de contraindre ceux-ci à dépasser leur attitude environnementale rétrograde. Il n’existe pas d’autre alternative rationnelle pouvant mener à des avancées environnementales à court et moyen termes ». A l’appui de cet argumentaire, Agir vite reprend l’analyse de Michel Villeneuve, porte-parole de Génération écologie, qui affirmait récemment dans une tribune libre que « l’électeur de la mouvance écologique ne reconnaît [sur le bulletin] que le mot "écologie" ou la couleur verte représentant ce courant de pensée. Pour lui, toute subdivision en partis, groupes ou courants est totalement artificielle et ne correspond qu’à des obédiences ou à des cultes de la personnalité. »

Que penser d’un partenariat électoral entre partis écologistes en vue de créer un rapport de force à même de peser sur les grandes orientations ? L’idée n’est pas neuve.

Rappel des faits : dès juin 2006, Génération écologie avait pris l’initiative de prendre contact avec l’ensemble des formations écologistes pour leur proposer une coordination - a minima électorale, voire politique - en vue des échéances législatives de juin 2007 (lire l’accord). Nicolas Hulot avait alors le vent en poupe et faisait encore planer la menace d’une candidature à la présidentielle. Au passage, il posait clairement la nécessité pour tous les candidats écologistes de se retrouver autour d’un projet commun. Les Verts faisaient alors bonne figure en s’affichant à Coutances aux côtés de l’écologiste français le plus populaire tandis que la présidente de Cap21 appelait au « rassemblement des sensibilités écologistes ». Ceux qui prétendaient souscrire à un souci de partenariat sont pourtant les mêmes qui ont refusé de s’y associer. Au final, les volontés de rassemblement sont restées à leur stade initial... celui des déclarations (Rassemblement des écologistes : au-delà des mots). Le partenariat électoral proposé par Génération écologie, et aujourd’hui repris par l’association Agir vite, a été balayé de la main par les Verts et Cap21 qui ont refusé de s’asseoir autour de la table, avant même de débuter les discussions. In fine, le 29 novembre 2006, Génération écologie signait un accord avec le Mouvement écologiste indépendant présidé par Antoine Waechter, le Mouvement hommes animaux nature (MHAN) et le Trèfle en vue de proposer une écologie indépendante et forte, au-delà de l’obsolète clivage politique droite/gauche, pour les élections législatives de 2007.

La solution préconisée par l’association « Agir vite » n’a donc rien d’innovante. Initiée par Génération écologie un an avant les dernières élections législatives, la méthode a permis d’éviter une dispersion contre-productive du vote écologiste, malgré la trahison du parti le Trèfle qui a rompu l’accord de façon unilatérale en présentant un certain nombre de candidats contre ceux de la coordination.

Faut-il en conclure qu’il serait souhaitable de réitérer l’expérience pour les prochaines échéances ? Elle apparaît difficilement concevable dans le cadre des élections municipales puisque ce sont pour l’essentiel des listes de coalition qui se préparent, au vu des alliances locales déjà établies et celles à venir. Le « partenariat électoral » semble au contraire nettement plus crédible pour les élections cantonales au moyen d’un découpage des cantons fonction des implantations locales. Mais les radicaux et les carriéristes d’hier, ceux qui sont restés aveugles à la coordination mise en place en juin dernier pour les élections législatives, en auront-ils la volonté politique ?


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