Macron, Benalla… et les autres

par Marcel MONIN
samedi 21 juillet 2018

Macron, Benalla, et les autres.

M. Macron avait en réalité réussi un bon coup avec M. Benalla :

M. Benalla, garde du corps privé du temps de la campagne électorale de la personne privée Macron, est engagé pour assurer la sécurité du même, devenu président de la République. Ce qui fait que le principe selon lequel la police ne se délègue pas s’est trouvé, gelé, ou contourné ou méconnu (au choix). En attendant que la pratique de la sécurité des personnalités confiée à des opérateurs extérieurs à l’administration, une fois entrée dans les mœurs, soit « légalisée ».

Cette opération s’inscrivait dans l’idéologie et dans le processus de privatisation des services publics, y compris celle des services de police. Processus commencé avant M. Macron (« polices » privées de la RATP et de la SNCF ; contrôle des bagages dans les aéroports ; gardiennage de certains ministères…). Et poursuivi avec M. Macron avec le relevé par des entreprises privées de ce qui constituait les infractions au stationnement, ainsi que le relevé par les mêmes des excès de vitesse…

Il se trouve, semble-t-il, que M. Benalla « s’y est cru ». Et qu’il indisposa les services de l’Etat (service de protection des hautes personnalités) dont les fonctionnaires se sont probablement demandé à quoi ils servaient désormais et à quel destin ils étaient voués. (1)

Et, hasard ? de longues vidéos montrent le sieur Benalla en train de faire (mal) de la police.

C’est alors que classe politique (aidée par les médias possédés par qui l’on sait) s’en prend ouvertement au président de la République en fonction. Parmi laquelle ceux de ses nombreux membres (– droites, centres et ancienne gauche acquis à la nouvelle doctrine sociétale -) qui sont « pour » une politique de privatisation tous azimuts (et qui ont voté la privatisation de la police à chacune de ses étapes), qui admettent qu’aucune spéculation ne soit contrôlée, que la vente de tout et de n’importe quoi aux étrangers ne dérange pas...

Pourquoi ? C’est probablement moins parce que ce politiques ne seraient pas d’accord sur l’idéologie économico-politique et les objectifs, que parce que M. Macron serait, par un comportement révélé par « l’affaire » Benalla, devenu encombrant.

Expliquons.

D’un côté, les Français, en votant Macron (en tous cas en votant contre Mme Le Pen), pensaient installer un président de la République. Veillant à l’intérêt général (qui comprend tout le monde) et veillant à l’indépendance du pays et à son avenir (qui peut ne pas être celui des autres).

D’un autre côté, ceux (qu’on appelle « le pouvoir économico-financier » ou « l’oligarchie ») qui ont « fabriqué » le candidat Macron, comptaient sur les qualités (qui ont valu à l’intéressé d’avoir eu le pied mis à l’étrier dans la banque et dans l’Etat) de ce dernier pour mener à bien ce qu’il restait à faire : casser le droit du travail, donner au privé ce qui appartenait encore au public (l’enseignement, la santé, la police)… Faire reculer l’Etat en continuant à distribuer et morceler les pouvoirs traditionnels de ce dernier... Eloigner les citoyens des élus (diminution du nombre des parlementaires, listes plurinationales pour les élections européennes) de manière à conserver le concept de démocratie et à en geler le fonctionnement... Etc…

M. Macron, aidé de ses équipes, a excellé à faire « avaler » aux premiers ( les citoyens qui l’avaient élu pas forcément pour la même chose), ce que les seconds (« l’oligarchie ») lui demandait de faire :

- La politique menée engendre des conséquences cruelles sur une partie de la population ? M. Macron se rend dans les restaurant du cœur ! 

-  Les jeunes croupissent dans les cités faute de travail (celui-ci étant délocalisé là où les marges peuvent être meilleures) et accessoirement faute de politique convenable des banlieues ? M. Macron va étreindre les joueurs de l’équipe de France, équipe qui est perçue comme l’équipe des banlieues. (Après, dans la même logique, le bain de foule et le show réussi lors des obsèques d’un chanteur populaire). 

-  Les gens trouvent bizarre que l’on revienne sur des acquis sociaux, salariaux ou sur la solidarité entre les différentes composantes de la population ? M. Macron enseigne que ceux qui disent cela sont des « ringards » (ou pire) qui tournent le dos à ses « réformes » donc au progrès. Etc… etc…

Le tout avec cette assurance que seuls ceux qui se savent épaulés peuvent avoir.

C’est probablement cette (trop grande) assurance, doublée d’une croyance que ce qui marche un jour, marchera toujours, qui fera probablement tenir M. Macron pour encombrant par « l’oligarchie » : Dès lors que les techniques utilisées de manière trop ostensible, voire de manière caricaturale, sont ressenties par la population pour ce qu’elles sont, c’est-à-dire comme des techniques de manipulation (techniques en réalité peu ou pas relevées par la classe politique), la population ouvre les yeux sur ce qu’elle ne devrait pas voir. Or, il n’est jamais bon que les citoyens aient le sentiment d’être pris pour des sots.

Il est donc probable que le tollé suscité par le cas pratique Macron-Benalla va lancer la recherche d’un nouveau candidat par « l’oligarchie ». (Etant entendu que M. Macron fera probablement une belle carrière, bien rémunérée, à l’expiration de son mandat).

Avec d’ici là de prévisibles et savoureuses (qui meubleront les « journaux télévisés ») manœuvres en perspective : « savonner la planche » de M. Macron pour l’empêcher de se représenter, sans prendre le risque de faire élire un candidat incontrôlé et incontrôlable par « l’oligarchie » ; opérations de reconversion des politiciens qui prospèrent actuellement de leur soutien à M. Macron et qui devront s’accrocher à un autre s’ils veulent continuer à assurer leur gagne pain.

Marcel-M. MONIN

m. de conf. hon. des universités

(1) Beaucoup de fonctionnaires de police « de base », sont tout à fait satisfaits de ces transferts : selon eux, ça les « soulage » de tâches diverses ; et ils peuvent « mieux se consacrer à leurs tâches essentielles » (sic). A la campagne, des gendarmes se réjouissent que des « citoyens vigilants » (sic) fassent une partie de leur travail. Il semble que les fonctionnaires du SPHP ont été moins béats.


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