Plaidoyer contre la guerre, pour l’intelligence

par Jean Keim
mardi 13 septembre 2022

La force de la guerre est d’arriver à nous convaincre qu’elle est indispensable, inévitable et durable, voire désirable.

Il n’y a probablement pas un seul m2 habité de notre belliqueuse planète où le sang n’a pas coulé.

Le vocable ‘’guerre’’ est un concept arrangé par les médias de façon à masquer ses véritables motivations, en fait l’exploitation de l’homme par l’homme.

Plus ou moins consciemment nous la justifions par le biais de l’Histoire ; combien de rues portent le nom d’un chef de guerre ; combien de monuments, parfois classés au patrimoine mondial de l’UNESCO*, ont été érigés pour la guerre, et parmi eux combien l’ont été par des serfs ou des esclaves dont beaucoup sont morts à la tâche, la présence de ces édifices témoigne soit d’une gloire martiale passée, soit de massacres perpétrés jadis, ou encore d’autres faits que retiennent de préférence les historiens, mais il serait bien de notifier le contexte de leur construction.

Je suis toujours étonné de l’aplomb avec lequel certains donnent des infos comme étant la vérité révélée, de source sûre, quasiment parole d’évangile, c’est d’ailleurs ainsi qu’une idéologie s'implante dans des esprits influençables ; du bon terreau pour la guerre, de l’engrais pour son développement.

Certains commentateurs donnent même dans le sectarisme, ils ne supportent aucune contradiction ni ‘’vérité’’ différentes, pourtant tout autant ‘’incontestables’’ pour leurs contradicteurs.

Il est de bon ton d’avoir un avis sur tout, que ce soit vis-à-vis d’un scandale intéressant une personnalité ou le bon choix d’un camp dans une guerre, choisi en fonction du média conseilleur véritable mentor, en oubliant que le rédacteur des informations passe par un même processus.

Chaque guerre trouve ses prémices dans une précédente, agresseurs et agressés ne sont que du consommable utilisé pour servir des intérêts pour lesquels la victoire ou la défaite n’ont aucune importance, seule l’économie de guerre est la gagnante, plus une guerre est dure, plus elle dure et plus les profits sont conséquents.

Si personne ne veut réellement la guerre, alors elle devient impossible, aucun combattant ne revient d’un champ de bataille sans être marqué à vie ; la guerre est inhumaine, car elle exige d’accepter de faire des choses qui sont contraires à ce qui fait de nous des êtres réellement humains, la guerre est fondamentalement malsaine, un être humain sain d’esprit ne peut que la refuser ; une transformation radicale des consciences n’a de portée que si elle a lieu dans chaque camp, dans ces conditions il n’y a plus d’agresseurs ni d’agressés.

Il n’y aurait pas de guerres si personne, d’une façon ou d’une autre y participait, ne serait-ce qu’en prenant parti pour un camp, c’est notammement la mission ô combien dévoyée de l’ONU.

Il est étonnant que bien peu perçoivent cette évidence.

Refuser de faire la guerre ce n’est pas seulement ne pas se servir d’une arme, c’est également refuser d’y participer de quelque manière que ce soit : ne pas concevoir des armes, ne pas les fabriquer, ne pas les vendre, ne pas en posséder, mais également ne pas choisir un camp sur la foi d’informations qui ne peuvent être que de la propagande puisque favorables à un bord.

Toutes les analyses dans cette affaire, se focalisent sur quelque chose du style : le bon (on choisi son camp), la brute (l’autre) en oubliant naturellement, la propagande y veille, le truand qui prospère grâce à la guerre.

Que ferais-je si mes proches sont concernés par un conflit ? Je pourrais péremptoirement affirmer que je les défendrais, mais il y a dans le monde tant de gens amènes que je ne connais pas et qui se posent la même question ; nous sommes tous les membres d’une même communauté, il nous faut viscéralement, avec notre cœur, notre tête et notre corps, percevoir que nous ne sommes pas vivants pour nous entretuer, donc je ne sais pas, même en pensée, répondre à la question supra, parfois dire ‘’je ne sais pas’’ est la seule (bonne) réponse possible et qui vivra verra.

