Professeurs des écoles stagiaires : une situation inacceptable ! L’exemple de la Côte d’Or

par Stéphane GUINOT
jeudi 2 décembre 2010

94 professeurs des écoles stagiaires (PES), ayant passé le concours en mai-juin dernier, ont fait leur rentrée en septembre en Côte d’Or. 48 d’entre eux seulement sont suivis par des Professeurs des écoles maîtres formateurs (PEMF en école d’application). 8 autres auront comme tuteurs des titulaires du Certificat d’aptitude aux fonctions d’instituteurs ou de professeurs des écoles maîtres formateurs (CAFIPEMF) qui ne sont pas maîtres formateurs. Les 38 restants seront suivis par des maîtres d’accueil temporaires (MAT), c’est à dire des enseignants non titulaires du CAFIPEMF choisis sans appel à candidature par les Inspecteurs de l’Éducation nationale (IEN) pour remplir cette fonction et qui n’ont jamais été « formés à former ».
 
Ce qui est étonnant, c’est que certains titulaires du CAFIPEMF n’ont jamais été contactés pour assurer le suivi de ces stagiaires. Une question se pose alors : sur quels critères s’est donc faite la sélection des tuteurs (hors PEMF) ?
 
Nous savons depuis la rentrée que ces maîtres d’accueil temporaire qui reçoivent des stagiaires bénéficient d’une journée de décharge par semaine et de l’indemnité comme les PEMF ! Sans remettre en cause les besoins de temps et la nécessaire rémunération des missions accomplies par ces collègues, quelle reconnaissance du CAFIPEFM et des exigences requises pour son obtention ?
 
Les professeurs des écoles stagiaires ont passé leur première période de classe en doublette (ou seuls pour certains) dans la classe de leur tuteur. Ils étaient, pendant ces deux semaines avant les congés d’Automne en circonscription et à l’IUFM pour une formation « théorique ».
 
Ceux qui avaient déjà connaissance de leur future affectation (seul en responsabilité dans une classe) ont eu la chance de pouvoir prendre contact pendant deux jours avec l’enseignant ayant assuré le début de l’année. A noter que certains personnels remplaçants qui ont fait la rentrée dans ces classes et qui projetaient leur remplacement sur un long terme ont appris par le stagiaire lui-même, peu de temps avant son arrivée, qu’ils seraient dessaisis de leur classe après les vacances. Quel mépris de la part des IEN pour les personnels qui s’impliquent dans leurs missions de remplacement et pour les élèves de ces classes !
 
Les professeurs des écoles stagiaires recevront 8 visites lorsqu’ils seront en pleine responsabilité de classe, 4 de leur tuteur - PEMF ou MAT - et 4 d’un Conseiller pédagogique de circonscription. Pour la validation de l’année de stage et la titularisation, il est indiqué que l’IEN, pour donner son avis, doit se baser sur 1 rapport du tuteur qui fera une synthèse.
 
En Côte d’Or, c’est l’équipe de suivi du stagiaire qui établit un rapport transmis à l’IEN de la circonscription d’affectation du stagiaire, lequel émet un avis sur la base de ce rapport.
 
Puis, un jury académique de 5 ou 6 IEN prendra la décision finale.. Quoi qu’il en soit, il est à noter que le pouvoir de titularisation est de plus en plus entre les mains des IEN.
 
Pour l’instant, des interrogations subsistent quant aux remboursements des frais de déplacement de l’équipe de suivi. De même des précisions seront demandées à l’administration par le SNUipp-FSU concernant l’affectation des PES et leurs modalités de remboursement (formation, remplacement dans les classes…).
 
Un autre constat s’impose : la formation à l’intérieur du département est très inégale entre les stagiaires formés en école d’application et les autres. En effet, d’une part dans les écoles d’application, les stagiaires ont pu « tourner » dans les classes des maîtres formateurs et ainsi voir plusieurs niveaux, ce qui est impossible pour les autres stagiaires car les collègues tuteurs ne bénéficient pas d’un réseau de formateurs autour d’eux.
D’autre part, certains professeurs des écoles en formation ont été affectés dès novembre dans une classe du même niveau que celui qu’ils ont pu observer et pratiquer dans la classe du tuteur ou, pour d’autres, dans un niveau complètement différent. Comment un fonctionnaire stagiaire pourra-t-il enseigner correctement la lecture à des CP ou des CE1 s’il n’a pu voir qu’une classe de CM2 ?
 
Cette nouvelle situation risque, très rapidement, d’engendrer pour nos jeunes collègues une souffrance au travail qui peut avoir des conséquences lourdes. Cette souffrance pourra avoir plusieurs causes :
- incapacité à gérer des élèves au comportement difficile car les stagiaires n’auront pas reçu de formation pour cela. Le DVD intitulé « Tenue de classe, la classe côté professeur », que nous vante fièrement notre ministre de l’Education nationale, n’est pas une solution satisfaisante. Une distribution de DVD ne peut se substituer à une véritable formation !
- difficulté à gérer les relations avec les parents. Une relation mal gérée peut être source de tension et de stress.
- sentiment d’inefficacité du stagiaire qui est « lâché » dans une classe en novembre sans avoir reçu de véritable formation.
- surcharge de travail : préparer sa classe, lorsqu’on débute, ça prend du temps ! Les stagiaires, en deux mois d’observation et de pratique, n’ont pas encore développé toutes les stratégies et compétences pour préparer efficacement leur semaine de classe sur un temps limité. D’autant plus que le temps qu’ils pourront consacrer aux préparations sera très restreint étant donné que certains mercredis seront consacrés à de la formation au sein de l’IUFM, seules heures de formation pour l’année.
 
Tout cela ne sera pas sans conséquence sur la qualité de l’enseignement dispensé aux élèves ! Fatigue des professeurs, stress, risques de dépression, manque de formation initiale et continue… Tout cela aura un coût sans doute bien supérieur à l’argent que le gouvernement souhaite économiser en détruisant le service public d’éducation ! Nous payerons tous la facture dans les années à venir.
 
Stéphane Guinot
 
Retrouvez toute l’actualité de l’école primaire sur http://ecole-education.over-blog.com

Lire l'article complet, et les commentaires