Prospective Algérie 2035. Du 1er cycle économique à la phase ascendante du 2ème cycle, né de la politique hégémoniste mondiale des USA

par Hamed
mercredi 23 janvier 2019

1ère partie

 

 L'Algérie est en train de vivre de moments historiques cruciaux aujourd'hui. Un remake de périodes difficiles déjà vécues par le passé ? Et cette évolution coïncide à chaque fois qu'une crise économique, et toujours pétrolière du moins pour les pays exportateurs de pétrole, surgisse, et une crise ne vient jamais seul, généralement toujours accompagnée d'une autre. Un peu comme si les crises rappelaient que l'optimisme et les certitudes d'un pays ne sont donnés qu'un temps, que rien n'est acquis dans la marche de l'histoire, que tout est « en perpétuelle mutation ». Et c’est même là le sens de l’histoire, le monde humain ne peut être figé, et, par conséquent, à l’instar, l'Algérie doit aller vers l'avant.

 

Aujourd'hui, force de dire que la situation de l'Algérie sur le plan politique et économique n'est pas au beau fixe. A voir les difficultés tant sur le plan économique qu’institutionnel. Et le rendez-vous présidentiel de 2019, mais ce n’est pas là le plus important, combien même il retient en haleine les mass-médias et les politiques. En effet, passé les élections présidentielles, il restera les orientations politiques et économiques à définir dans les années à venir qui s’annoncent difficiles. Et tout dépendra de la stratégie retenue. Si l’Algérie continuera à naviguer économiquement à vue, il est évident que l’économie va en pâtir, et bien entendu des répercussions politiques, économiques et sociales qui seront douloureuses.

 

D’autant plus qu’elle rentre dans la cinquième année de chute du prix du pétrole depuis le deuxième semestre de 2014, et il n’y a toujours pas d’éclaircie sur les cours pétroliers. Alors que les réserves de change ont été plus que divisées par deux, elles se situent fin 2018 autour de 80 milliards de dollars, loin des 200 milliards de dollars qu’elle avait accumulés avant le contrechoc pétrolier. Ceci étant, peut-on dire qu’il n’y a pas beaucoup d’espoir de redressement économique dans les années à venir, à l’horizon 2035 ? Peut-on dire qu’elle cessera d’être un ilot de stabilité et de croissance économique ? Et si, contrairement aux pronostics intérieurs et extérieurs, l’Algérie continuera à être un pays-gage de stabilité, un pays qui continuera sa lancée dans le développement et retiendra de plus en plus l’attention de l’Europe, des États-Unis et des puissances asiatiques dont les plus grandes, la Chine, le Japon et la Corée du Sud, et bien sûr, la Russie.

 

Et qu’au contraire, l’Algérie apparaîtra, par sa jeunesse exubérante, avide de progrès, un « pays-phare » pour l’Afrique du Nord, et pour l’Afrique entière. Et c’est précisément, par les maigres forces que la Nature a mis dans l’homme, que l’auteur va vouloir, par la raison, par la logique du développement des événements, chercher à décrypter l’avenir de l’Algérie et du monde. Et surtout partant du principe que l’homme, les peuples, sont « acteurs » et en même temps « actés » dans l’histoire.

 

  1. La cyclicité de l’histoire économique de l’ Algérie post-indépendance jusqu’au début de la phase de contraction du 2ème cycle en 2014

 

 Tout d’abord, interrogeons-nous pourquoi le contrechoc pétrolier a surgi en 2014 ? Il rappelle le contrechoc pétrolier de 1986. A-t-il un lien avec le choc pétrolier de 1973 suivi du deuxième choc pétrolier en 1979. Obéit-il à une « cyclicité économique » ? Dans le sens, si on s’appuie sur la théorie économique, on relève que tout événement économique qui revient périodiquement suivi d’un autre, travaillant en boucle qui se répète, constitue un cycle économique. Précisément, pour l’Algérie, deux cycles économiques bien visibles ressortent dans son histoire post-indépendance. En effet, le premier cycle économique commence en 1973, avec le premier choc pétrolier, suivi du deuxième pétrolier de 1979, ce qui constitue pour l’Algérie la première phase d’expansion économique. En 1985, la phase d’expansion se termine, puisqu’avec le contrechoc pétrolier de 1986, commence donc la phase de contraction de l’économie algérienne. Une baisse de la croissance, et donc l’Algérie entre en récession suivi d’une dépression économique durable.

 

Cette situation continue jusqu’au mini-contrechoc pétrolier de 1998 que l’on peut compter comme la dernière période de la phase de dépression économique pour l’Algérie. L’année 1998 sonne la fin du premier cycle économique pour l’Algérie.

