Pantalonnade autour de l’ambassade américaine à Jérusalem

par Abdelkarim Chankou
vendredi 8 décembre 2017

Où l’on voit bien que cette histoire d’ambassade n’est qu’un subterfuge. Une décision en trump-l'œil destinée à faire diversion, une sorte de fait du prince pour créer une situation nouvelle au Moyen-Orient qui servira des intérêts particuliers. Quitte à heurter des pays comme la France, l’Allemagne, la Chine, la Russie et les peuples arabo-musulmans qui ne comptent pas vraiment car dans l’imaginaire de la majorité des Américains ils sont soit des terroristes soit des crève-la-faim à qui l’on jette des sacs de farine.

Le projet de déplacement de l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem date de plus de 20 ans. Une loi du congrès adoptée en novembre 1995 du nom de Jerusalem Embassy Act a prévu ce transfert. « Mais une clause dérogatoire à cette loi permet à l'exécutif américain de bloquer son application et tous les présidents américains successifs ont, depuis la fin des années 1990, signé tous les six mois cette clause. » Bien qu’ayant fait de ce transfert une promesse électorale pour séduire le vote juif, Trump n’a pas dérogé à la coutume en sursoyant à son engagement. Mais ce n’était quez partie remise. Pour un semestre. Donc six mois après, le 6 décembre 2017, il passe à l’acte. En signant le transfert qui de facto implique la reconnaissance de Jérusalem (Al Qods) comme capitale d’Israël, une décision contraire au droit international, aux engagements de l’ONU et de l’Europe qui prévoient que le statut de la ville saint est un aboutissement du dialogue entre palestiniens et israéliens et non un préalable. Mais c’est mal connaître Donald Trump pour qui a érigé le monde à l’envers en méthode et doctrine politiques. En effet l’homme, emmuré médiatiquement dans son pays pour ses frasques sexuelles et familiales ainsi que pour ses choix anti-migratoires, antisociaux et anti-écologiques, s’avère être un fin opportuniste qui excelle dans l’art de saisir la moindre occasion pour faire diversion. Ici, la brèche par laquelle il tentera de franchir le mur d’internement est un monde arabe plus que jamais divisé et englué dans ses contradictions. Encouragé par des régimes arabes dont le seuls souci est de sauver leurs meubles, Trump croit avoir trouvé le tas de foin qui fera suffisamment de fumée pour camoufler les déboires des ses plus proches collaborateurs soupçonnés par le FBI d’être impliqués dans le Russiagate. Il s’agit évidemment de la question du transfert de l’ambassade. Le truc a le triple avantage de créer assez de boucan et de fumée pour dévier les regards d’une opinion américaine et internationale fatiguée par l’impotence de Trump face aux provocations de la Corée du Nord et ses innombrables incartades d’une part et de l’autre de gagner l’estime et la reconnaissance des lobbys sionistes et des juifs extrémistes convaincus que Jérusalem est la capitale éternelle et indivisible de l’Etat juif sans oublier que la décision de reconnaître Al Qods en tant que capitale d’Israël est de nature à brouiller les cartes dans cette région du monde, « un fait de prince » qui éloigner les pétrodollars du Golfe (sauf le Qatar) de l’Union européenne que l’administration de Trump considère comme un obstacle à l’accomplissement du grand vœu « Make America great again », cher à Trump et sa suite présidentielle… Effectivement ce qui tiennent le cordon de la Maison Blanche savent d’avance que l’Union européenne s’opposera publiquement au transfert, ce qui ne sera pas du goût de Netanyahu et du Likoud que la haine de l’Iran a rapproché du royaume saoudien et ses alliés arabes. Lesquels pays arabes ne pourront que se solidariser avec Netanyahu et son ami Trump. Machiavélique. Mais normal et banal pour des alliés de circonstance que le souci de se maintenir au pouvoir à tout prix rapproche. En effet, comme Trump et son cercle Netanyahu et ses alliés arabes traînent aussi des casseroles. Surtout le premier ministre israélien qui est tellement harcelé par la police pour divers scandales dont la réception des cadeaux de la part de milliardaires et la tentative d’acheter l’amitié et le silence de Yediot Aharonot, l’un des quotidiens les plus influents de l’Etat hébreu. Où l’on voit bien que cette histoire d’ambassade n’est qu’un subterfuge. Une décision en trump-l'œil destinée à faire diversion, une sorte de fait du prince pour créer une situation nouvelle au Moyen-Orient qui servira des intérêts particuliers. Quitte à heurter des pays comme la France, l’Allemagne, la Chine, la Russie et les peuples arabo-musulmans qui ne comptent pas vraiment car dans l’imaginaire de la majorité des Américains ils sont soit des terroristes soit des crève-la-faim à qui l’on jette des sacs de farine.

