Lettre ouverte au président Barack Obama

par eric fabre-maigne
mardi 6 janvier 2009

 Dear Barack Obama,

Félicitations pour votre élection si légitime à la présidence des USA.

Et merci pour les mots si forts que vous avez prononcé.

 Aujourd’hui, passée l’euphorie qui nous a submergé, nous avons une pensé émue pour la longue marche de ceux qui vous ont précédés et portés : vos parents et grands-parents, le Pasteur Luther King, Rosa Parks, Michael Schwerner, Andy Goodman et James Chaney, mais aussi tant d’anonymes, militants des droits civiques, victimes du racisme ordinaire et du Ku Klux Klan. 

Vous avez synthétisé beaucoup d’espoirs, ceux de l’Amérique que nous aimons, cette grande nation multiculturelle et capable du meilleur, même si souvent, certains de ses gouvernants ont été capables du pire ; l’Amérique des gens ordinaires, comme la chante Neil Young, mais aussi celle des grands artistes que nous aimons.

Celle des afro-américains, comme Phillis Wheatley, Booker T. Washington, Langston Hughes, James Baldwin, LeRoi Jones, Toni Morrison, Albert King, Bo Diddley, Buddy Guy, Elmore James, Howlin’ Wolf, John Lee Hooker, Luther Allison, Muddy Waters, Sonny Boy Williamson, Lightnin’ Hopkins, Big Mama Thornton, Clarence Gatemouth Brown, Mahalia Jackson, Louis Amstrong, The Blind Boys of Alabama, John Coltrane, Miles Davis, Jimi Hendrix…

Mais aussi celle de Bruce Springsteen, Bob Dylan, Johnny Cash, John Trudell, Woody Guthrie, Pete Seeger, Woody Allen, Francis Coppola, Martin Scorcèse, Michaël Cimino, Robert de Niro, Al Pacino, Paul Newman, Robert Redford, John Steinbeck, Ernest Hemingway, Jack Kérouac, Jack London, James Welch …

C’est tous les Américains sans exception que vous incarnez pour nous.

Et aussi tous les espoirs de notre « vieille Europe » et du tiers-monde.

Notre jeunesse a été traversée par les fulgurances du Gospel, du Blues, du Rock and Roll, du Jazz, bercée par ce rythme qui a enluminé le XX° siècle, mais aussi par « l’art nègre » découvert par les peintres cubistes, la littérature africaine de langue française, les poètes de la négritude, Léopold Sédar Senghor, Aimé Césaire…

Le tout sur fond d’oppression, de la situation scandaleuse faite aux Afro-américains, à plus de 10% de la population de ce pays, quand « la plus grande démocratie du monde » persistait aveuglément dans ses erreurs, ses errances de jeunesse, après le génocide des Amérindiens, l’esclavage et l’oppression coloniale. La légalisation d’une humanité à deux niveaux qui allait de pair avec l’exploitation de l’Homme par l’Homme, le capitalisme sauvage, la mondialisation…

Ma génération, celle du « baby-boom », qui a eu 20 ans en 1968, s’est révolté contre ce monde-là dont les USA se faisait le porte-drapeau, elle a crié haut et fort sa révolte et son espoir d’un monde meilleur pour tous.

Les enfants d’Afrique ont poussé d’immenses cris de douleur, des coups de tonnerre qui ont résonné dans le ciel de l’oppression, faisant vaciller les murailles de ce vieux monde-là.

Nous espérons que, sous votre direction éclairée, il sera relégué dans les livres d’histoires, car il ne faut jamais oublier.

A titre personnel, j’aurai aimé que mon ami Francis Bébey, poète et musicien français d’origine camerounaise, - hélas disparu en 2001, qui a apporté tout son talent, sa tendre humanité, son gai savoir, au formidable concert spirituel venu d’Afrique -, puisse vous voir aujourd’hui sur tous les écrans du monde. Dans sa chanson « Savannah, Georgia », il évoquait l’assassinat, dans les années 60, d’un enfant noir qui voulait entrer dans une église « interdite aux noirs et aux chiens » de « La Belle du Sud »  : 

« J’ai versé une larme

Une larme

Qui ressemble un peu

A une goutte de sang

Car il est mort le petit garçon

Qui voulait aller prier

Qui voulait aller prier

Dans l’église de Savannah ».

Francis m’a raconté comment venu dans cette ville pour donner un concert, il y a à peine 33 ans, on avait cassé son verre après qu’il ait bu dedans, parce qu’il était noir ! Ce qui lui avait rappelé ce jour où un instituteur français l’avait obligé avec sa baguette à marcher à quatre pattes « pour lui montrer ce qu’il était ».

Nous n’oublions pas.

 

Votre tache est immense, nous n’attendons pas des miracles, mais beaucoup de changements : nous sommes prêts à vous soutenir et nous resterons vigilants.

 

God bless you, Dieu vous protége, Mister Président !

 

Eric Fabre-Maigné, Chevalier des Arts et Lettres, Toulouse South France.


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