Marion Maréchal Le Pen - La mèche lente est allumée ?

par gruni
vendredi 23 février 2018

Qu'il semble déjà loin le temps où Marion Maréchal-Le Pen était considérée par ses adversaires politiques comme une "marion-ette" entre les mains de Jean-Marie Le Pen. Le "Menhir" qui refusait que sa protégée inexpérimentée réponde aux journalistes des médias nationaux par peur d'une gourde. Vous connaissez la suite, en juin 2012 la petite-fille du "vieux lion" devient à 22 ans la plus jeune députée de l'histoire de la République française. Lorsqu'en 2017 Marion Maréchal-Le Pen décida pour des raisons familiales et d'autres politiques, de s'éloigner pour une durée indéfinie de la vie politique, son grand-père s'écria que c'était "une trahison !".

Le 1er mars sortira le premier tome des Mémoires de Jean-Marie Le Pen et quelques extraits se trouvent déjà dans la presse. C'est sa version de l'Histoire ou de son histoire passée que vous pourrez lire ci-dessous. Alors que la jeune Marion Le Pen qui s'exprimait à la Conservative Political Action Conference (CPAC), représente l'avenir pour beaucoup de supporters du Front National. Sa courte réapparition était aussi une piqure de rappelle avant le congrès du Parti, du 10 au 11 mars.

Tortionnaire pendant la guerre d'Algérie 

« On a parlé de torture. On a flétri ceux qui l’avaient pratiquée. Il serait bon de définir le mot. Qu’est-ce que la torture ? Où commence, où finit-elle ? Tordre un bras, est-ce torturer ? Et mettre la tête dans un seau d’eau ? L’armée française revenait d’Indochine. Là-bas, elle avait vu des violences horribles qui passent l’imagination et font paraître l’arrachage d’un ongle pour presque humain. (...) Cette horreur, notre mission était d’y mettre fin. Alors, oui, l’armée française a bien pratiqué la question pour obtenir des informations durant la bataille d’Alger, mais les moyens qu’elle y employa furent les moins violents possible. Y figuraient les coups, la gégène et la baignoire, mais nulle mutilation, rien qui touche à l’intégrité physique. (...) Il est plus que ridicule, il est pervers, il est profondément immoral, de jeter l’opprobre sur des hommes qui ont le courage d’utiliser sur ordre, pour obtenir le renseignement qui sauvera des civils, des méthodes brutales qui leur pèsent, qui leur coûtent », tranche-t-il, tout en dénonçant « une machination politique » de ceux qui l’ont personnellement accusé en 1985".

« Ni moi, ni mes camarades n’étions nullement chargés des interrogatoires spéciaux. (...) C’est du bidon, évidemment du bidon, qui ne résiste pas à la plus rapide des analyses. J’ai ainsi été accusé de la même scène de torture le même jour, à la même heure, à plus de 100 km de distance. C’est horrible, l’ubiquité de la bête immonde ! »

Sur le Maréchal Pétain et De Gaulle

« Le Maréchal avait l’écrasante responsabilité de s’en accommoder pour permettre à quarante millions de compatriotes de survivre. (...) Que l’on puisse discuter ensuite de la politique de collaboration, de ses fautes, de ses excès, à condition qu’on examine les fautes et les excès de tous, je le veux bien, mais cela ne remet pas en cause ce que je viens de décrire. En somme, l’histoire a avalisé le jugement militaire du général de Gaulle mais cela ne délégitime pas pour autant l’action politique du maréchal Pétain ni la position morale des Français qui l’ont suivi. Si de Gaulle a eu de la vista, Pétain n’a pas manqué à l’honneur en signant l’armistice. L’opinion majoritaire était d’ailleurs que la France avait besoin d’une épée et d’un bouclier contre les Allemands et je l’ai partagée longtemps, jusqu’au jour où l’écoute de la radio de Londres m’en détrompa. Il m’apparut vite que pour les gaullistes de micro, l’ennemi était à Vichy plus qu’à Berlin. Les Français parlaient aux Français pour leur enseigner plus la haine du Maréchal que celle d’Hitler. J’en fus atterré. Je ne comprenais pas pourquoi. La raison était pourtant simple : il fallait que de Gaulle abaissât Pétain pour monter lui-même. »

« De Gaulle reste pour moi une horrible source de souffrance pour la France. J’allais voir le 23 juillet le général de Gaulle à Auray. Pour toucher le grand homme. Il n’avait pas encore acquis le métier des bains de foule et passait hiératique, un peu excédé, au milieu de la masse enthousiaste. Je serrais cette main indifférente. Il me parut laid et dit quelques banalités à la tribune tendue de tricolore. Il n’avait pas une tête de héros. Un héros doit être beau. Comme saint Michel ou le maréchal Pétain. J’étais à nouveau déçu ».