AFFAIRE DU RUSSIAGATE

L’actuel président français Emmanuel Macron a vite rappelé le désaccord de la France avec la décision de Trump et son prédécesseur Hollande a été plus loin en déclarant que c’est une décision « extrêmement grave ». D’autres dirigeants et responsables occidentaux se sont exprimés dans le même sens. Bizarrement on n’a pas encore entendu ni l’ex président Obama ni Hillary Clinton la rivale malheureuse de Trump lors des élections de novembre dernier. Mais ce n’est pas vraiment une surprise. Hillary Clinton a dès 1999 exprime son souhait de voire Jérusalem capitale d’Israël alors qu’Obama même s’il est resté évasif sur la question tout le long de ses deux mandats, en réalité il ne diffère pas beaucoup de son successeur Trump sur le volet politique étrangère. Ainsi bien qu’Obama ait soutenu le printemps arabe qui a menacé les pétromonarchies du Golfe il a sorti son véto contre une loi autorisant les proches de victimes du 11-Septembre à poursuivre l'Arabie saoudite. Mais le Congrès a rejeté mercredi 28 septembre 2016 le veto d’Obama. Même des durs du parti républicain pourtant proches de Riyad comme l’ancien maire de New York du temps des attentats du 11-Septembre ont critiqué le véto d’Obama. Farouche défenseur de Donald Trump, Rudy Giuliani, a qualifié ce veto « d'insulte » envers les familles des victimes. Heureusement pour Riyad l’élection de Trump en novembre 2016 et la controverse politico-médiatique qui s’en était suivie quant à une éventuelle intervention russe dans le scrutin a vite fait oublier cette histoire avant de l’enterrer, autrement c’en était fini des relations entre les Etats-Unis et leur allié saoudien qui avait menacé en avril 2016 de retirer ses sous (750 milliards de dollars) du pays de l’Oncle Sam. « Le royaume saoudien a prévenu l’administration américaine et les membres du congrès qu’il vendrait les 750 milliards de dollars d'actifs dont il dispose aux Etats-Unis si le Congrès adoptait la mesure permettant de poursuivre Riyad devant la justice américaine pour son rôle dans les attentats du 11 septembre 2001. » Heureusement aussi pour Bibi Netanyahu qui a réussi à convaincre la commission des affaires intérieures de la Knesset qui s’est réunie le mardi 5 décembre dernier pour débattre d’une version amendée de loi sur les recommandations de la police qui en exclurait les investigations actuelles qui le visent. Un comportement qui indique que non seulement Israël de Netanyahu fait fausse route en copinant avec Trump et certains régimes arabes mais également s’arabise. Invité sur I24, en direct de la conférence de l’AIPAC l’American-Israeli Public Affairs Committee (AIPAC) qui s’est tenu le 27 mars dernier à Washington et qui a rassemblé 18 000 participants, « Bernard Henri Lévy s’est montré sceptique sur l’attachement réel de Donald Trump au peuple juif. » « Des preuves d’amour qui ne viennent pas du fond du cœur, qui ne viennent pas d’une vraie connaissance du peuple juif et de ces enjeux ne valent rien, » a ajouté BHL. Que dire de plus ?

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