Madoff et le système de protection à la française

par FRIDA
vendredi 23 avril 2010

Un article intitulé « Les Etats constituent une pyramide à la Madoff » conclue ainsi : « A l’instar du système Madoff qui s’est donc effondré lorsque les nouveaux cotisants n’étaient plus suffisamment nombreux par rapport aux anciens (qui, en plus, réclamaient leur dû), le système de retraite par répartition à la française est donc voué à l’explosion. Souligner une telle réalité ne relève pas de la politique, ni même de l’économie, mais tout simplement de la mathématique. ».

la sortie du rapport du COR et le projet de réforme de la retraite ont mis au goût de jour tous les postulats et le matraquage médiatique pour faire croire aux gens que c’est dans leur intérêt, que la réforme se fait, sous entendu l’augmentation des cotisations et l’allongement de l’âge de la retraite.

Alors avec quels arguments veulent-ils convaincre les plus réticents ??

  1. Les autres l’ont fait, pourquoi pas nous ???
  2. Le régime est moribond et ne tiendra pas longtemps et au risque de le compromettre définitivement.
  3. Le dénigrement et la caricature.

Le premier argument, traduit autrement, signifie que les meilleurs l’ont fait les nuls doivent suivre. Oubliant par là-même, que le régime par répartition, s’est inspiré du principe de l’entraide coopérative et mutuelle, soit au sein de la famille soit dans un groupe plus élargi. L’esprit en est que toute personne se trouve assurée d’être soutenue dans les moments difficiles de sa vie. Il y a eu ensuite une prise de conscience traduite dans les textes de droit social. Ainsi l’Etat, et non seulement la famille ou le groupe social, offrait aux citoyens une protection tout au long de leur vie. Au fil de temps, cette protection s’est élargie et approfondie. Actuellement, on assiste à un retour en arrière. Pour que les riches soient exonérés de toute contribution, on ponctionne sur les droits des salariés et on n’hésitent pas à saccager le service public à coup de réformettes, pour plus le brader finalement au secteur privé. Le reste n’est que poudre aux yeux.

Le deuxième argument est asséné par les experts. Ils se sont acharnés pour nous faire vendre le oui pour la Constitution européenne. Nous votons contre. Qu’à cela ne tienne, on passe par le parlement. A quoi ils jouent ?? Au démocrates respectant le peuple et croyant dans l’arme de leur légitimité d’experts, ce peuple ignorant qui suivra forcément leur décision.

Les revoilà à l’oeuvre dans tous les médias expliquant à qui veut les entendre que la réforme est indispensable, mais ne posant jamais les bonnes questions, ne cherchant jamais les responsables de cet état de fait de notre système de protection sociale, et n’écoutant jamais ce que proposent ceux qui n’ont aucun intérêt particulier dans la remise en cause de la protection sociale.

Il n’y a plus de vraie opposition politique, tous s’accordent à dire que la réforme est indispensable, et ils se mettront d’accord sur un leurre à donner au bon peuple pour le calmer. Ils nous proposent quelques concessions, à savoir des éventuels taxes sur les revenus de patrimoine, mais les dés sont pipés. Ce qu’ils donneront par une main, ils le reprendront sitôt de l’autre main. Et les salariés se retrouveront comme d’habitude le dindon de la farce. Rappelez cette Europe censée faire la prospérité des peuples européens.

Qui sont ces experts qui pullulent les médias ??

Un échantillon représentatif, comme dirait un habitué des sondages : Agnès Verdier-Molinié, Marc Touati, Michel Godet, et feu Jacques Marseille. Ne sont pas tous cités, mais ceux-là sont caractérisés par un degré de prosélytisme effroyable. On n’est plus dans le débat et la discussion. Ils intimident, ridiculisent et d’une certitude qui fait trembler la terre. Alors comment voulez-vous raisonner quand l’injonction est de se mettre au garde à vous.

Qu’est-ce qui leur donne cette légitimité, les médias ??. Et la conséquence en est le monopole de discours, du matraquage publicitaire acquis à une doctrine ultra libérale drapée dans les habits de l’expertise.

M Godet a deux doctorats, est-ce pour cela que son discours est infaillible, juste, exempt de tout reproche au niveau de raisonnement du moins.

A Verdier-Molinié quant à elle, elle a un diplôme en histoire économique contemporaine. Est-ce suffisant. Combien sont des diplômés de la même matière qui sont sur le carreau, réduit au silence quant à leur avenir et leur présent ; mais elle, elle est le porte-parole d’un think-tank qui a pour mission d’évangéliser la France à la doctrine ultra-libérale, d’une manière décomplexée.

http://www.ifrap.org/Un-Think-Tank.html

M Touati est titulaire d’un DEA de Monnaie, Finance, Banque de l’université Paris-I-Panthéon-Sorbonne. Il est Directeur Général Adjoint chargé de la Recherche Économique et Financière de la société d’investissement Global Equities.

Loin de faire le procès d’intention de ces gens, mais le zèle par lequel ils vouent une énergie phénoménale, pour désavouer le système économique et social français, suscite le questionnement. Ce n’est plus de la recherche, de débats intellectuels, mais purement et simplement une croisade contre la société française et son mode de vie.

