Pic pétrolier : quel plan B avant la catastrophe ?

par Aldous
samedi 16 avril 2011

Cette fois c’est officiel, le pic pétrolier a déjà eu lieu. Reconnu par le président Obama, confirmé par l’AIEA et évoqué mardi dernier devant les députés par François Fillon, le pic pétrolier est entré dans l’Histoire avec un grand H. Une querelle d’experts sans intérêt fait varier sa survenue entre 2006 et 2009 alors que la véritable question est : Quelle préparation nos gouvernants ont-ils prévu à cette crise prévue de longue date et qui fait peser un risque majeur à notre civilisation.

C’est un secret de Polichinelle que le premier ministre a laissé échapper mardi 5 avril 2011 lors de la séance des questions au gouvernement en répondant au député François Brottes (PS) sur  le prix du gaz  ceci : http://www.assemblee-nationale.fr/13/cri/2010-2011/20110156.asp#INTER_8

« Nous avons, en 2009, atteint le pic de production en matière de pétrole. La production ne peut maintenant que décroître, alors même que la croissance de l’économie mondiale a retrouvé un train de 4,5 %. La catastrophe de Fukushima aura forcément des conséquences sur les investissements dans le monde en matière nucléaire. »

Une phrase qui résume plus qu’on ne peut l’imaginer le désarrois du gouvernement devant la situation nouvelle et l’impréparation irresponsable qui est la nôtre devant une crise pourtant prévue de longue date.

Le pic pétrolier a été prédit dans les années 60 par le géologue King Hubert et ses conséquences sur la civilisation de la productivité ont été modélisés après le Club de 1968 par le Massachussetts Institute of Technology. Ses conclusions sont rendues publiques en 1970 dans le rapport Meadows & al., intitulé "The limits to growth", "Les limites de la croissance".

http://www.manicore.com/documentation/club_rome.html

Les simulations du MIT prédisent l’effondrement du système productiviste, quelles que soient d’ailleurs les hypothèses de départ en ressources de matières premières (à l’époque les réserves connues ne couvraient que 30 années de croissance).

En effet, si le système ne s’effondre par leur épuisement, la  dévastation de l’environnement ou l’explosion démographique conduisent à des scénarios tout autant catastrophistes.

Au début des années 1970, les USA ont une première preuve de la validité du modèle de Hubbert quand ils constatent que leur production nationale de pétrole atteint effectivement un pic.

Les gouvernants US comprennent alors que dans 30 ou 40 ans l’humanité rencontrera un problème majeur quand la production de ressources fossiles ne parviendra plus à satisfaire la demande.

Des bureaux d’étude stratégiques sont alors mis à contribution pour imaginer les conséquences et les phases de cette crise et les moyens de s’y préparer. Voici un lien illustrant  celui de Balfour et Associates : http://www.treehugger.com/balfour-hubberts.jpg

Les scénarios varient sur les dates mais convergents sur les principales étapes à venir :

1) Phase de gaspillage exponentiel

2) Peak Oil atteint (production maximale historique)

3) Plafonnement de  la production de pétrole (plateau oscillant).

4) Déplétion (Chute de plus en plus rapide de la production).

5) Epuisement des stocks de pétrole.

Contrairement aux métaux, il n’y a pas de recyclage possible du pétrole consommé. Les seules alternatives sont des carburants de synthèse.

Quelle seront les conséquences géostratégiques et sociales de ces étapes ?

Les prévisionnistes prévoient en gros les étapes suivantes (au début les  phases historiques passées) :

A) 1970 à 2001 : la croissance de la production de pétrole permet le maintien du productivisme avec une croissance faible. Règne du pétro-dollar.

B) 2001 à 2009 : Anticipation de la désindustrialisation par les marchés (dérégulation). Délocalisation, chômage. Tensions géostratégiques, guerres de positionnement. Remise en cause du dollar. Envolée des dettes publiques. Mise en place de l’état d’urgence aux USA au prétexte d’antiterrorisme. Intégration européenne à marche forcée.

C) 2009 à 2015-20 : Production de pétrole en plateau oscillant : le prix du pétrole flambe, inflation généralisée.  Stagnation économique et désindustrialisation accélérée. Tensions géopolitiques et monétaires. Flambée des prix, famines dans les pays du sud, faillites d’états. Crise du dollar (chute). Instauration de mesures d’exception : gouvernance mondiale (fusion UE + NAU), monnaie mondiale rejetée par la Chine, la Russie, l’Inde qui forment un Block Asiatique dissident.

D) 2015-2020 à 2030-2040 : Chaos dans les pays industrialisés. Activation de l’état d’urgence mondial, répression politique. Rationnement des denrées, marché noir, famines. Suspension des institutions démocratiques et des droits individuels. Identification par puce des individus. Guerre larvées entre l’Alliance Atlantique et le Block Asiatique. Hausse de la mortalité, politique de réduction forcée des naissance.

E) 2030-2040 à 2100 : Epuisement du pétrole. Limitation des moyens de guerre. Lente réorganisation sociale sur un modèle local économe en énergie. Stabilisation de la population mondiale.

 

Si les gouvernants ont eu ses informations depuis 40 ans on peut se dire qu’ils ont préparé un plan B, non ?

Et bien oui, mais en pratique ce n’est pas forcément celui qu’on aimerait entendre, nous autres citoyens naïfs et confiants.
Si on cherche un peu on trouve des préparatifs mais point de voitures écolos, nulle trace de virage technologique vert, pas de recherches massives dans les énergies de substitution.

 

En France nous avons eu droit à la course au nucléaire et aux incitation à l’achat de véhicules neufs à coup de jupettes. Quelques tramways, des bus au gaz. Et c’est tout.

Et dans les autres pays ? Rien de très optimiste.

L’armée allemande s’affole : Spiegel online publie un rapport de l’armée allemande catastrophiste. http://www.spiegel.de/international/germany/0,1518,715138,00.html

Les USA laissent faire le marché qui dépèce l’industrie et instaure des mesures d’urgence pour palier aux chaos social.

Les anglais vendent leurs fleurons industriels aux Indiens ou aux Chinois et se concentrent sur la finance.

Partout on liquide l’état providence qui seul permettrait d’amortir le choc.

La réponse des gouvernants européens est pathétique : « seuls nous ne pouvons rien faire, débarrassons-nous du problème auprès d’un gouvernement européen ou mondial . »

Mais le gouvernement mondial est une illusion, il ne poura rien faire de plus que rationner.

Il ne sera pas mondial, ce sera au mieux un gouvernement de l’occident face à la Chine, la Russie et l’Inde.

Et en tout cas ce ne sera pas une démocratie.

Comment disait Churchill ?

"Vous vouliez sacrifier l’Honneur pour avoir la Paix, vous aurez la guerre et le déshonneur."

Il se pourrait que nos dirigeants aient sacrifié la souveraineté populaire dans l'espoir de conserver la paix et la prospérité.

Nous avons déjà plusieurs guerres et il est à redouter que nous ayons en plus la tyrannie et la misère.

 

 Photo : REUTERS/ US Coast Guard


Lire l'article complet, et les commentaires