 

En 1999, commence la remontée des cours du pétrole, c’est le début du deuxième cycle économique pour l’Algérie. A l’été 2000, le prix du pétrole atteint 36 dollars. Le prix du pétrole continuera sa remontée. C’est le début de la deuxième phase d’expansion économique pour l’Algérie En 2008, au sommet de la crise financière mondiale, le pétrole atteint un haut historique, à 147 dollars le prix du baril de pétrole. Cette phase d’expansion continuera jusqu’au premier semestre 2014. Le prix du Brent est à 115 dollars en juin 2014.

 

Au deuxième semestre, le prix du pétrole commence à reculer pour atteindre 60 dollars en décembre 2014. Il a été divisé pratiquement par deux. La phase d’expansion du deuxième cycle économique se termine donc en 2014, et commence la phase de contraction de l’économie algérienne. En 2019, cinq années sont passées, et l’économie algérienne va au gré des réserves de change que l’Algérie a accumulées depuis une décennie et demie.

 

Donc, au final, l’Algérie a eu le premier cycle économique 1973-1998, avec un contrechoc pétrolier en 1986, soit une phase d’expansion de 13 années. La phase de contraction économique qui a commencé en 1986 et s’est terminée en 1998, a duré aussi 13 années. Le deuxième cycle économique a eu une phase d’expansion qui a débuté en 1999 et s’est terminée en 2014, elle a duré 16 années. La phase de contraction économique qui a commencé en 2014 n’est pas terminée. Que réserveront les années à venir dans cette phase de décroissance économique, pour l’Algérie ? Le prix du pétrole va-t-il remonter fortement, comme durant la phase d’expansion ? Et par un retournement positif des cours pétroliers, enclencher la phase d’expansion d’un nouveau cycle, donc un troisième cycle économique de son histoire.

 

Aussi, pour avoir une réponse fiable, il faut d’abord analyser les conditions qui ont été à l’origine du premier cycle économique depuis son indépendance. Et quelles ont été les forces économiques qui ont amené l’Algérie, pour la première fois, de vivre à l’instar des puissances, une évolution cyclique de son économie ? Cette analyse des forces historiques et économiques cycliques nous permet de mieux comprendre l’évolution de l’Algérie tant sur le plan politique, économique, institutionnel que social. Et on ne peut dissocier l’économique du politique. C’est lui qui conditionne les avancées d’un pays au triple plan politique, économique et social.  

 

  1. La phase d’expansion du premier cycle économique en Algérie de 1973 à 1985

 

 Comment la phase ascendante du premier cycle économique a surgi en 1973 pour l’Algérie ? L’Algérie profitera d’un événement inattendu. C’est la forte hausse du prix de pétrole lors de la quatrième guerre israélo-arabe en octobre 1973. En effet, les pays arabes ont décrété un embargo contre les États-Unis en réaction à leur soutien à Israël et quadruplé le prix du pétrole. Cependant, on peut se poser une question pourquoi les pays arabes ont profité de la guerre avec Israël pour quadrupler le prix du pétrole. On peut comprendre l’embargo contre les États-Unis pour son soutien à Israël, mais quadrupler le prix du pétrole, en le faisant passer de 3 dollars à 12 dollars, revient à « sanctionner » l’ensemble des nations du monde dont la majorité des pays du monde n’a rien à voir avec la guerre qui oppose les pays arabes à Israël. Bien plus, elle condamne la politique de colonisation des territoires palestiniens.

 

Pour comprendre, il faut aller à la situation qui a prévalu en 1945 pour les pays d’Europe. Des économies détruites par la guerre, dépendantes de l’aide américaine dont le plan Marshall, les pays d’Europe remontaient difficilement la pente. A l’époque, seul le dollar américain était convertible à 35 dollar l’once d’or conformément aux clauses édictées dans le système de Bretton Woods de 1944. Ce n’est qu’en 1958, après la reconstruction et accumulé un stock d’or conséquent que les pays d’Europe rétablissent la convertibilité de leur monnaie en or. Cette situation nouvelle place ces pays en pays compétiteurs avec les États-Unis dans le commerce mondial et les transactions financières et monétaires. De plus en plus les États-Unis ont des difficultés pour régler leurs déficits commerciaux avec l’Europe en or. Dollars des excédents commerciaux que l’Europe s’efforce de convertir en or auprès du système bancaire américain. C’est ainsi que perdant une grande partie de leur stock d’or, les États-Unis se voient obligés de suspendre la convertibilité du dollar, en août 1971, par le président américain Richard Nixon. Une décision qui deviendra en fait définitive, eu égard à la faiblesse du stock d’or américain.