Selon Le Pen, De Gaulle a « trahi » l’Algérie Française. « En apparence il y a deux de Gaulle, le rebelle de 1940 et le chasseur de rebelles de 1961. Mais tous les deux, ensemble, forment pour moi un faux grand homme dont le destin fut d’aider la France à devenir petite. »

De la pitié pour Marine Le Pen

 « Il est trop tôt pour parler de mes filles. Je pourrais en dire du mal, je le fais parfois quand on m’y provoque. Je ne comprends pas tous leurs actes, ni tous les reproches qu’elles me font. Elles peuvent changer, et moi aussi (...) Marine vient de subir une présidentielle et des législatives décevantes. Philippot et les siens l’ont quittée, elle peine à faire sa rentrée. Le prochain congrès du FN s’annonce houleux. Elle est assez punie comme cela pour qu’on ne l’accable pas. Un sentiment me domine quand j’y pense : j’ai pitié d’elle. Je crois à la justice immanente (...) Sa stratégie et son stratège se sont plantés (...). En s’appliquant à me rendre ringard, elle s’est éclaboussée dans la manoeuvre par son échec, et sans doute le Front national aussi, ce qui est plus grave. »

"Puis revenant sur le départ de sa fille de Montretout, en septembre 2014, après que sa chatte fût tuée par les deux chiens du domaine de Saint-Cloud, et qui marqua symboliquement leur rupture politique" : « Cette histoire n’était qu’un prétexte pour rompre. Qui veut tuer son père accuse ses chiens de la rage. Chez les oiseaux, les parents chassent les oisillons du nid pour qu’ils volent de leurs propres ailes ; dans la famille Le Pen, c’est l’inverse, l’oiselle a viré l’aigle de son aire pour devenir adulte. »

Pour plus d'infos...

Marion Le Pen avait 10 minutes pour s'exprimer après Mike Pence

Et son apparition au rendez-vous des conservateurs américains ne faisait pas l'unanimité. Un média présentait même Marion Le Pen était "une “Kardashian du Front national avec un meilleur message”. D'autres conservateurs indignés par son invitation ont déclaré qu'elle était "une militante anti-commerce, anti-immigrée, anti-musulmane, antisémite, et anti-marché libre". Mais, bien que peu connue aux Etat Unis, elle a aussi des soutiens qui pensent que "Marion est une libérale classique, une conservatrice" et qu'on pouvait l'écouter pour la jauger, voire éventuellement la soutenir plus tard. En tout cas son discours a été très apprécié par les conservateurs de la CPAC, elle a même été ovationnée par l'auditoire à certains passages de son allocution.

Quelques petits extraits

 "Quand les peuples ont l'opportunité de reprendre leurs pays, ils la saisissent...Vous avez été l'étincelle, il nous appartient désormais de nourrir la flamme conservatrice... Je ne me sens pas offensée quand j'entends le président Donald Trump dire 'l'Amérique d'abord... La France n'est plus libre aujourd'hui. En réalité, je veux que l'Amérique passe d'abord pour les Américains, je veux que le Royaume-Uni passe d'abord pour les Britanniques et je veux que la France passe d'abord (France first) pour les Français...Après 40 ans d'immigration massive, (...) la France est en train de se métamorphoser de fille aînée de l'Eglise en petite nièce de l'islam et le terrorisme n'est que le sommet de l'iceberg".

En réalité, rien de nouveau sur le fond, mais une opération séduction de l'aile droite américaine qui a été une réussite. Marion Le Pen a fait du Le Pen en mieux.

Mais son grand retour en politique n'est pas pour tout de suite

En attendant le moment propice pour son retour, peut-être un autre échec de sa tante en 2022 pour prendre la tête du Parti qui aura changé de nom et n'aura plus de président d'honneur. Ou encore une demande en mariage de raison par Laurent Wauquiez. Voire d'autres scénarios possible, comme la création de son propre mouvement, puisqu'un retrait politique définitif semble inenvisageable. Marion Le Pen va participer à « la création d’une académie de sciences politiques ». Elle précisera que « L’école que j’accompagne est libre et indépendante. Il ne s’agit pas d’un projet partisan ». Mais, « En revanche, il est bien un projet politique. Nous souhaitons être le terreau dans lequel tous les courants de la droite pourront se retrouver et s’épanouir » qui devrait « davantage œuvrer en parallèle, sans négliger aucune strate de la société ». Avec l'idée de « détecter et former les dirigeants de demain », « ceux qui auront le courage, l’intelligence, le discernement et les compétences pour agir efficacement dans la société et au service de la société » et qui offrira des formations « du magistère à la formation continue, ainsi que des universités d’été ». Pour, n'en doutons pas, favoriser la suite de son ambitieux parcours politique, et peut-être un jour ringardiser un certain Wauquiez.

 


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