Pourquoi le burkini choque-t-il ?

par Nicolas Kirkitadze
samedi 20 août 2016

 

Après le débat sur la longueur des jupes au lycée, c'est le burkini qui est au cœur d'une énième polémique stérile et inutilement clivante. Cet accoutrement, porté tout au plus par quelques centaines de femmes, ressemble à s'y méprendre à une combinaison de plongée.

Il parait que ça dérange… A l'heure où l'on crée des plages pour nudistes et partouzeurs, où l'on vend des strings pour des gamines de dix ans, le burkini est le stade suprême de la subversion. Jadis, on sanctionnait la nudité publique ; aujourd'hui, c'est le fait d'être habillées qui expose ces femmes à la loi. On est tentés d'y voir la fameuse inversion des valeurs qui gangrène l'Occident.

Le problème n'est pas dans le burkini mais dans sa symbolique. L'argument de la "liberté féminine" est plus que malhonnête ici, tout comme celui de la sécurité, puisque ces quelques femmes arborent le burkini de manière volontaire et ne créent aucune menace à l'ordre public.

La vérité, c'est que notre société a un souci avec le fait religieux, surtout quand il s'affiche. Si demain, une religion demande à ses adeptes de s'habiller en rose fluo, soyez sûrs que les passionarias du laïcisme useront du même zèle envers toute personne portant du rose. En témoigne la traque subie par les jeunes lycéennes qui portent des jupes jugées "trop longues" par la nouvelle police (a)morale ; bien que la jupe n'ait en soi rien de religieux, le fait d'être portée par des demoiselles se réclamant de l'islam ou du catholicisme la classe immédiatement dans cette catégorie de signes ostentatoires.

Alors pourquoi le burkini choque-t-il ? Comme l'a dit Manuel Valls, on peut y voir un "projet de contre-société". En effet, l'Occidentale qui se prélasse seins nus sur la plage, ne peut supporter de voir une femme Musulmane avoir une approche différente de la vie et de la pudeur. Elle qui se gargarise de ses "valeurs" féministes et de ses droits acquis de haute lutte se sent soudain désemparée face à la Musulmane qui fait fi de ces fadaises et choisit volontairement de se couvrir.

Ne soyons pas dupes : ceux qui font œuvre de pudeur se sentent dans leur for intérieur plus grands et plus respectables que les autres, surtout si leur pudeur puise ses sources dans la foi religieuse. Il y a un certain orgueil à choisir la contrainte, plus encore à l'afficher. Or, il est quelque peu déplaisant pour une Occidentale "émancipée" d'être insidieusement ravalée au rang d'impudique, cela la met face à son propre rapport au corps et à la féminité. C'est l'attitude de la punkette percée et tatouée qui se sent morveuse à la vue d'une nonne en habits religieux.

Dans une société où l'hédonisme et la permissivité règnent en maîtres absolus, une personne qui se met volontairement des limites apparaît soudain comme un agresseur subversif.


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