Macron : une biographie trop parfaite

par Jean Beaumont
vendredi 17 novembre 2017

Emma­nuel Macron est né le 21 décembre 1977 à Amiens. Son signe astrologique est double, puisque il est exactement à la date lisière entre Sagittaire et Capricorne, deux signes par ailleurs complexes. Jupiter, astre de succès et de réussite, est curieusement le maître du signe du Sagittaire, signe qui ne reconnaît aucune limite ni aucune contrainte. Le Capricorne, lui, est habituellement décrit comme un adepte de l'organisation sans faille, détestant l'improvisation et l'incertitude. On voit bien ici se dessiner – quoiqu’on pense de cette pseudo science qu’est l’astrologie – certaines coïncidences avec la réalité.

Il nait dans une famille aisée : il est le fils d'un couple de méde­cins spécialisés. Son père est neuro­logue, sa mère pédiatre, et tous deux sont profes­seurs au CHU d'Amiens, ce qui leur procure de très confortables revenus. Il a un frère et une soeur, et passe une grande partie de son enfance chez sa grand-mère, ses parents étant sans cesse à la tâche. Il suit sa scola­rité chez les Jésuites de la Provi­dence à Amiens. L’éducation des jésuites est à la fois austère et beaucoup tournée vers l’étude des textes, ce qui sans doute expliquera son amour de la littérature, qu’il partagera par la suite avec son épouse Brigitte. Elève brillant – il est lauréat du Concours géné­ral de français à 16 ans – il se passionne égale­ment pour la musique et décroche le troi­sième Prix de piano du Conser­va­toire d'Amiens. Ce simple détail montre que nous avons affaire à un surdoué, catégorie très particulière, à la personnalité souvent torturée.

En termi­nale, il gagne la capitale, et le lycée Henri-IV. Diplômé de Sciences Po Paris, il entame ensuite un cursus univer­si­taire à Nanterre. En 1999, il est assis­tant du grand philo­sophe contemporain Paul Ricoeur et parti­cipe à la rédac­tion de l'un de ses derniers ouvrages. Après une maîtrise de philo­so­phie sur Machia­vel (trois années d'étude qui lui seront utiles dans le monde impitoyable de la politique), il rédige son mémoire de DEA sur l'Inté­rêt géné­ral, lecture et prin­cipes de la philo­so­phie du droit de Hegel. Il est donc un exégète d'Hegel, ce qui n'est pas le moindre des paradoxes !

En 2002, il intègre l'ENA – promo­tion Léopold Sédar Senghor – d'où il sort diplômé en 2004. Il noue à ce moment plusieurs amitié avec des condisciples : Boris Vallaud, Najat Vallaud Belkacem (qui est d’Amiens comme lui) et l’ex conseiller de Hollande Gaspard Ganzer.

Le jeune Rastignac débute sa carrière à l'Inspec­tion des Finances, d'abord inspec­teur adjoint en avril 2004, puis inspec­teur des Finances en octobre 2005. En juin 2007, il est chargé de mission auprès du chef de service de l'Inspec­tion géné­rale des finances. C’est un développement classique, mais terne et convenu, de son cursus. En 2008, la banque Roth­schild l'engage. Son ascen­sion au sein de la banque d'affaires est fulgu­rante, au point qu’il en devient asso­cié-gérant en décembre 2010 ! Macron conduit jusqu’à son terme plusieurs fusions/ acquisitions, et engrange trois millions d’euros de rémunération sur cette période au total.

En mai 2012, il accepte la propo­si­tion de François Hollande, rencon­tré en 2007 lors d'un dîner mondain chez Jacques Attali, de rejoindre l'Elysée en tant que « secré­taire géné­ral adjoint de la prési­dence ». La suite est connue : le 26 août 2014, il est nommé Ministre de l'Econo­mie, de l'Indus­trie et du Numé­rique dans le deuxième gouver­ne­ment de Manuel Valls. Les deux ne s’apprécient que modérément, mais on une estime « technique » l’un envers l’autre. Le 30 août 2016, Emma­nuel Macron démissionne. Son mépris pour son mentor politique est devenue, lui, intenable : l’immobilisme et l’incapacité à décider de Hollande constituent aujourd’hui, selon tous ses proches, le contre-exemple à ne jamais suivre. Quelques semaines plus tard, le 16 novembre, Emmanuel le winner annonce offi­ciel­le­ment sa candi­da­ture à l'élec­tion prési­den­tielle 2017.

On ne peut comprendre l'actuel Président de la République que si l'on retient plusieurs axes de cette courte bio.

1 / C’est un homme surdoué, bon pianiste, doué d’une mémoire phénoménale (il peut citer des pages entières de tirades du théâtre classique), travaillant sans cesse - ses envois de SMS la nuit sont quotidiens – qui sans aucun doute est hors norme. Et précisément, ce trait de personnalité n’est il pas, paradoxalement, une faiblesse en cela qu’elle le situe hors des autres ?

2 / C’est un bourgeois de province qui n’a pas connu la disette. Pire : son parcours ressemble typiquement à ceux qui forment la caste tenant le monde dans ses serres.

Le défi pour Emmanuel Macron consistera donc, au fond, à se hisser au dessus de ce qu’il est, et fut.


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