N’oublions pas les instances qui se chargent de l’élaboration des thèses à défendre, celles qu’il faut combattre, les méthodes de travail etc

http://www.lecercledeseconomistes.asso.fr/

http://www.ifrap.org/

La question majeure est la suivante : pourquoi tant d’investissement pour dénigrer ce qu’est la France et lui donner l’injonction d’imiter les autres comme s’il n’y a pas de salut qu’avec l’asservissement idéologique à une doctrine, celle-ci n’a pas honte de réduire les humains à un produit qui doit être rentable pour la finance et par son travail et par sa consommation.

Enfin, le moyen pour déstabiliser le contradicteur est de le mépriser, de jouer sur les mots, les ambiguïtés, les généralités, les comparaisons douteuses.

Une blague est remise au goût de jour à la faveur de réforme de la retraite.

Le juge Denny Chin chargé de l’affaire Madoff demande à ce dernier :

« mais tout de même Monsieur Madoff, quelle mouche vous a piqué ? Qui vous a donné l’idée de réaliser une telle carambouille : faire payer les anciens cotisants par les nouveaux arrivants ». Bernard Madoff reste calme et répond : « c’est très simple, j’ai observé le système de retraite par répartition en France et j’ai fait pareil… ».

Celle-ci est la version trouvée sur le site de M Touati. Il y a bien sûr quelques variantes.

On peut bien en rire, si cela ne fait pas partie d’une large manipulation intellectuelle volontaire ou non pour faire admettre aux gens que leur système de protection sociale est une escroquerie. C’est le monde à l’envers.

Mais personne ne s’attardera pour expliquer l’origine de la blague.

http://blogs.indystar.com/varvelblog/archives/2008/12/madoff_scheme.html

Le dessin de Gary Varvel pour l’indianapolis star stigmatisait les démocrates, et notamment le député Barney Franks et le sénateur Chris Dodd. Le dessin est bien partisan à l’origine.

Tous ceux qui en ont vu une illustration pour casser la protection sociale française s’en sont jetés comme sur du pain béni.

http://www.financialsense.com/fsu/editorials/degraaf/2008/1229.html

Sur le site des 4 vérités, j’ai relevé ce paragraphe : « Un lecteur des « 4 Vérités » m’écrivait récemment pour me faire remarquer que cela lui faisait penser au système de retraite français. C’est exact : les retraites ne sont en effet servies qu’en prélevant les cotisations des actifs d’aujourd’hui. Mais c’est beaucoup plus général que cela : en réalité, c’est toute l’économie qui reposait jusqu’à cette crise sur ce mécanisme de la croissance par la dette. ».

Que répondre à ce genre de désinformation ??

Un extrait de l’article de M Godet :« En d’autres termes, les déficits annuels des retraites prévus par le COR (40 milliards à partir de 2015, de 60 milliards à partir de 2020 et de 115 milliards en 2050) sont loin d’être des plafonds mais constituent au contraire des planchers. 

En outre, il ne faut pas oublier qu’il s’agit là de déficits annuels qui se cumuleront donc avec le temps et pourraient avoisiner les 2 600 milliards d’ici 2050. Compte tenu d’une dette publique qui atteint déjà 1 500 milliards d’euros et qui va encore augmenter indépendamment des déficits des retraites, il est donc clair que si la question du financement de ces dernières n’est pas résolue au plus vite, la note de la dette publique française sera très vite mise sous surveillance et ensuite dégradée dans de brefs délais. D’où une augmentation des taux d’intérêt, donc moins de croissance, plus de déficits, plus de trous des retraites et de la sécu et, finalement, la distance entre Paris et Athènes sera subitement raccourcie… » ; et Jacques Bichot dans un article intitulé « Les Etats constituent une pyramide à la Madoff » conclue ainsi :  «  A l’instar du système Madoff qui s’est donc effondré lorsque les nouveaux cotisants n’étaient plus suffisamment nombreux par rapport aux anciens (qui, en plus, réclamaient leur dû), le système de retraite par répartition à la française est donc voué à l’explosion. Souligner une telle réalité ne relève pas de la politique, ni même de l’économie, mais tout simplement de la mathématique.  » La messe est dite.

Vous remarquerez que personne ne pose la question du chômage. Le facteur essentiel pour casser le système de protection social. On peut procéder comme eux et déclarer facilement que les politiques et la finance internationale n’avaient aucunement intérêt à résoudre le problème du chômage. C’est même le moyen efficace pour asservir et exploiter les gens. Ceux qui n’ont pas de travail envient ceux qui souffrent de part leur condition de travail qui s’est dégradée depuis bien longtemps. Ceux qui travaillent en veulent à ceux qui en sont privés ou osent encore refuser de travailler tout en restant pauvres, puisque la seule différence, c’est le gain en stresse et en fatigue. Les travailleurs en voudront aux retraités, alors que la majorité ne roule pas sur l’or. Et ainsi de suite. La solidarité existe maintenant dans le monde de la finance et de la politique, les gens se soutiennent. Ils ont une conscience de classe à part. Celle par laquelle se crée la richesse, qui nourrit le peuple et il lui doit reconnaissance et gratitude. Comprenez servitude.


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