Présidentielles 2017, un « Requiem » pour l’écologie politique

par Daniel MARTIN
samedi 18 mars 2017

Avec la candidature de René Dumont aux élections présidentielles de 1974 débute une aventure politique qui se termine en 2017 par une absence de candidature écologiste ou se réclamant de l’écologie. La responsabilité en incombe surtout aux « Verts » qui sont devenus un parti croupion du PS et dont leurs « hiérarques » n’ont cessé, tout au long de ces dernières années, d’utiliser ce qu’il est convenu d’appeler écologie politique pour leur carrière personnelle opportuniste. Aujourd’hui cela se traduit par un rejet de l’écologie politique de la part d’une opinion publique totalement abusée, dont une grande partie d’entre elle se réfugie dans les replis identitaires et nationalistes.

La tentative d’un écologiste authentique et historique, telle que celle qu’Antoine WAECHTER, faute d’avoir pu recueillir les parrainages nécessaires a échoué. Le ralliement de Yannick JADOT et EELV au PS et à Benoit HAMON pour sauver quelques sièges de député(e)s, dont celui de leur « cheftaine » Cécile DUFLOT, n’a rien à voir avec l’écologie, sinon que cela relève d’une « tambouille » politicienne qui dessert plus Benoit HAMON, qu’elle ne le favorise… On peut, d’ailleurs, se demander quels rapports ces personnes peuvent avoir avec l’écologie, dont, à l’évidence, ils semblent ignorer les fondamentaux.

Certains candidats veulent bien se préoccuper « d’écologie », mais qu’en est-il réellement ?

A cette élection Présidentielle, plusieurs candidats y vont de leurs couplets sur l’écologie, je ne doute pas de leur bonne foi, mais le problème, c’est qu’à l’évidence ils ignorent les enseignements de l’écologie science et si c’est utile de parler de transition énergétique ou écologique, cela ne peut être, en l’état actuel de la situation, que des formules creuses avec parfois des propositions gadgets, quand il ne s’agit pas de propositions relevant de l’escroquerie intellectuelle de la « croissance Verte », telle celle de la voiture électrique. Ces candidats sont d’abord socialistes, sociaux démocrates, libéraux sociaux ou tout simplement libéraux, c'est-à-dire productiviste et attaché au mythe d’une croissance exponentielle, désormais impossible, ce qui est fondamentalement incompatible avec l’écologie. Lorsque, par exemple, depuis le début de sa campagne en avril 2016, Emmanuel MACRON, grand favori des sondages pour cette Présidentielle, se positionne « ni droite, ni gauche » et lorsqu’il déclare : « Depuis 30 ans, on assiste à l’alternance de la droite et la gauche qui balaye tout de manière automatique. Là ce sera la véritable alternance, celle d’une nouvelle méthode de gouvernement, parce que je vais réunir pour être efficace des femmes et des hommes de bon sens. » Avec la promesse d’un gouvernement composé essentiellement avec des personnes de la société civile et des personnes du monde politique venant « de la gauche, du centre, de la droite  ». Le problème de ce positionnement, s’il devient président de la république et obtient la majorité parlementaire, l'hémicycle risque fort de devenir la foire d'empoigne. Entre un parlement, avec des politiciens ex LR, PS, UDI, Verts des plus opportunistes, et un Gouvernement sans cesse fragilisé on peut imaginer que les lobbys de la finance et des multinationales seront les vrais maîtres du jeu et si le Président Emmanuel MACRON veut prendre certaines mesures conforme, ne serait-ce que dans le cadre des objectifs les plus timides de la COP 2, on peut imaginer 1es difficultés qu’il éprouverait…

Dans le meilleur des cas, Ils n’hésiteront pas à cumuler activités réparatrices et activités destructrices de l’environnement

