Ne plus chanter la Marseillaise et déplacer la date de la fête Nationale

par Daniel MARTIN
lundi 19 mai 2014

Après que Madame TAUBIRA n’ait pas repris la Marseillaise en choeur, lors des cérémonies de commémoration de l'abolition de l'esclavage présidées par le Premier Ministre et que cela ait provoqué une levée de boucliers d’une partie de la droite et du FN, certains appelant même à sa démission, voilà que le comédien Lambert WILSON déclare : « Je suis extrêmement énervé que personne ne dise qu’il est temps de changer les paroles de la Marseillaise qui sont d’un autre temps. Quand j’entends 'Qu’un sang impur abreuve nos sillons', je suis sidéré qu’on continue à chanter ça. Elles sont épouvantables les paroles de la Marseillaise, elles sont sanguinaires, elles sont d’un autre temps, elles sont racistes, elles sont xénophobes. La musique est fantastique et je pense qu’il y a pas mal de paroles qui passent et certaines qui sont inécoutables. » En réclamant le changement des paroles de cette chanson il rejoint ainsi d’autres personnalités telles que Théodore MONOD qui la taxait également de « violente, raciste et xénophobes « .

Il ne s’agit pas de changer les paroles, mais la Marseillaise en tant qu’hymne National.

La Marseillaise est et reste d’abord un chant guerrier. A l'origine chant de guerre révolutionnaire et hymne à la liberté, la Marseillaise s'est imposée progressivement comme un hymne national. En 1792, à la suite de la déclaration de guerre par la jeune monarchie constitutionnelle Française à l’Europe dynastique du Roi d'Autriche, un officier français en poste à Strasbourg, Rouget de LISLE compose, dans la nuit du 25 au 26 avril, chez le Baron Dietrich, le maire de la ville, le "Chant de guerre pour l'armée du Rhin". Ce chant est repris par les fédérés de Marseille participant à l'insurrection des Tuileries le 10 août 1792. Son succès est tel qu'il est déclaré chant national le 14 juillet 1795. Interdite sous l'Empire et la Restauration, la Marseillaise est remise à l'honneur lors de la Révolution de 1830 et Berlioz en élabore une orchestration qu'il dédie à Rouget de LISLE.

La III ème République (1879) en fait un hymne national et en 1887 une "version officielle" est adoptée par le ministère de la guerre, après avis d'une commission. En septembre 1944, une circulaire du ministère de l'Education nationale préconise de faire chanter la Marseillaise dans les écoles pour "célébrer notre libération et nos martyrs". Le caractère d'hymne national est à nouveau affirmé dans les constitutions de 1946 et de 1958 (article 2). Elle accompagne aujourd'hui la plupart des manifestations officielles et sportives, au point de devenir parfois un véritable « karakoé d’estrade », selon formule de la Ministre Christiane TAUBIRA.

Créer un nouvel Hymne National

Et si on remplaçait la Marseillaise par une chanson non politique avec des paroles non violentes ? Un chant qui serait symbolique des drames de notre temps que l'on perçoit que trop confusément, tout en signifiant le coté éphémère d’une vie d’Homo sapiens et les désastres qu’elle peut engendrer …Un hymne qui soit le meilleur lien National entre les tragédies de l’histoire et qui dénonce celles à venir qui risquent d’être bien pires encore, sans y omettre toutefois une note d’espoir… Avec un dérèglement climatique qui s'amuse à perturber tous nos repères, nous sommes acteurs et victimes d'une catastrophe à venir, provoquée par notre folie dévastatrice liée au nombre d’Homo sapiens qui ne cesse d’augmenter (2000 à 2012, plus d’un milliards) et à son appétit gargantuesque qui assassine la Planète, alors que l’espace vital ne cesse de régresser (100 000 km2 environ par an de terres arables détruites). Le grand cataclysme planétaire qui se profile à l’horizon ne devrait cependant pas nous prendre au dépourvu, car, grâce au travail des scientifiques et des experts, nous savons, mais on fait tout pour feindre de ne pas croire, de ne pas penser que la catastrophe serait inévitable.

Un hymne National à créer qui serait une symbolique de cette situation à l’image, par exemple, de la chanson ‘’le temps des cerises’’. Cette chanson de Jean Baptiste Clément, écrite en 1866 alors qu’il ignorait tout du drame qui aurait lieu quatre années plus tard avec la guerre de 1870, laquelle précédait la commune de Paris de 1871 et son effroyable massacre. Bien que ce ne soit pas une chanson politique, elle est devenue pourtant le symbole d'une nostalgie d'espoir déçus.

