Ne pas être Charlie ad vitam aeternam

par Alexandre Vine
lundi 16 novembre 2015

Stopper l'affect, penser l'action.

J’ai attendu qu’une journée passe pour glaner quelques informations certaines et ainsi me livrer également à mon petit commentaire sur l’actualité. J’avoue être perplexe face au déluge de bons sentiments qui inonde les réseaux sociaux depuis 24h, à tel point que je me demande si je vis sur le même plan astral que beaucoup des miens.

Il y a tout d’abord ces belles phrases autour de la France « forte », « jamais soumise » et « debout ». Forte, jamais soumise et debout... quand 8 bolosses, dont certains âgés entre 15 et 18 ans, ont tué 129 personnes dans les rues d’une capitale ? Je vois revivre ce moment post-Charlie, tous à plastronner, faire gonfler les biscottos alors que la bataille avait été perdue. Non, la France n’a pas été forte, insoumise et debout, elle a été tout le contraire et c’est pour ça que ce drame a eu lieu. 

Nous savons depuis longtemps que la bataille contre Daesh s’effectue sur deux théâtres : extérieur et intérieur. Tous ceux qui appellent à l’éradication de ce « pays » en voie de construction ne font que la moitié du chemin car le combat est aussi à livrer ici, dans nos rue. Hélas, ce n’est pas une bataille à engager en changeant sa photo de profil ou en jouant « Imagine » devant le Bataclan. C’est un combat qui demande un arsenal judiciaire exceptionnel, bien loin de l’attentisme qui préside aujourd’hui. Les chiffres varient, mais on estime à 11 000 le nombre de personnes concernées par ces fameuses « fiche S ». Merah était fiché S... Coulibaly aussi... Nemmouche aussi... et puis Ismaël également, lequel, d’ailleurs, avait fait un petit tour en Syrie avant de revenir très tranquillement (ça va c’est pas parce qu’un mec en voie de radicalisation va en Syrie que tout de suite !)... Alors que fait-on, sachant que nos services de renseignement sont dans l’incapacité de les pister tous efficacement ? Et bien il faudra considérer que notre pays fasse quelques entorses exceptionnelles, provisoirement, à ses grands principes « humanistes », ou bien il devra se résoudre à revivre ces moments-là. Valls semble vouloir prendre des initiatives radicales qu’il y a à peine une semaine tout le monde aurait trouvées « fascisantes », à commencer par lui. C’est bien, mais c’est trop tard, en tous cas pour cette fois-là.

Il y a une forte dissonance cognitive dans les réactions. Beaucoup pensent que cet événement vient de nulle part, était inévitable, et ne font surtout pas le lien entre l’angélisme dont ils sont coutumiers au quotidien et ce qu’il vient de se passer. Ils y voient une rupture alors qu’il s’agit d’une conséquence. Ceux qui alertaient sur le risque de compter, parmi les réfugiés, des terroristes planqués, n’avaient forcément pas de coeur, ou plongeaient dans le fameux « repli sur soi ». Mais aujourd’hui que ce fait avéré, et bien sachez qu’il s’agit désormais, non pas de s’interroger sur cette nouvelle donne, mais bien de ne pas stigmatiser tous les réfugiés ! On n'en sortira donc jamais... 

Il y a ensuite ces envolées sur le risque de stigmatisation, cette attitude un brin paternaliste qui consiste à prétendre que non compatriotes musulmans ont besoin d’être sans cesse accompagnés par la main dans le champ républicain. Mais nos compatriotes musulmans n’attendent pas qu’on les flatte ou qu’on les couve. Ils veulent - j’ai l’impression bien plus que les autres composantes du peuple français - que le mal soit nommé, identifié et abattu. La meilleure réponse à trouver pour l’unité réside dans la mise à terre simple de cette minorité belliqueuse, qui n’aime pas la France bien qu’elle s’y trouve. Ils ne sont pas dans le zèle pacifiste, à prétendre que l’islamisme n’a rien à voir avec l’Islam. Bien sûr que l’islamisme a tout à voir avec l’Islam ! Si je vous disais que l’Inquisition n’avait rien à voir avec le christianisme, que me répondriez-vous ? L’islamisme a tout à voir avec l’Islam, même à considérer qu’il en est la négation. D’ailleurs, l’actualité internationale nous montre bien que les pays musulmans sont également touchés par ce venin (exemple du Liban il y a quelques jours). 

Ne vous trompez pas de cible. Si je ne parle pas de la tolérance et de vivre-ensemble, c’est bien parce que l’heure n’est pas à l’incantation ; il ne s’agit pas de communier autour d’un totem pour que la pluie s’arrête. Soyons forts, insoumis et debout... chaque jour, et dès maintenant. 


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