A l’issue des élections Présidentielles et législatives, parmi les candidats qui ont évoqué l’écologie, celui qui sera élu, s’il est contraint d’assurer un service minimum dans ce domaine, les multinationales et leurs lobbies du Nucléaire et des l’industries agro- chimico - pétrolières ne vont d’ailleurs pas cesser d’agir et surtout empêcher que les contraintes dues aux quelques engagements pris, notamment pour réduire les gaz à effets de serre, développer les énergies renouvelables, qui n’en ont que le nom, ou engager la transition énergétique hors du Nucléaire, ne puissent se réaliser… A moins que dans les salons feutrés de l’une ou de l’autre de ces multinationales, ils jugent qu’au fond les engagements à minima pris par les nouveaux responsables politiques représentent pour eux un nouveau champ de business, dès lors des campagnes de marketing vont se mettre en place et nous vanter la « croissance verte » comme la nouvelle formule miracle qui va « redonner de la croissance et des emplois… » Mais ils ne cesseront pas pour autant leurs activités lucratives qui vont à l’encontre de ces décisions que leur procure leurs marchés traditionnels… L’exemple de TOTAL qui produit du photovoltaïque et développe des extractions de pétrole, gaz de schiste ou exploite des sables bitumeux au Canada, avec les dégâts que l’on sait dans la province de l’Alberta. Dans le cas contraire, s’ils estiment que cela ne leur rapportera rien, ou si peu, en regard des investissements qu’ils devraient consentir, ils vont rester positionner sur leurs marchés traditionnels et contraindront les gouvernements, de Gauche comme de Droite ou ni de Droite ni de Gauche, à des contorsions frisant même le ridicule pour nous faire avaler le prétendu « blocage de Bruxelles… »

Avec les explosions successives de la bombe démographique et l’utilisation des énergies fossiles, l’homme est devenu une force géologique destructrice

Ce qui est surréaliste, L’écologie dans toute sa dimension scientifique et politique, avec ses problématiques humaines d’ordre, culturelles, démographiques, territoriales, environnementales, sociales, économiques est exclue du débat Présidentiel, alors que dans notre pays la plupart des scientifiques ne cessent de l’affirmer : La terre est entrée dans une nouvelle ère environnementale. Ce qui nous arrive n’est pas une simple crise environnementale, mais une révolution d’origine Humaine due au nombre et aux énergies fossiles. Si les 11 500 dernières années ont connu des conditions de vie relativement stables permettant à l’homme de sauter de la terre labourée du néolithique au sol lunaire, désormais nous filons vers l’inconnu. Depuis la révolution thermo-industrielle, avec l’explosion de la bombe démographique, il a fallu plusieurs millénaires pour atteindre le premier milliard d’habitants et moins de deux siècles pour atteindre et dépasser les sept milliards, dont un milliard entre 2000 et 2012. Actuellement, nous vivons un tournant irréversible de l’histoire de notre planète, l’influence de l’homme atteint une ampleur, telle qu’elle précipite l’avènement d’une nouvelle ère géologique. Cette nouvelle ère c’est l’Anthropocèneoù l’humanité constitue une force planétaire géologique. Depuis deux siècles, nous sommes en train de nous extraire de l’Holocène, une période interglaciaire commencée il y a plus de 10 000 ans et qui a fourni des conditions environnementales extrêmement stables, permettant le développement mondial que nous connaissons.

C’est le géochimiste et prix Nobel Paul CRUTZEN qui, dans un article de la revue « Nature « en 2002, a avancé la thèse que, depuis deux siècles, la Terre est entrée dans un nouvel âge géologique marqué par la capacité de l’homme à transformer l’ensemble du système Terre. Encore tout récemment, le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) annonçait sa certitude désormais quasi absolue à 95% sur l’origine humaine des changements climatiques et des pressions telluriques qu’il exerce.

Les écologistes disparaissent du débat politique Présidentiel au moment ou l’écologie devrait être l’un des axes centraux

En l’espace des trois révolutions industrielles la population mondiale a été multipliée par 10 sur un peu plus de deux siècles.  Actuellement, c’est 1 million d’humains qui s'ajoutent à la population mondiale, tous les 4½ jours. Pendant la même période, en se référant à l’étude de B. SUNDQUIST de l’institut du Minesota, (Topsoil loss - Causes, effects and implications : a global perspective), c’est plus de 100 000 km2 de terres arables disparaissaient annuellement.

