Maison de la Culture de Bourges. Un naufrage ?

par gilbert18
mardi 25 novembre 2014

La maison de la Culture de Bourges est-elle morte ? L'édifice arts déco de Marcel Pinon est en partie démoli, la façade (classée) est fragilisée. Aujourd'hui de nombreux berruyers s'émeuvent de l'abattage des arbres de la place Séraucourt pour faire place à un nouvel équipement, alors que le coût de cette nouvelle Maison de la culture n'est pas financé dans son entier. Des protestataires occupent le site depuis une dizaine de jours pour protéger le site. À Bourges, des voix de plus en plus nombreuses s'élèvent pour demander de réhabiliter l'édifice historique de la MCB au lieu de l'abandonner....

La maison de la Culture de Bourges (monument classé, de style arts déco), située en un lieu de visibilité et d’accès exceptionnels pour l’animation de la ville, est réduite à l’état de ruine, suite à la décision du précédent maire de Bourges, Serge Lepeltier, de renoncer à sa réhabilitation et de vouloir construire un nouveau bâtiment excentré et d’un coût élevé. Son successeur s'engage dans la même voie. Aujourd'hui des berruyers s'émeuvent de l'abattage des arbres de la place Séraucourt pour faire place au projet, alors que le coût de nouvelle Maison de la culture n'est pas financé dans son entier. Des protestataires occupent le site depuis une dizaine de jours pour protéger le site. À Bourges, des voix de plus en plus nombreuses s'élèvent pour demander de réhabiliter l'édifice historique de la MCB au lieu de le laisser à l'abandon, ce qui serait mieux et (peut-être) moins cher. Un collectif se crée, une pétition circule ....
 Pour André Malraux ((alors ministre de la Culture sous de Gaulle), une Maison de la Culture par département devait voir le jour afin que "n'importe quel enfant de seize ans, si pauvre soit-il, puisse avoir un véritable contact avec son patrimoine national et avec la gloire de l'esprit de l'humanité" et de "rendre accessible les œuvres capitales de l'humanité au plus grand nombre de Français".
 La "première" Maison de la Culture de France, la Maison de la Culture de Bourges fut inaugurée en 1965 par le Général de Gaulle et André Malraux. Elle occupait un édifice de 1938 de style Art-déco du à l'architecte Marcel Pinon, qui devait être la "Maison du peuple" voulue par le maire de Bourges, Henri Laudier. La façade, le hall et l'escalier classés sont inscrites au titre des monuments historiques depuis 1994. La maison de la Culture a animé la vie culturelle berruyère et régionale durant la deuxième moitié du vingtième siècle, elle a lancé le Printemps de Bourges en 1977. Avec "La comédie de Bourges" de Gabriel Monnet elle a fortement contribué au rayonnement et au prestige de la Ville, bien au delà des frontières régionales.
 Au fil des années et faute d'entretien, le mobilier vieillit, les locaux, la toiture, l'installation électrique, se dégradent tandis que les normes de sécurité évoluent. La maison ne peut plus accueillir le public pour des raisons de sécurité, et la saison 2009/2010 se déroule "hors les murs" dans les salles de la ville. Pendant ce temps la municipalité élabore des projets et des budgets pour la réhabilitation de la MCB. La même année, la structure associative qui administrait la MCB est remplacée (non sans heurts) par un EPCC (Établissement public de coopération culturelle).
 Aujourd'hui, le projet municipal de construction d'une nouvelle maison de la Culture délaissant le site originel pour s'installer sur une partie de l'espace arboré de la place Séraucourt est fortement controversé. On assiste à l'occupation du site pour éviter l'abattage des arbres, une pétition est lancée, des interventions auprès des pouvoirs publics se multiplient, des réunions d'information sont organisées ...etc. Il faut dire que l'information par le maire de Bourges précédent, faite de bribes et d'annonces successives au fur et à mesure des aléas de la démolition, des travaux et des fouilles archéologiques jugées indésirables, a préparé le terrain pour la déception et la résistance qui s'expriment aujourd'hui. Quand au nouveau maire, il a manifesté son peu d'intérêt pour la culture en supprimant la Biennale d'art contemporain, le festival du film écologique et en fermant les salles du musée du Berry consacrées aux grès de La Borne... On pourrait imaginer de meilleures preuve de son intérêt pour la culture en début de mandat.


