Macron, le président qu’il leur fallait

par Sigismond
mardi 9 mai 2017

Avant j'étais optimiste, je me disais qu'on ne pouvait pas tomber plus bas. Depuis je suis devenu pessimiste et je me dis que le pire est toujours à venir. Eh oui, cette élection présidentielle m'accable, m'a accablé du début de la campagne (en fait c'était quand ? en mai 2012 sans doute), jusqu'au résultat de ce 7 mai 2017, encore une date sombre pour la France.

 

Macron président ! Pourquoi pas Fekl, intérimaire à l'Intérieur. Au moins, comme c'est un binational, il parle le Teuton couramment, et c'est un avantage en cette période de soumission, le même que celui qu'on nous avait vendu pour justifier la nomination de l'ex-prof d'allemand au poste de premier ministre, il y a 5 ans. Pourquoi pas Najat, une autre bi-nationale, très certainement en phase avec cette nouvelle croyance en l'inexistence d'une culture française et qui n'aurait sans doute pas rechigné non plus à nous accuser de crime contre l'humanité à Alger. Et puis elle a un passé aussi catastrophique que celui de Macron au sein de ce gouvernement qui fait ses bagages, enfin. Et aussi un beau sourire que Mimi Marchand, conseillère en communication des pipeules et de Macron, aurait su exploiter.

C'est sans doute les appuis des Attali, Minc, Bergé, Drahi et les autres qui ont fait la différence, qui ont fait que ce ne pouvait être que lui. Ils l'ont testé, l'on aidé à grandir, ont façonné ses réseaux, vérifié ou développé son appétence au libéralisme et à l'atlantisme. Le clone de Trudeau sur cette rive droite de l'Atlantique va pouvoir enfin servir, les servir, eux et leurs intérêts qui ne sont pas les nôtres, enfin ceux de beaucoup d'entre nous. C'est une valeur sûre qui ne les laissera pas tomber. En fait s'il s'agit d'analyser ça en termes de rapport de force, lui ne peut pas les laisser tomber, mais eux si. Les moyens qu'ils ont mis à sa disposition pour remporter cette élection, ils peuvent les utiliser contre lui, le jour où ils le décideront, le jour où il les décevra, le jour où ils n'auront plus besoin de lui ou auront trouvé mieux. Car Macron, c'est du consommable, du jetable. Des Macron il y en a un plein réservoir à la sortie de l'ENA par exemple. Il suffit ensuite d'en assurer la formation, d'emplumer la marionnette de chiffons. Et après un adoubement passant par le stage de cooptation des "youngs leaders" et l'imprimatur du groupe Bilderberg, le produit est enfin présentable. Reste à trouver la Mimi Marchand du moment, avant c'était Séguéla, pour le rendre désirable à un peuple avachi par le foot et Koh Lanta. En fait Juppé aurait pu faire l'affaire. Avec lui on aurait vendu la soumission pépère, avec Macron c'est la soumission audacieuse. Parait qu'il veut faire la révolution. Brave petit !

Cela dit, il convient ici de faire une parenthèse, au moins pour souligner la performance, pas de Macron, mais de ceux qui ont aidé à la promotion du produit. Et parmi ceux-ci ces gens brillants qui sont parvenus à priver quelques millions de Français de tout sens critique. Certes on pourrait parler des discours vides du début à la fin comme celui prononcé au Louvre après cette arrivée ridicule dans la nuit censée sans doute nous rappeler la marche de Mitterrand vers et dans le Panthéon, donc de ces discours chargés de tout et de rien, mais surtout de rien ou chacun pouvait aller puiser ce qu'il espérait trouver mais sans jamais vraiment le trouver, de ces discours dont le contenu laisse pourtant pantois celui qui prend la peine de les écouter, de ces discours qui font que je mets au défi quiconque de dire ce que veut faire le nouveau président. Et c'est normal parce que faire est moins son truc que laisser faire. C'est un vrai libéral. Donc oui on pourrait parler des discours, de ces discours ponctués de slogans et de contrevérités du style "les patriotes, c'est nous", cela le ramenant dans cette filiation discursive orwellienne où comme "la guerre c'est la paix", eh bien "la poursuite des abandons de souveraineté et la continuation de la dilution dans l'Europe et le monde libéral, c'est le patriotisme". Mais quand même la plus forte performance des communicants a été, à mon avis, cette capacité à faire avaler à des millions de gogos que l'ancien conseiller pour les choses économiques du candidat à la primaire socialiste Hollande, puis du candidat à la présidentielle Hollande, puis du président Hollande qui finira par le nommer ministre de l'économie, n'a rien à voir, mais alors là rien du tout, avec les désastres qui touchent la France, et incarne le renouveau. Houdini ou Copperfield ont trouvé leurs maitres. Cela dit il n'y a pas meilleur public pour les illusionnistes que ces gens qui veulent être illusionnés.

