Mélenchon, le bas du Front de Gauche

par LM
samedi 16 octobre 2010

Ami de Bernard Tapie, ennemi de David Pujadas, Jean Luc Mélenchon a choisi la tactique de la gueule grande ouverte pour exister médiatiquement et donc politiquement. Au début c’est marrant, mais maintenant c’est plutôt gonflant. Fatigant.

Frédéric Taddei posait la question l’autre soir de savoir si Jean Luc Mélenchon était populiste. Non, répondit Cynthia Fleury, sociologue, qui estimait que Mélenchon sur certains points (surtout le rejet des intellectuels) ne correspondait pas à la définition communément admise du populiste. Pas Poujade, Mélenchon. Soit. Mais ce « bon point » là (même si l’intéressé, qui manifestement n’avait pas compris les propos de Fleury, répondit qu’il acceptait cette définition…) n’a pas suffi à nous rendre le bonhomme sympathique. D’autant plus que plus loin dans le débat, sans doute un peu euphorique, le bonhomme a lâché quelques perles, du style sur les 33 mineurs chiliens qu’ils étaient sortis vivants parce qu’ils étaient ouvriers, qu’ils étaient donc solidaires, alors que 33 traders dans la même situation n’auraient pensé qu’au cours de la bourse sur les actions de la mine. A ceci on pourrait rétorquer qu’on voit pas trop ce que 33 traders foutraient dans une mine, mais bon, c’est pas le plus grave. Le plus grave, le plus gonflant, c’est cette opposition bornée, systématique, Laguillierienne entre le monde ouvrier (que des qualités) et le monde des « importants » comme il les appelle (que des salauds). C’est gonflant, et surtout c’est stupide. Comme sa sortie contre maître Levy (« avocat talentueux et très cher » selon Mélenchon) exagérément virulente, alors que ce dernier lui faisait juste remarquer qu’il s’écoutait parler, qu’il « jouissait » quand il parlait. Autre point stupide, son « au dessus de 360000 euros je prends tout » que Taddei mit judicieusement en parallèle avec le « au dessus de 4 millions je prends tout » de feu George Marchais, autre bouffon rouge. Autre réplique stupide quand maître Levy encore lui fait remarquer que lorsque des gens comme lui arrivent au pouvoir, c’est là qu’il faut avoir peur, Mélenchon d’acquiescer en disant qu’effectivement, il pourra avoir les choquottes si il arrive au pouvoir. On en passera, et des appuis de Christophe Alévêque, comique pas drôle de chez Ruquier, qui pense avec ses pieds et n’a rien à dire d’intelligent.

Alévêque qui, dans un de ses accents de lucidité crétine, se fendit d’un grand cri d’amour à la fin du débat,en disant qu’au moins ce qu’il y avait de bien avec Mélenchon, c’est qu’on comprenait ce qu’il disait. Alors là, on touchait le fond du débat. C’est quoi cet argument de café qui ferme ? Sous prétexte qu’un homme politique parle de manière intelligible (ce qui d’ailleurs est le cas de 90% des hommes politiques, Sarkozy en tête) alors ça suffit pour le rendre crédible, sinon éligible, qui plus est à certaines hautes fonctions ? Et puis, en quoi ça l’autoriserait à dire tout et n’importe quoi ? Parce que le problème de Mélenchon, c’est qu’il dit tout, et surtout n’importe quoi. Il se dissimule derrière un soi disant « parler vrai » pour déblatérer des fadaises. Sa rengaine FO/NPA les bons ouvriers contre les méchants capitalistes est datée et usée. Sa récente montée d’urticaire contre les médias, paix à David Pujadas, nul certes mais qui n’en demandait pas tant, est une stratégie de bas étage pour exister médiatiquement. Comment faire autrement pour quelqu’un qui n’a ni programme ni idées. Parce que « qu’ils s’en aillent tous » c’est pas un programme, c’est une ligne démago de fin de banquet qui n’impressionne que les lycéens ou les candidats de master chef. Mélenchon est contre tout ce qui se passe aujourd’hui, contre la crise, contre les banques, contre les yachts, conte le Fouquet’s, contre les licenciements, contre la réforme de la retraite, contre DSK, il fait du Bayrou rouge, aussi rouge que des boues hongroises, mais beaucoup moins corrosif. Certes, il a gagné ses galons de « bon client », l’équivalent du schpountz, une sorte de brave couillon, pour les médias, certes ses coups de grande gueule font twitter et bloguer, mais ça s’arrête là, c’est tellement vide, et creux. Et facile, surtout, tellement facile (comme pour Arlette, d’ailleurs) de la part de quelqu’un qui n’a pas la moindre chance de se faire élire Président de la République. Au mieux, il fera perdre la gauche. Mais ne faisons pas croire à quelques gogos à la dérive que cet homme représente quoi que ce soit de neuf, de moderne dans la politique actuel. C’est tout le contraire : toutes ces gesticulations ne respirent que le rance et le moisi. Rien d’autre. Et si l’homme peut se montrer parfois touchant dans ses emportements dérisoires, il devient insupportable quand il se refuse à mettre au ban la Chine d’aujourd’hui, comme ses petits copains de l’huma avaient beaucoup tardé à ranger leur faucille et leur marteau. Populiste, peut-être pas, mais aussi manichéen et binaire que tout extrême qui se respecte.

L’humour peut excuser beaucoup. Le problème, c’est que Mélenchon a l’air de se prendre au sérieux ces derniers temps, et là il n’est plus drôle du tout. Pathétique, plutôt, inutile et vain. Même le Front de Gauche doit mériter mieux.


Lire l'article complet, et les commentaires