Les cerises, ces merveilleux fruits succulents qui ont une vie éphémère et qui sont en passe de disparaître illustrent parfaitement les situations auxquelles nous devront faire face, avec en perspectives dans le ciel ni rossignol ni merle ni autres oiseaux… Dérèglements climatiques, pesticides, insecticides, croisements divers, quand ce n’est pas le recours aux OGM pour rechercher un goût standard avec un maximum de rentabilité, ou pire quand les vergers ne sont pas purement et simplement rasés, car la main-d'œuvre est trop coûteuse, les arboriculteurs leur préférant des fruits appréciés par les marchés financiers, dont le ramassage est de surcroît mécanique.

Changer l’hymne National certes, mais aussi déplacer la fête Nationale

Théodore Monod qui réclamait la suppression du 14 Juillet pour transférer cette date de célébration soit au 4 août (jour de l’abolition des privilèges), soit au 26 août, avec une préférence pour cette date, il proposait également de remplacer la Marseillaise, chant qu’il jugeait violent et raciste par un nouvel hymne national. La fête nationale du 14 juillet qui est devenue de facto une fête à la gloire de l’armée est le symbole d’une France guerrière au service de l’oligarchie financière et pétrolière mondiale.

Ce n’est pas faire abstraction de l’histoire, ou porter atteinte à une symbolique que de vouloir, deux siècles plus loin, recadrer la "fête nationale" qui, outre le fait qu’elle est devenue une fête à la gloire exclusive de l’armée pose problème par rapport au choix de la date… Désormais, si l’on tient compte des nouvelles données historiques en Europe, il faut supprimer la date du 14 juillet et la transférer au 26 Août qui est le jour de 1789 où fut proclamée la déclaration des Droits de l’Homme et du citoyen.

À noter que, contrairement à l’imagerie populaire, le 14 Juillet ne célèbre pas la prise de la Bastille, bien que cette date prête à ambiguïté… Soucieux de redorer le blason de l'armée après sa défaite de 1870 à Sedan, lorsque le 21 mai 1880, le député Benjamin RASPAIL dépose la loi faisant du 14 juillet la fête nationale annuelle, c’est en commémoration du 14 juillet 1790, (fête de la Fédération). Le 14 juillet 1789 (prise de la Bastille) ayant été une journée jugée sanglante, c’est la Fête de la fédération qui emporta les suffrages. C'est finalement le 14 juillet 1790 seul qui est commémoré, et fera une large place à l'armée. La loi, signée par 64 députés, est adoptée par l'Assemblée le 8 juin et par le Sénat le 29 juin. Elle est promulguée le 6 juillet 1880. Au cours de cette période le débat préalable portant sur le choix de la date de célébration de la fête nationale avait également porté sur les dates du 4 août ou du 26 août…

Transférer la fête nationale du 14 Juillet au 26 Août, journée chômée et festive, mais sans défilé militaire, n’interdirait nullement à l’armée le 14 Juillet d’en faire une fête commémorative avec portes ouvertes (journée toutefois non chômée).

Face à des esprits chagrins qui considèreront la proposition de supprimer le 14 juillet comme fête nationale avec son défilé militaire est scandaleusement déplacée au moment où les sociétés européennes sont traversées par de profondes crises culturelles et économiques, notamment financières, j'indiquerai que, sauf à faire diversion pour détourner l'attention du ''bon peuple'' pendant quelques instants par des parades à bruits de bottes, les prestations d'un défilé militaires ne contribueront pas à résoudre les problèmes écologiques et les problèmes économiques et sociétaux qui en découlent…

Changer d’hymne national passe par une modification de la constitution

Changer l’hymne National implique une modification de l’article 2 la constitution. Cette modification peut se faire : soit par une convocation de l’assemblée Nationale et du Sénat siégeant en congres avec majorité des 3 cinquièmes, soit par référendum. Vu l’état d’esprit de la classe politique, mais aussi d’une majorité de nos concitoyens la proposition de Lambert WILSON ou celles figurant dans ce texte risquent fort de n’être considérée que comme une provocation de plus sans lendemain…Dommage !...


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