Mais ce n'est pas fini. Il faut maintenant persuader que le vote de second tour a un autre sens que celui qu'il a réellement, que c'est un vote d'adhésion plutôt que de rejet. Et on aura donc vite fait sans doute d'oublier que plus d'un électeur sur trois ne s'est pas déplacé ou a déposé un bulletin blanc ou nul, le nombre élevé de bulletins blancs ou nuls ayant d'ailleurs un sens important, et que parmi les électeurs de Macron, 57% (sondage ipsos) ont voté avant tout contre Le Pen, ce qui fait que le vote d'adhésion soit à la personnalité de Macron, soit à son programme (!), soit à l'idée de renouveau qu'il représente correspond à moins de 25% du corps électoral. Et il s'agit là d'un second tour ! Ce qu'on tente de nous vendre comme une grande victoire, même si parfois c'est un peu nuancé, la nuance donnant de la crédibilité au mensonge, est en fait une bérézina.

 

Mais après tout qu'importe ! Qu'importe que le président davantage qu'être élu soit finalement le premier d'une compétition truquée au cours de laquelle l'enjeu était d'éliminer Fillon du premier tour pour mieux éliminer Le Pen du second et donc laisser la place à celui choisi ailleurs, dans des antichambres où caviar, champagne (pour le Taittinger s'adresser à Jouyet) et coups tordus font bon voisinage. Bon, je dis Fillon, mais ça aurait pu être n'importe qui d'autre, Sarkozy dont la barque avait déjà été bien chargée à titre préventif ou Juppé avec ses vieilles affaires de financement du RPR ou de facilités de logement accordées à sa famille quand il était premier ministre, l'essentiel étant que le candidat choisi soit au second tour face à Le Pen, ce qui est évidemment un gage de victoire…encore. En fait vive la famille Le Pen, qui garantit la pérennité d'un mouvement entamé depuis déjà pas mal d'années et destiné à nous anéantir en tant que nation, en tant que Français. Enfin je m'entends, il s'agit juste de nous priver de notre identité, pas de nos existences de consommateurs et parfois, sans doute de moins en moins, producteurs, quoique pour les bouches inutiles il faudra sans doute y réfléchir un jour ou l'autre. Mais rassurez-vous, on fera ça bien et surtout ça sera présenté comme un progrès, un truc destiné à garantir la dignité de l'être humain. Que du positif, quoi ! Comme l'Europe qui nous apporte la prospérité ainsi que les traités inégaux qui nous assureront des assiettes pleines de malbouffe, mais pleines quand même, et c'est ce qui importe, l'essentiel étant de vendre le produit. Car la pub, ou la com, c'est bien ça, c'est rendre désirable de la merde, que ce soit de la bouffe, des fringues, des tas de trucs inutiles mais pour lesquels on fera la queue pendant des heures, sinon des jours pour être les premiers à être servis, ou des individus censés nous guider, tandis que leur rôle est davantage de capter l'attention et de servir de boucs-émissaires à nos colères légitimes mais aussi idiotes puisque nous les dirigeons toujours vers les mauvaises personnes. Cela dit rassurez-vous, celles-là, même si elles partent sous les huées ou les quolibets, sont toujours récompensées grassement de leur (in)action et de leur fidélité au système. Et même elles deviennent un jour populaires, ce qui est finalement logique puisque le pire est toujours à venir et qu'elles représentent forcément un état antérieur d'une même situation qui a empiré.