Je pense toutefois réellement que le meilleur argument que je puisse développer est la perception que la guerre est une activité économique comme une autre, il y a des stratégies de ventes pour des cochonneries modernes (malbouffe, médocs...) dont les dégâts sont jugés secondaires par les bénéficiaires eu égard aux profits attendus, cela s’applique aussi à l’armement, peut importe les belligérants qui sont concernés, si besoin est on fomentera des tensions locales, la guerre est indispensable à la ventes des armes, il est impensables que des arsenaux bien garnis restent sans emploi, ce n’est pas bon pour les affaires.

Dans le long terme, la guerre change le monde rarement dans le bon sens, on peut même dire quasiment jamais ; la guerre 1914-1945 a accouché d’un monde dit moderne, calculateur, matérialiste, scientiste, technologique, tyranniquement numérique, mortellement chimique, cupide, où les qualités humaines sont dénigrées, nous en vivons l’acmé ; la spiritualité est vue comme une régression ou un passe-temps ; la compétition, une forme déguisée de la guerre, est développée dès le plus jeune âge ; émerveillez-vous des beautés offertes par la nature et vous passerez pour un benêt.

 

L'humanité est, ou plus exactement nous, nous sommes une espèce dérisoire.

Chaque guerre prend naissance dans un mode de penser, nous devons commencer par là pour éradiquer définitivement cette ignominie qui a jailli un jour de cerveaux aliénés.

Depuis très longtemps je m'interroge sur les liens qu'il peut y avoir entre l'intelligence, la conscience et la pensée.

Le questionnement est là en suspens, mais jamais complètement absent, parfois dans cette situation une réponse s'invite comme un regard échangé plein de promesses.

Il y a des pensées réellement novatrices et des pensées triviales, pesantes, lourdes comme des gueuses.

L’intelligence qui est omniprésente et une dans le visible et l’invisible se manifeste dans des moments de silence mental, ensuite dans le cours des choses, la pensée plus ou moins dense tente de la traduire, elle interprète cette ‘’épiphanie’’ avec les données disponibles dans une mémoire, et l’interlocuteur, celui qui reçoit ensuite le résultat de cette cogitation, passera par le même filtre mental, et ainsi de proche en proche le processus est en œuvre, mais comme dans le jeu le ‘’bouche à oreille’’, le message sera déformé à l’instar de commérages.

Notre chemin de vie et ses innombrables conditionnements, nous formatent pour penser selon des schémas récurrents qui tracent de véritables sillons dans notre cerveau (les engrammes ?), l’intelligence est littéralement enclose dans ces voies de circulation.

La pensée n'est rien d'autre qu'un processus, elle structure la conscience.

Ainsi plus le temps passe et plus notre pensée ainsi orientée nous définit et nous fige momentanément dans une personnalité, nous fonctionnons finalement suivant des programmes mentaux continûment changeants dans le temps, avec l’illusion d’une permanence, nous serions surpris si brusquement nous nous retrouvions des années en arrière avec la conscience de ce temps révolu.

Cependant l’intelligence est toujours là à l’œuvre et parfois un évènement lui permet, quand les conditions idoines sont réunies, quand une disponibilité s’instaure, de sortir des tracés imposés et même parfois de les modifier radicalement.

Je perçois que la conscience est tout cela, qu’il faut la voir comme un contenu infiniment changeant qui interprète le monde, et donne une consistance à notre moi, mais ce n’est qu’un artefact, le contenant ‘’moi - je’’ n’a aucune réalité et c’est ce processus qui est responsable de l’état du monde. 

 

Pourquoi le monde s’arrêterait-il aux limites que nous lui avons fixées ?

 

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(*) L’UNESCO est une des nombreuses institutions de l’ONU comme le FMI, l’OMS ou le Tribunal Pénal International qui juge différemment suivant que l’accusé est puissant ou misérable, ou suivant une allégeance aux états dominants.


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