 Inscrite à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques en 1994, la maison de la culture en partie démolie et abandonnée va longtemps rester une friche. Elle offre un spectacle navrant aux berruyers et aux touristes, à quelques centaines de mètres de la cathédrale Saint Étienne classée au patrimoine mondial de l'Unesco, et à quelques centaines de mètres du Château d'eau, inscrit à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques en 1975.
 Un article paru sur le site de la "Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France" résume les errements des projets de réhabilitation puis du nouveau projet. Extrait.
> En 2011, pour satisfaire aux conditions de sécurité et d’adaptabilité nouvelles, un projet de restructuration totale fut adopté à l’unanimité par le Conseil municipal (Serge Lepeltier, maire), avec un coût de travaux de 19 303 000 euros devant être réalisés de fin 2011 à fin 2013.
 On peut légitimement s’interroger sur le coût, prohibitif, des fouilles, et sur l’engagement prématuré des travaux sur les bâtiments, entraînant leur fissuration. Sept millions furent ainsi dépensés en quasi perte puisque le retard du chantier fit perdre la subvention européenne (FEDER), ce qui conduisit, en février 2013, à l’abandon pur et simple du bâtiment historique.
 Ensuite, sans concertation avec les Berruyers, et plutôt que d’affronter les difficultés inhérentes à un chantier complexe, quelques élus et responsables culturels eurent l’idée d’une construction nouvelle dite "Maison de la Culture du XXIe siècle", sans définir le contenu d’un concept qui semble vide de sens… Et cela sur un site urbain arboré légué par le XVIIe siècle.
 Ce projet néfaste prétend abandonner, au point culminant du centre-ville, le deuxième symbole de la ville, après la cathédrale Saint-Étienne, pour n’en faire qu’une friche (durant combien de décennies ?) et saccager un espace boisé que toutes les générations d’habitants s’approprient.
 Le nouveau projet, encore incomplet, est en outre évalué à 36 millions d’euros alors qu’il aurait une capacité moindre (700 places pour la nouvelle salle au lieu des 1000 places de l’ancienne) !
 Dès juillet 2013, une contre-proposition a démontré qu’il était possible de réutiliser le bâtiment historique et d’y créer le lieu de vie urbaine et de rencontres qui fait défaut à Bourges. Les partisans de cette alternative de conservation architecturale et de mise en valeur culturelle du site actuel ont été critiqués dans les médias locaux, alors qu’ils souhaitaient un débat démocratique.
 Les Berruyers ont légitimement réagi devant la décision d’abattre (sans l’autorisation de l’Architecte des Bâtiments de France), dans un premier temps, 82 arbres en contrebas de la place Séraucourt, pour permettre des sondages archéologiques. Quant à l’implantation du futur bâtiment neuf, elle exigerait d’abattre de plus nombreux arbres encore !
 Le collectif, spontanément créé, totalement apolitique, mêle des citoyens berruyers de tous horizons, jeunes (étudiants ou non) et moins jeunes, tous scandalisés par la gestion de ce dossier, en négation de l’histoire culturelle et architecturale, de l’urbanisme, de l’environnement et d’un usage précautionneux des deniers publics.

> L'avenir de la maison de la Culture de Bourges, s'il concerne en premier lieu les berruyers, ne concerne pas qu'eux. Le gâchis auquel nous assistons avec indignation doit être connu de tous les amis et défenseurs de la culture et des sites en France. La protestation doit s'amplifier bien au delà des limites de Bourges et du département du Cher.

> Source. La maison de la culture de Bourges menacée. Site de la Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France (SPPEF).  >>> Lien
> Lire dans gilblog les pages retraçant les événements depuis 2011 dans la rubrique Culture et MCB. >>> Lien.
> Le collectif d'associations est composé de : Collectif pour un projet alternatif Maison de la Culture / Groupe MACU de Bourges / Association des Amis de la Maison de la Culture / Berry’ing / Mon Cher Vélo / Société pour la protection des paysages et de l'esthétique de la France - Cher / Nature 18 / Collectif du Cher Notre Dame des Landes / Association KI-6-col’.


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