 

C'est peut-être tout ça qu'on appellera pour faire moderne ou post-moderne, ne soyons pas avares de ces expressions dont personne ne saisit le sens et surtout pas ceux qui les utilisent, la post-démocratie, ce qui doit vouloir dire un truc après la démocratie, donc que ce n'est déjà plus la démocratie mais quelque chose sans doute plus en phase avec une époque où on peut se glorifier d'avoir plein d'amis et davantage encore mais juste sur facebook. On peut donc penser à une démocratie virtuelle utilisant quelques repères stables, comme le vote papier à l'urne, tandis que les meilleures techniques de désinformation et de manipulation auront été utilisées pour orienter collectivement le vote ou du moins pour garantir de façon déloyale un certain résultat. Qui aura observé l'utilisation des médias, et même de la justice lors de cette élection m'aura compris. Inutile d'entrer dans le détail, d'autres l'ont déjà fait. Ce n'est pas le cabinet noir au service d'un président dont il s'agit, c'est bien davantage que cela, une collusion devant nos yeux avec ses grands-prêtres, conseillers éternels de tous les présidents, l'intendance constituée de ceux à qui profite en premier le système libéral de plus en plus délivré de ses entraves, ils sont de grands patrons et ont investi dans des médias qui perdent de l'argent, devinez pourquoi, quelques hauts fonctionnaires, grands spécialistes des aller et retour entre haute fonction publique, cabinets ministériels et présidentiel, et grandes entreprises, et pour finir, parce qu'il faut bien donner une apparence démocratique à tout ça des politiques qui ne sont plus là qu'en tant que prête-noms quand, soi-disant, ils ont un pouvoir décisionnaire, ou animateurs de ce grand jeu qu'est la post-démocratie. Et puis il y a nous, le public auquel on voudrait faire croire qu'il est encore acteur de son destin, mais auquel on n'hésite pas à le voler sans retenue et avec la bénédiction de tous ceux cités au-dessus quand il se prend au sérieux, comme en 2005. Un public finalement assez sympa, d'autant plus sympa qu'on l'instruit de moins en moins, qu'on lui ôte tout doucement ses identités nationale (on dénigre), culturelle (on en nie l'existence), même sexuelle (on sème le doute dans les petites têtes), un public qui subit ou qui renonce, qui sait bien qu'il se fait avoir mais qui attribue ça à ses dirigeants politiques qui ne sont plus rien. Alors on lui fait plaisir maintenant, on lui propose de nouvelles têtes qui n'en sont pas vraiment, on lui fait croire, et dans 5 ans puisqu'il faut désormais considérer que le second mandat fait partie du passé, on lui vendra un nouveau produit. Ainsi soit-il !

 

"Il n'y a pas d'alternative !", comme disait l'autre. Ça devient de plus en plus vrai car plus on avance, c'est une image, moins on n'existe, surtout en tant que peuple. Le peuple n'est d'ailleurs plus qu'une illusion, un mot qu'on sort dans les grandes occasions, tandis qu'au quotidien on préfère parler des jeunes des quartiers, des Français de confession musulmane ou juive, des homosexuels et homosexuelles, parité du vocabulaire oblige, etc., etc., chacun pouvant se réclamer de la communauté qui lui plaira du moment que ça lui permet de revendiquer des droits, et même les plus improbables, parce que pas vraiment prévus par la nature dont on pourra dénoncer à juste titre la tyrannie, bien qu'en même temps on nous demandera de la protéger. Tout ça ça occupe bien les esprits, on fait tout pour entre un match de foot et une émission de téléréalité, et ça empêche sinon de comprendre l'essentiel de savoir qu'il n'est pas là où on nous invite à le voir ou que le misérable Somalien qui vient de débarquer à Lampedusa et sera demain en train de franchir les Alpes et la délocalisation de Whirpool Amiens appartiennent à une problématique commune.


Lire l'article complet, et les commentaires