MoDem : de la CNAC au CCC, retour vers le futur

par Dr No
lundi 30 juin 2008

Il y a quelques semaines M. Philippe Arnaud, alors président de la Commission nationale d’arbitrage et de contrôle (CNAC), s’était illustré en adressant un certain nombre de lettres d’exclusion à des adhérents MoDem pour de multiples raisons en période électorale.

Sans contester le bien-fondé de ces lettres, qui pouvaient être justifiées en raison de la situation électorale difficile voire chaotique du MoDem[1] un peu partout dans les régions, j’avais été sidéré par l’amateurisme de M. Arnaud, qui bien qu’étant sénateur (Poitou-Charentes), donc au fait des questions de procédure, avait accepté d’apposer sa signature au bas d’une décision fort contestable en droit, du moins sur la forme.

En effet, la CNAC, vestige de l’ancienne UDF, n’avait pour le MoDem aucune légitimité, pas plus qu’elle n’avait reçu de mandat des instances du MoDem nouvellement mises en place depuis la fondation du MoDem en décembre 2007.

Et quand bien même, les militants n’en ont pas été informés (ni officiellement ni même officieusement), de sorte que ces décisions (au cas où elle aurait été reconduite) auraient pu implicitement s’imposer à tous, tout naturellement.

La justice n’a donc eu aucune peine à en démonter le principe et les fondements et à renvoyer M. Arnaud et tous les membres de la CNAC à leurs études. A juste titre puisque, seul le Comité de conciliation et de contrôle du Mouvement démocrate (non encore mis en place ou éventuellement le Bureau exécutif) était habilité à prendre de telles décisions. Ces balbutiements sont bien entendu regrettables de même que l’est le fait que des militants soient réduits à recourir aux tribunaux pour trancher un litige interne.

Compte tenu de ces balbutiements, la reconduction de M. Arnaud à la tête du CCC a interpellé plus d’un, la jugeant hasardeuse voire inconséquente, compte tenu de ces décisions aussi facilement contestables. On peut comprendre que François Bayrou veuille s’entourer de ses amis les plus fidèles. On peut même comprendre, vu les multiples trahisons, lâchetés et autres vicissitudes, que ce soit une exigence. Cependant, on ne peut accepter que la désignation de M. Philippe Arnaud à la tête du CCC puisse uniquement résulter de cette seule exigence.

Cette exigence ne peut, compte tenu de la construction de notre mouvement, des enjeux actuels et futurs, se satisfaire de cet amateurisme.

Les objectifs que nous nous sommes collectivement fixé, à savoir porter l’un des nôtres, en l’occurrence François Bayrou, à la tête de l’Etat pour porter les idées que nous portons collectivement, nécessitent des procédures irréprochables et une conduite exemplaire, dénuées de tout amateurisme.

Pour preuve de cet amateurisme, la première décision prise par cette instance et validée par M. Arnaud, met en avant l’absence de signatures « physiques » pour parrainer un texte d’orientation interne, juste pour qu’il soit soumis à l’appréciation des adhérents !

Le principe est difficilement défendable devant les adhérents, il le sera tout autant en droit devant les tribunaux.

M. Philippe Arnaud et le CCC ont juste oublié que ce texte pouvait être soumis par voix électronique - ce qu’Eric Julliard a fait et ne lui a pas été reproché -, de même que la consultation elle-même aurait lieu par correspondance !

L’incongruité de cette décision n’échappera très certainement pas aux tribunaux, si d’aventure Eric Julliard, qui ne semble pas écarter cette éventualité, les saisissait.

La décision du Comité de conciliation et de contrôle, aussi légitime soit-il, sera tout aussi facilement contestée que l’ont été les précédentes décisions de la CNAC.

Bien entendu, on ne se pose même plus à ce stade la question de savoir si la contribution de François Bayrou, soutenue par « 5 membres du Bureau exécutif »[2], l’a été avec des signatures en bonne et due forme ou si François Bayrou n’y a pas été pour quelque chose dans la décision de la CNAC[3] à l’encontre du texte d’Eric Julliard qui ne comporte aucune attaque personnelle envers Bayrou pas plus qu’il ne remet en cause les idées qu’il défend.

Le seul fait que l’on rejette la motion d’un adhérent est en soit porteuse de multiples interrogations avec un signal politiquement très négatif envoyé aussi bien en interne qu’à l’extérieur.

Bayrou avait même tout intérêt à ce qu’il y ait d’autres motions que la sienne, lui qui reprochait qu’il n’y en ait pas eu pour une précédente consultation de cette importance (Congrès de Lyon, janvier 2006) :

- Faire campagne pour un soutien massif pour son propre texte - que j’ai eu la possibilité de lire à titre informel -, en expliquant qu’il faudrait, pour plus de cohérence dans notre mouvement, qu’il recueille un maximum de signatures. Il n’aurait pas eu grand peine à en recueillir un maximum, dont la mienne et très certainement de multiples autres que j’aurais personnellement sollicitées en faisant campagne comme je l’ai fait durant la présidentielle, avec ardeur et enthousiasme.

- Ou mieux, expliquer aux médias que la consultation qu’il a initiée pour marquer son désir d’indépendance par rapport aux autres grands partis est également portée par de simples militants avec le même enthousiasme et la même ardeur que lui.

Quelle belle victoire idéologique et politique sur le clan des Cornillet et Consœurs, qui n’avaient de cesse que de nous inféoder à l’UMP, pour mieux nous contraindre.

Non, Bayrou a choisi une toute autre voie, improbable, hasardeuse, d’une incompréhensible inconséquence, qui nous questionne plus aujourd’hui sur notre capacité à gouverner la France demain, que sur notre capacité à construire un mouvement cohérent.

Quoi qu’il en soit, merci M. Arnaud, elles nous renseignent sur nos limites et nous sont d’une particulière utilité, pour démontrer à ceux qui ne souhaitent pas entendre la vérité, que le chemin qui nous attend n’est pas aussi si simple qu’on voudrait bien nous le faire croire : gouverner est déjà difficile en soit, le faire avec justesse (justice !) et en respectant une certaine éthique, l’est encore davantage.

Le Comité de conciliation et de contrôle n’est certes pas le Conseil constitutionnel, mais les règles que nous nous appliquons en son sein, et leurs inconséquences, donnent une excellente idée de l’inconsistance que l’on ne manquera sans nul doute pas de nous reprocher si d’aventure nous prétendions, pour aider notre pays à se sortir de la crise, vouloir mettre au sommet de l’Etat un des nôtres, issu de ce même système.

Que pourrions-nous leur répondre ?

Notes

[1] La situation chaotique dans les fédérations a été exacerbée voire même engendrée par le positionnement non moins chaotique de nos instances à la veille et pendant les élections.

[2] On notera que M. Bayrou n’a pas du tout sollicité les membres du Conseil national pour soutenir sa motion pas plus qu’il na sollicité d’adhérents de base.

[3] Eric Julliard qui a rencontré Bayrou la veille de cette décision m’a fait part d’une information anodine, mais tout de même inédite sur laquelle il n’a pas malheureusement pas souhaité communiquer à savoir que Bayrou lui a signalé que son texte risquait d’être rejeté par le CCC en raison justement d’un "problème de signature" avant même la réunion de ce comité ?!!!


Lire l'article complet, et les commentaires