Nicolas Hulot, ministre de la dernière chance

par Henry Moreigne
mercredi 12 juillet 2017

Nous y voilà. A minuit moins le quart de la fin de l’humanité, la France d’Emmanuel Macron a fait de Nicolas Hulot son ministre de la Transition écologique. Nicolas Hulot, c’est du Gramsci version XXIème siècle : le pessimisme de l’intelligence allié à l’optimisme de la volonté. Il faut croire que la situation est suffisamment grave pour que l’on se résigne à faire appel à une personnalité aussi iconoclaste. Suffisamment désespérée pour que l’intéressé finisse par accepter un poste de ministre.

Etrange espèce que l’Homo sapiens. Une capacité d’adaptation remarquable, certes, mais qui n’a d’égal que sa faculté à refuser de voir la vérité en face. Les autruches ne mettent pas la tête dans le sable par crainte du danger. Elles le font en période de couvaison pour surveiller leurs oeufs. Quand elles ont peur elles fuient en courant avec des vitesses de pointe à 90 km/h. A défaut de pouvoir faire de même, les Hommes préfèrent se réfugier dans le déni de réalité. Mais cela n’a qu’un temps et, au pied du mur il finissent toujours par réagir.

Nous en sommes sans doute là. Cela fait un moment que la maison brûle et nous commençons à ne plus regarder ailleurs. La planète est malade écartelée entre un dérèglement climatique avéré et une extinction massive des espèces dont nous commençons enfin à prendre conscience de la gravité.

Le niveau d’élévation des températures est acquis mais incertain : entre +2 et + 4°C. Certains y verront un bon côté. D’autres se souviendront que +4°C, c’est l’écart entre la période glaciaire et l’époque actuelle. On mesure donc l’ampleur des bouleversements potentiels. Parallèlement, une nouvelle étude scientifique publiée lundi 10 juillet par les Proceedings of the National Academy of Sciences (PNAS), confirme l’effondrement de la biodiversité faune et flore. Dans ce chaos, il n’y a bien que l’espèce humaine, dont l’accroissement exponentiel interpelle, pour penser qu’il peut passer à travers les gouttes du grand chamboulement qui a commencé. Pour la première fois officiellement des scientifiques n’hésitent plus pourtant à évoquer des menaces pour l’Humanité.

Dans ce paysage sombre, Nicolas Hulot a le courage de reprendre le constat des scientifiques auquel il donne, et c’est toute sa valeur ajoutée, une feuille de route, un itinéraire bis, qui ouvre des perspectives positives. C’est tout l’enjeu de sa « Transition écologique » : une évolution en douceur et maîtrisée plutôt que des changements brutaux et subis.

Personnalité populaire grâce à la télévision et à la fondation qui jusqu’alors portait son nom, le nouveau ministre fait pourtant l’objet d’une campagne de dénigrement, notamment sur les réseaux sociaux. On lui reproche essentiellement un manque d’exemplarité entre les thèses qu’il développe et son mode de vie, celui d’un homme de télévision dispendieux en émissions de gaz à effet de serre. Plus sournois, Nicolas Hulot est accusé de s’être constitué un patrimoine conséquent grâce à son petit business autour de l’écologie. C’est vrai, Nicolas Hulot est un homme qui à 62 ans a réussi. C’est sans doute d’ailleurs l’un des critères qui ont conduit Emmanuel Macron à en faire un ministre central du gouvernement. Faut-il pour autant jeter le bébé avec l’eau du bain ? Sans doute pas. Homme sincère et de conviction, Nicolas Hulot est entré en politique non pour faire carrière mais pour essayer de peser sur le cours des choses.

Peu importe les petits défauts personnels que peut avoir un médecin s’il est compétent et efficace dans son exercice professionnel. Il ne s’agit pas comme les Byzantins en 1453 de se quereller sur le sexe des anges alors que les armées turques, à l’issue d’un siège, s’apprêtent à prendre la cité. Tout l’enjeu consiste bien à mettre en oeuvre et à réussir une transition, une révolution de velours qui a pour objectif de nous mener vers un monde apaisé et meilleur. Cela vaut peut-être le coup de donner à Nicolas Hulot sa chance et même de l’épauler dans ses travaux d’Hercule ?


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