Notre planète a progressivement basculé vers une situation inédite. Les traces de notre âge urbain, consumériste, chimique et nucléaire resteront des milliers, voire des millions d’années dans les archives géologiques de la planète et soumettront les sociétés Humaines à des difficultés considérables, si tant est qu’elles puissent y survivre… L’homme est devenu un dévoreur insatiable des énergies fossiles, pour les lesquelles on peut prévoir encore 70 ans de pétrole, une centaine d’années de gaz naturel et d’uranium dont la demande ne cesse de croitre et 200 ans de charbon environ, sans compter que la combustion des énergies carbonées produit beaucoup de CO2. Plus ils sont hydrogénés, moins ils en émettent par unité d’énergie produite. Produire 1 kWh avec du charbon émet environ 1000 g de CO2, 750g avec du pétrole et de l’ordre de 500 g avec du gaz naturel. Si on y ajoute l’exploitation des terres rares, certes, certaines ne le sont pas encore, dont les réserves pour l’extraction des métaux rares indispensables à la révolution du numérique sont à terme menacées. faute d’avoir anticipé par des mesures adaptées d’économie des ressource naturelles et de Décroissance Démographique, choisie et équitablement répartie, entre migrations climatiques, économique ou celles fuyant des zones de combat, la vie sur terre de l’homo sapiens risque fort de s’achever dans un chaos des plus violents, où les survivants envieront les morts... 

Une situation écologique qui ne cessera de se dégrader, avec des effets irréversibles : destruction de la Biodiversité, dérive climatique, montée des océans, épuisement rapide et inexorable des ressources naturelles liée aux problèmes de surpopulation, ainsi que les énergies fossiles dues à la prolifération d’esclaves mécaniques aux appétits gargantuesques … Phénomène aggravé par une mondialisation économique dominée par le Monétarisme, où le pouvoir politique a volontairement capitulé face à l’oligarchie Bancaire et Financière qui a pris le gouvernail de la politique du pays en imposant son diktat via la Bourse et les Agences privées de notation. Ce n’est pas seulement le gouvernail de l’économie, mais le pouvoir politique, via leurs responsables au sein des exécutifs ou directement par la mise en place de gouvernements dits « techniques » à leur solde et la direction des affaires internationales, avec des guerres d’assujettissement à leur domination, que les dirigeants des Banques ont pris. Mais attention, la tentation d'un gouvernement autoritaire, voire liberticide, est forte. Certains sont déjà prêts à sacrifier la démocratie pour essayer de préserver le mode de vie des sociétés occidentales.

Le rôle d’un(e) candidat(e) écologistes à ces Présidentielles aurait été de porter un regard objectif et non complaisant ?

Tout regard lucide sur la gravité de la situation de la planète est généralement récusé, voire taxé de catastrophisme par la majorité des responsables politiques, économiques, religieux, sociaux. Pour les politiques, cette attitude s’explique aisément, car il n’est pas facile de se faire élire sur un programme écologique dans un contexte de démagogie générale. Proposer d’organiser la décroissance pour ne pas la subir, n’est pas actuellement, pour la majorité de la population, une perspective réjouissante. Par ailleurs, aucun des candidats actuels à l’élection Présidentielle n’échappe à l’aveuglement idéologique qui, depuis l’avènement des énergies fossiles, vit sur le mythe d’une croissance sans limite dans un monde qui cependant est aujourd’hui fini. Ils entretiennent également, volontairement ou involontairement, l’illusion que la science et la technologie, notamment celle du numérique offrent de nouvelles solutions pour s’affranchir de ses difficultés énergétiques, ce qui traduit manifestement leur ignorance des données apportées par l’écologie en tant que science, mais surtout d’une méconnaissance des causes de la situation écologique de la planète qui est aujourd’hui des plus désastreuse. 

En utilisant les réserves énergétiques fossiles grâce aux machines thermiques, l’homme s’est approprié toute l’énergie photosynthétique accumulée depuis le carbonifère. Ce surplus fantastique d’énergie maîtrisable, consommée dans un délai historique qui n’excède guère deux siècles, a mis à la disposition des individus des pays riches des dizaines d’esclaves mécaniques, permettant à l’homme d’arracher aux écosystèmes plus qu’ils ne peuvent produire ou même de les détruire. Cette consommation d’énergie a permis une explosion sans précédent de la production de biens matériels et une augmentation de la productivité agricole, s’accompagnant d’une extension des surfaces cultivées. D’où l’explosion démographique et la colonisation totale de la planète... il est désormais urgent de s’orienter vers l’économie de ressources. Le pétrole n’est pas la seule matière première que menace le prurit de la société de consommation, outre certaines terres rares, le cuivre, le zinc, l’or et l’uranium figurent parmi les principaux métaux dont les ressources mondiales semblent en voie d’épuisement. Tout simplement parce que pour creuser des mines, il faut de l’énergie. Beaucoup d’énergie. Aujourd’hui, 8 à 10 % de l’énergie primaire est consacrée à extraire et raffiner les ressources métalliques, notamment pour l’acier et l’aluminium.

