Nicolas, fils de pub

par JM
mardi 29 juillet 2008

Comment peut-on engager autant de réformes aux conséquences dramatiques, et pourtant susciter aussi peu de réactions, en particulier du peuple, des citoyens, les premiers touchés ?

Nicolas Sarkozy est-il le nouveau David Copperfield de la manipulation ? Non, mais plutôt le Jacques Séguéla de la désinformation.

On peut très certainement évoquer la complaisance des médias qui tels des agences de publicité, édulcorent, tronquent, voire modifient les faits. D’autres pourraient évoquer l’apathie, la paresse des partis politiques de l’opposition, le Parti socialiste en tête, d’autres à nouveau les fines stratégies de notre gouvernement en faisant passer les lois en catimini. Autant de raisons toutes valables, suscitant encore autant de débats.

En ce qui me concerne, j’ai tenté de me mettre à la place du Français lambda. Celui qui a encore la chance de trimer huit heures par jour, celui qui passe encore une heure dans la circulation pour se rendre au boulot pour payer son emprunt immobilier et nourrir sa famille, et qui ne peut consacrer à l’information, que notre cher journal du 20 heures, entre la préparation du dîner et le café, car ayant encore d’autres chats à fouetter.

Le gouvernement se doit donc d’être court, accrocheur et ludique. Tel un organe de propagande du gouvernement, par le biais des chaînes privées plus que complaisantes et des organes de presse de qualité comme Paris-Match, Voici, Gala ou L’Express, le président, et/ou le gouvernement (où donc est la différence ?) se doit de cibler et de gagner l’esprit des Français à sa cause. Donc rien de tel qu’un bon slogan publicitaire, court et percutant. Le but n’étant pas de dire la vérité, mais de gagner la sympathie et l’accord.

Ainsi, ces slogans sont souvent :

- racoleurs : « Travailler plus pour gagner plus » ;

- minimisent la portée de l’action : « Réforme des institutions » ;

- sont d’une arrogance politique : « Loi pour la rénovation de la démocratie et la réforme du temps de travail » ;

- ou encore, des plagiats, comme Fillon qui après la déculottée des élections municipales disait des réformes, qu’il fallait encore aller « plus loin, plus haut, plus fort » (Oh, vivent les JO en Chine, vivent les droits de l’homme, vive Coca-Cola)

On dirait que le gouvernement est devenu à lui tout seul et une boîte de pub, et le président son PDG, tel un maître de la propagande et de la désinformation (avec Henri Guaino comme mentor).

Reprenons l’exemple de la « Réforme des institutions ». Pour avoir vérifié avec mon entourage, cette réforme, au stade de projet, n’avait pas déclenché la moindre réaction. « Quelles institutions au fait ? », « Finalement, qu’est-ce qui changera ? », « Institutions ? Cela ne doit concerner que nos hommes politiques ». Evidemment, les médias « mainstream » se sont bien gardés d’en faire une explication de texte objective.

Dans les faits (entre autres, le président pourra convoquer le Parlement en Congrès à Versailles et y imposer son ordre du jour sans le moindre débat, et nominer comme bon lui semble des magistrats et personnalités extérieures au Conseil supérieur), il ne s’agit, ni plus ni moins, que d’une refonte importante de notre Constitution, d’amendements majeurs visant à augmenter le pouvoir présidentiel et permettre au pouvoir exécutif d’interférer encore davantage dans le législatif et le judiciaire. (A savoir, et cela n’engage que moi, que cette réforme est en totale contradiction avec l’article 16 de notre Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, Cf. l’excellent article suivant : http://www.agoravox.fr/article.php3?id_article=42445). A mon sens, nous venons de glisser dans une VIe Constitution, sans que même les Français n’aient pu se prononcer, et ne réalisent la portée de cette réforme.

Après avoir éclairé mon entourage de ces derniers éléments, les réactions sont devenues plus fortes. « Comment ça, mais c’est pas du tout ce qui nous a été dit », « On ne nous a même pas demandé notre avis, par voie de référendum ». Et pour cause, le président ne souhaitait certainement plus recevoir un camouflet tel le dernier référendum sur la Constitution européenne.

Eh oui, beaucoup se sont contentés de ce que le journal du 20 heures leur proposait, c’est-à-dire un pauvre slogan menteur. Très peu sont allés au fond des choses.

Et cela, notre président l’a bien compris. Pour gouverner en France, il faut :

- bien connaître et maîtriser les attentes et les inquiétudes des Français ;

- feindre d’y répondre et désinformer. Les Français ne remettent rien en cause ;

- donner l’illusion d’un travail acharné en monopolisant la présence dans les médias ;

- toujours nier la réalité, les problèmes économiques et sociaux, et affirmer l’inverse. A force, cela passera toujours ;

- diviser les Français, et les monter les uns contre les autres. Les immigrés vs les Français, les fonctionnaires vs les salariés du privé, les enseignements vs les parents, les chômeurs vs les salariés. Les riches vs les pauvres, etc., bref « Diviser plus, pour régner plus ».

Afin d’enrayer cette dérive démagogique publicitaire et mensongère de notre gouvernement, les Français doivent prendre conscience qu’un gouvernement, qui gèrent ses affaires comme on vend des paquets de lessive, n’a pas sa place dans notre pays. Il ne faut plus prendre pour argent comptant la soupe que l’on nous sert et aller au fond des choses avant d’accepter aveuglément des réformes qui pourraient s’avérer terribles en conséquences pour notre vie en société. Il faut demander des comptes à nos hommes politiques. Tout le monde sait que, dans une entreprise, on se fait bien virer si l’on n’atteint pas les résultats ; nos hommes politiques, tout comme nous, devraient être soumis au même régime, et à la vue de leurs résultats, il ne devrait plus en rester un seul.

Le quatrième pouvoir, les médias, a bel et bien pris sa place dans nos vies, et pas à notre avantage. Celui-ci est venu s’ajouter aux trois autres que notre président contrôle déjà.

Lorsqu’on boycotte une lessive, aussi géniale que la publicité puisse être, le fabricant de lessive doit bien en tenir compte, au risque de ne plus rien vendre et de fermer boutique.

Ainsi, boycottons à notre tour !

Crédit photo : Eric Fougere/VIP Images/Corbis/Eric Fougere


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