Nucléaire, un gouffre financier
par Matlemat
mardi 10 avril 2018
La France est le pays le plus nucléarisé du monde, son économie est devenue très dépendante envers cette énergie. On nous vante souvent les mérites de cette énergie à faible émission de carbone, je voudrais ici m'attaquer simplement à l'aspect économique en mettant de côté les risques et la pollution de cette industrie.
Nous avons en France de l'électricité assez bon marché, dans la moyenne européenne, 0.1589 euros par KWh en 2013, la Serbie était à 0.0608 et le Danemark 0.2963. Le prix de l'électricité est un argument de poids pour faire accepter les risques liés au nucléaire à la population, mais beaucoup ignorent que ce prix est artificiellement bas et que beaucoup d'argent a été emprunté.
EDF a une dette qui s'élève à 33 milliards d'euros en 2018, soit on attend un miracle qui fera diminuer les coûts de production, soit l'état devra mettre de l'argent frais et ce sera une forme de subvention, soit il faudra augmenter les tarifs. On subventionne les énergies renouvelables d'un côté et on vend à un prix non rentable l'électricité nucléaire, le prix bas rend le renouvelable moins rentable et EDF ne peut remplir ses caisses.
Les centrales nucléaires doivent être démontées à la fin de leur service, faire en sorte que les sites redeviennent comme avant est impossible mais on doit au moins démonter les éléments radioactifs c'est à dire tout ce qui a été en contact avec les combustibles et les fluides radioactifs. De l'argent à été provisionné en prévision de ce démantèlement, 25.7 milliards d'euros en 2016, comme nous avons vu précédemment, la dette d'EDF s'élève aujourd'hui à 33 milliards, on a donc emprunté pour faire cette provision dans un tour de passe passe comptable et on compte sur les nouveaux réacteurs pour faire payer les futurs consommateurs.
Quand on voit le fiasco de l'EPR, celui en Finlande a couté 8 milliards d'euros pour 3 milliards de prévus, celui de Flamanville, 10.5 milliards d'euros pour 3.3 milliards d'euros annoncés au départ, il faut croire que travailler dans le nucléaire rend optimiste, surtout quand il s'agit de faire signer des contrats.
Nous avons commencés péniblement le démantèlement de la petite centrale de Brennilis d'une puissance de 70 MW depuis 33 ans ! La Cour des comptes évaluait en 2005 le coût du démantèlement de la centrale de Brennilis à 482 millions d’euros, soit 20 fois plus que l’estimation de la commission PEON qui est à l’origine du parc nucléaire français actuellement en exploitation.
Au Royaume-Uni on a également commencé le travail, le démantèlement d'un réacteur à Windscale d’une puissance de 32 MW a coûté 117 millions d’euros. Cela parait peu, pourtant le gouvernement britannique a annoncé, le jeudi 30 mars 2006, sa décision de confier au secteur privé le démantèlement de ses centrales nucléaires, pour un coût estimé à 103 milliards d’euros.
Le démantèlement de deux réacteurs de type Magnox actuellement en cours à Berkeley a été estimé à 800 millions d'euros, ce qui représente deux fois le coût estimé en 2005. L'extrapolation de ce coût aux neuf autres réacteurs de ce type ainsi que de l'usine de retraitement de Sellafield donne un chiffre de 58 milliards d'euros.
Le Royaume-Uni possède 35 réacteurs nucléaires, la France 58. J'ai donc fait un calcul simple en me basant sur le coût moyen du démantèlement par réacteur britannique par rapport au nombre de réacteur français :
(107/35)x58= 177.3
Nous arrivons donc à une estimation de 177 milliards d’euros pour le démantèlement du parc français, EDF a provisionné seulement 25.7 milliards d'euros, avec une dette de 33 milliards.
33-25.7= 7.3
177.3 + 7.3 = 184.6
C’est donc une estimation "à vu de nez" basée sur le Royaume-Uni de 184 milliards d’euros qu’il va falloir trouver dans le futur. On me dira que mon calcul est peut-être un peu bancal, j'ai dit que c'est une estimation, mais quand même 25.7 milliards d'euros de provisions avec une dette de 33 milliards cela suffit à se poser de sérieuses questions.
Des gains de productivité sont possibles, mon estimation est peut être pessimiste, mais entre 25.7 et 184.6 cela fait un sérieux écart. Cela n'est pas étonnant car on a vu avec les deux EPR que les spécialistes du nucléaires étaient très optimistes quand il faut chiffrer des coûts.
Ces provisions sont placées en bourse dans un marché qui est redevenu plus haut qu'avant la crise de 2008 et ne demande qu'à s'effondrer de nouveau. Le cours de l'action EDF dépend aussi de facteurs extérieurs indépendants de notre volonté comme par exemple une nouvelle catastrophe dans un pays étranger qui aurait inévitablement un impact très négatif sur l'action EDF.
Avec la raréfaction des énergies fossiles dans le monde, on doit trouver des solutions pour augmenter la production d'énergies renouvelables et faire des économies d'énergies. On ne peut pas sortir du nucléaire du jour au lendemain mais nous devons diminuer notre dépendance et cette fuite en avant qui ira inévitablement un jour dans un mur avec une montagne de dette. Rien ne prouve que c'est une énergie d'avenir, non seulement les ressources en uranium sont limitées mais aussi il y a beaucoup de progrès dans les énergies propres.
La croissance économique indispensable pour éviter un effondrement de notre économie telle qu'elle est actuellement est la cause de la course à toujours plus d'énergie, plus de population pour plus de consommation. La réalité physique de la limitation des ressources se traduira à l'avenir par une crise brutale, un retour naturel à la réalité et un mode de vie plus durable.
C'est une spécialité du nucléaire de repousser les problèmes à plus tard dans un comportement irresponsable.
C'est de l'avenir de la France dont il s'agit, le nucléaire est une industrie qui en plus d'être dangereuse et polluante sur des temps géologiques n'est même pas viable économiquement.
C'est un gouffre financier à la charge des générations futures.
https://www.jechange.fr/energie/electricite/guides/france-electricite-moins-chere-europe-3410 https://www.latribune.fr/entreprises-finance/industrie/energie-environnement/edf-trop-confiant-sur-le-rebond-attendu-en-2018-768892.html https://fr.wikipedia.org/wiki/D%C3%A9mant%C3%A8lement_nucl%C3%A9aire https://www.actu-environnement.com/ae/news/demantelement-nucleaire-provisions-edf-28512.php4 https://www.asn.fr/Informer/Dossiers-pedagogiques/Le-demantelement-des-installations-nucleaires/Le-financement-du-demantelement http://www.leparisien.fr/economie/epr-de-flamanville-retour-sur-dix-annees-d-un-chantier-maudit-19-04-2017-6866364.php http://www.europe1.fr/societe/reacteur-epr-de-flamanville-cout-a-105-milliards-malgre-les-problemes-3437423 https://www.capital.fr/entreprises-marches/le-cout-astronomique-de-lepr-finlandais-impose-par-anne-lauvergeon-1276791