Pourquoi Bernard Arnault est-il si riche ?

par Jean-Paul Foscarvel
lundi 19 août 2019

Je réagis à un article sur la fortune de Bernard Arnault ici.

Mon but est d'avancer une hypothèse sur le mécanisme de la création de richesse.

Un point qui m'a fait réagir est le fait qu'il est devenu plus riche de Bill Gates.

Celui-ci a dû sa fortune à sa capacité d'exploiter la plus-value immatérielle, en vendant des logiciels aujourd'hui téléchargés (au départ sur des Disquettes, puis des CD) à un prix largement supérieur au prix de production du support.

Le prix du logiciel est un prix immatériel qui permet une plus-value quasi-intégrale (hormis les coût de conception qui sont minimes au regard du nombre de logiciels vendus).

Mais Bernard Arnault ne vend-il pas des produits réels, fabriqués, faisant ainsi une plus-value matérielle classique et donc limitée ?

C'est là son astuce.

Il vend des produits de luxe !

Mais un produit de luxe a un coût de fabrication élevée, et donc la plus-value reste bien matérielle. D'autre part, étant produit de luxe, il s'adresse à une élite, et la masse des ventes est elle-même limitée. Donc comment cette double limitation peut-elle déboucher sur une telle fortune ?

De fait, il vend sa marque, par exemple Louis Vuitton, à un prix nettement plus élevé que celui de la fabrication. Il vend du prestige, et son succès vient du fait qu'il vend ce prestige à une masse de gens, la petit-bourgeoisie en quête de reconnaissance*, suffisante pour que cela crée un fond de plus-value immatérielle assez grand.

De plus, il a popularisé le luxe, par la vente au prix fort de produits dont le prestige est supérieur à la qualité matérielle qui est réellement intégrée. La masse des clients est bien plus grande que la petite élite fréquentant la rue Montaigne.

Il doit sa fortune aux mêmes mécanismes que celle de Bill Gates, via la plus-value immatérielle, il est alors logique qu'il se retrouve au même rang que celui-ci.

Tans que les clients s'imaginent par l'achat de tels produits faire partie d'une classe à laquelle ils aspirent, les mécanismes comme celui-ci fonctionnent. Par contre, le jour où les consommateurs choisissent des produits de qualité réelle, artisanaux, esthétiques** mais sans marque de prestige, alors la part de la plus-value immatérielle s'effondre, et le super-riche voit ses clients disparaître et sa fortune s'évaporer progressivement.

Une part du fonctionnement de la plus-value immatérielle vient de la capacité de l'humain à imiter son prochain. Que ce soit l'Iphone, le Mont-Blanc, le Louis Vuitton, les chaussures Nike, la valeur de ces produits n'est pas celle de leur fabrication, mais celle du prestige imaginaire que ces produits sont censés représenter. C'est ce prestige que le système tend à nous faire accepter, en dépi d'une réalité beaucoup moins idéale.

Jamais un sac n'a modifié dans le réel le statut social de son porteur. Mais il crée une autosatisfaction qui vaut ce surprix pour celui ou celle qui l'achète, et fait la fortune de celui qui possède l'entreprise qui le fabrique, ou le fait fabriquer.

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* Ne voit-on pas dans les transports en commun (donc des gens des classes moyennes) des personnes avec des sacs Louis Vuitton : cela ne s'adresse pas uniquement aux hyper-riches.

** perso, je les trouve plutôt moches.

 


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