Au-delà des inconnues de la quatrième révolution industrielle, des certitudes cependant

Avec la quatrième révolution industrielle, dans laquelle nous entrons à marche forcée, la croissance de consommation d’électricité, loin de stagner et à fortiori de ralentir va exploser. Selon les dernières estimations de l’Agence Internationale de l’Energie (AIE), la consommation d’électricité dans le monde devrait augmenter de 75 % d’ici à 2030, passant de 19.756 TWH à 34.292 TWH. Les pays en voie de développement seraient à l’origine de plus de 80 % des nouveaux besoins, Chine et Inde en tête.La production d’électricité s’accompagne de forts rejets de CO2. Dans le monde, ces rejets sont de 565 grammes de CO2 par KWH produitPar exemple, en Union Européenne c’est 331 grammes de CO2 par KWH produit, dont en France 79 gr. CO2 par KWH produit. Les USA c’est 522 grammes de CO2 par KWH produit. La Chine c’est 766 grammes de CO2 par KWH produit.

Les véhicules sans chauffeur, les tracteurs sans cabine et sans conducteurs, les drones taxi et ceux pour les livraisons, ainsi que des robots pour toutes les opérations de manutention qui sont en cours d’expérimentation ne sont qu’un début annonciateur des profonds changements sociétaux que cela va entrainer avec des conséquences qu’il nous ait encore difficile d’apprécier …Comme il nous est aujourd’hui impossible de prévoir la nature et le type de nouvelles activités et de leurs besoins énergétique que générera forcément la 4ème Révolution industrielle d’ici les 20 prochaines années. Comme il était impossible à la fin des années 80 d’imaginer le bond du virtuel et du numérique qui contribue aujourd’hui à l’émergence de nouvelles formes d’activités et d’emplois (plateformes numériques par exemple). Toutefois Sachant que la 4ème révolution industrielle va avoir de très gros besoins énergétiques, en particulier en terres rares et en électricité, au rythme actuel de la croissance démographique et des besoins correspondants, les moyens et capacité de production vont à terme être confrontés à d’importantes et insurmontables difficultés. 

L’élection Présidentielle est une tribune où la problématique écologique devrait faire l’objet d’une réflexion spécifique des candidat(e)s, de manière à formuler des propositions qui permettent de dynamiser des débats sur cette question et de façon irréversible mettre les deux candidats qui seront arrivés au premier tour dans l’obligation de se prononcer clairement. Mais pour cela une candidature authentiquement écologiste pour dynamiser le débat présidentiel sur cette thématique eut été nécessaire. Ne nous y trompons pas, ne pas considérer les fondamentaux des enseignements de l’écologie science comme une priorité, c’est forcément apporter de mauvaises réponses aux problèmes culturels, sociétaux, économiques, environnementaux et, climatiques qui découlent de l’activité humaine, donc du nombre…

Pour conclure

Aujourd’hui, un enfant qui nait en France est potentiellement un sur-consommateur par rapport aux ressources de la planète. Certes, même si la France devenait un ilot de vertus écologiques, cela ne changerait pas fondamentalement la donne à l’échelle mondiale, toutefois la France doit montrer l’exemple au niveau international. Comment pourrait-on condamner l’explosion démographique mondiale et favoriser une politique nataliste chez soi ? Une totale neutralité de l’Etat en matière de fécondité implique l’abrogation de toutes les mesures qui visent à encourager toujours plus la progression démographique Française. Un débat national doit s’ouvrir sur les mesures à prendre. L’inscription de la question démographique doit, par ailleurs, être inscrite à l’ordre du jour de la prochaine COP 23 à Bonn, comme le demande l’association « Démographie Responsable ».

 

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