(Nouvelle) Faute déontologique flagrante sur France 2

par Olivier Bonnet
mardi 19 juin 2007

Nous regardons à l’instant le 20 heures de France 2 et tombons sur cette faute déontologique majeure : durant le sujet consacré à la défaite d’Alain Juppé en Gironde, ce qui s’appelle dans le jargon professionnel un micro-trottoir (l’interview de personnes interrogées dans la rue) donne la parole à deux anonymes bordelais. Un partisan de Juppé et un autre de la socialiste Michèle Delaunay ? C’est évidemment la règle. Eh bien non : la première personne précise qu’elle a voté pour Juppé tandis que la deuxième espère qu’il poursuivra sa carrière politique, ajoutant : "On le soutiendra". Ce choix peut sembler anodin mais, pour tout journaliste, il est inacceptable : si, par hasard, le confrère porteur du micro ne tombe que sur des partisans de l’une ou de l’autre, il poursuit jusqu’à présenter des avis équilibrés. Or là, on ne donne la parole qu’à deux supporters de l’ex-ministre d’Etat. En violation flagrante de toute neutralité de l’information, alors même que, sa victoire l’atteste, la socialiste compte davantage d’électeurs ! Après le sujet déjà consacré, avant le deuxième tour, à la législative girondine, où le nom d’Alain Juppé avait été cité cinq fois sans qu’on n’entende à aucun moment celui de sa rivale - ce qu’avait justement reproché à David Pujadas Ségolène Royal -, France 2 verse une deuxième fois dans la "Juppémanie". Rappelons à tous ceux qui paient la redevance que cette chaîne appartient au service public. Et qu’il s’agit de la même qui a vu sa directrice de l’information, Arlette Chabot, offrir trois heures de direct à Nicolas Sarkozy la veille du décompte du temps de parole par le CSA pour la campagne présidentielle ! Une Arlette Chabot qu’on a vu également à l’antenne faire la bise à Jean-François Copé, qui traite les militants de gauche de cloportes. Toujours la même Arlette Chabot qui n’a pipé mot lorsque, alors qu’elle interviewait Nicolas Sarkozy, le futur président a pour la première fois parlé de "ministère de l’immigration et de l’identité nationale". Toute la gauche - et, au-delà, tous les antiracistes - s’est-elle alors indignée ? Tous les journaux ont-ils, le lendemain, fait leurs gros titres sur cette annonce ? Le rapporteur spécial de l’ONnu contre le racisme et la xénophobie, Doudou Diène, a-t-il récemment estimé (voir le billet du camarade Fontenelle) que cette initiative constituait l’expression de la "banalisation du racisme", dénonçant "la lecture ethnique et raciale des questions poitiques, économiques et sociales et le traitement idéologique et politique de l’immigration comme un enjeu sécuritaire et comme une menace à l’identité nationale" ? Exact, mais alors même que le siphonneur des voix du Front national lâchait cette bombe, il n’a pas fallu compter sur la Chabot pour poser la moindre question, pourtant évidente, ne serait-ce que sur un plan journalistique : l’immigration devait-elle être considérée comme menaçant forcément l’identité nationale, et comment la création d’un ministère pouvait-elle censément lutter contre ledit supposé péril ? Personne n’a, à notre connaissance, souligné ô combien Chabot avait gravement failli ce jour-là à sa mission. Alors pourquoi, chez France 2, est-on si complaisant envers le pouvoir ? Quelle que soit la réponse, cette attitude est proprement scandaleuse. Déjà que TF1 est officiellement sarkozifiée par le parachutage au poste de numéro 2 de la chaîne de l’ancien directeur de cabinet du champion de l’UMP, qui n’a pourtant jamais travaillé dans l’audiovisuel... Ça commence vraiment à bien faire !


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