 

Malgré des accords monétaires entre les pays d’Europe et les États-Unis, la création du serpent monétaire européen et d’autres mesures prises, les crises monétaires ont débouché sur une impasse. La plupart des pays ont opté pour les changes flottants, une situation qui n’arrange pas les États-Unis puisque la convertibilité en or ne jouant plus, toute émission monétaire par la Banque centrale américaine (Fed) se traduit par une dépréciation de sa monnaie. Les conséquences sont là, pour la première fois, les États-Unis ne pourront plus répercuter leurs déficits commerciaux sur l’Europe et le Japon comme ils l’ont fait avec le dollar convertible en or. Une dépréciation continue du dollar ne pouvait qu’entraîner de l’inflation et une perte de confiance de ses partenaires commerciaux. Obligés de limiter la création monétaire et donc importer moins d’Europe, du Japon et du reste du monde, les États-Unis se sont trouvés obligés de baisser la voilure de leur commerce extérieur.

 

Une situation qui n’est guère possible pour les États-Unis, compte tenu de leur puissance militaire et leurs bases militaires dispersées dans les quatre coins du monde. Précisément, la guerre israélo-arabe devient une opportunité pour les États-Unis – ou plutôt pensée voire « planifiée  » par le système financier américain –, et, en entente avec l’Arabie Saoudite, une monarchie dépendante de la protection nucléaire américaine. Celle-ci, facturant ses exportations de pétrole en dollars et poussant les pays d’OPEP à faire autant, quadruplant le prix, obligerait les pays importateurs de pétrole de procéder à des achats massifs de dollars sur les marchés pour régler leurs importations. Et c’est ainsi que les pays d’Europe, le Japon et les autres pays importateurs de pétrole du reste du monde se sont à rechercher les dollars pour régler leurs besoins en pétrole.

 

Et c’est ce qui s’est passé dans le premier choc pétrolier. En effet, on voit mal la monarchie saoudite, de surcroît protégée par la première puissance, s’opposer à son protecteur, et surtout lui imposer un embargo, tout en continuant à accepter les dollars américains comme monnaie de facturation. Or, un moyen de pression simple aurait été le refus du dollar comme moyen de facturation de ses exportations pétrolières. Ce qui n’a pas été fait.

 

Cela étant, il demeure que cette entente américano-saoudienne, paradoxalement dictée par l’histoire, a été très positive pour l’Europe, le Japon comme pour le reste du monde. Si les crises monétaires étaient restées sans solution, on aurait eu une grave décélération économique mondiale, à l’image de ce qui s’est passé dans les années 1930. Une perpétuation de crises monétaires intra-occidentales engendrait inévitablement l’extinction du moteur que fut la puissance américaine. Le prix du pétrole serait resté à 3 dollars le baril. L’absorption mondiale qui se serait contractée entraînerait une contraction de la production mondiale avec la fermeture de centaines de milliers d’usines et de diminution massive d’exportations de matières premières, et forcément un chômage de masse tant en Occident que dans le reste du monde.

 

On comprend dès lors que tant les crises monétaires intra-occidentales, le premier choc pétrolier et le deuxième choc pétrolier qui a suivi en 1979 que les stratégies des uns et des autres, elles font toutes parties d’un processus herméneutique qui confirme la rationalité même de la marche du monde. Un processus impensé par l’homme mais le rendant subissant les forces de l’histoire. On comprend donc les crises monétaires et les réponses par les chocs pétroliers.

 

Ceci étant, l’économie algérienne était en pleine expansion. Un concept a été inventé, les « industries industrialisantes ». C’est ainsi qu’elle connut un boom industriel sans précédent au point même que les décideurs algériens crurent, dans ce choc pétrolier, à un Nouvel Ordre mondial. Le président Houari Boumediene, devant l’Assemblée générale extraordinaire de l’ONU, lança ce mot d’ordre le N.O.E.I. (Nouvel ordre économique mondial). Une période donc très positive pour l’économie algérienne, que le deuxième choc pétrolier a encore renforcer. Le prix du baril de pétrole a triplé en 1979, passant de 12 dollars à 36 dollars le baril. Et cette hausse pétrolière durera jusqu’à 1985. D’autre part, le taux de change du dollar américain va sans cesse s’apprécier jusqu’à arriver à 10 francs pour un dollar américain, au milieu des années 1980. La même appréciation du dollar pour les autres monnaies européennes (deutschemark, lie italienne, etc.)

 

Cependant si une prise de conscience s’opère chez les décideurs algériens sur les limites des industries industrialisantes, le transfert technologique ne suit pas, il demeure que cette politique a été une expérience non négligeable dans le savoir économique de l’Algérie. Il est évident qu’il y avait réellement une volonté d’industrialiser l’Algérie. Combien même cette politique a été pénalisante sur le plan financier, il demeure sur le plan mondial, elle a boosté les économies des autres pays auprès desquels elle a commandé ces usines clés en main, ou produits en mains. On ne peut oublier le formidable essor de la construction d’habitat, des routes, des universités, des écoles et lycées, des hôpitaux. En clair une formidable croissance par la dépense publique. L’Algérie s’est lancée dans les modernisations de ses structures étatiques, des collectivités nationales et la mise en valeur de ses régions.

 

Cette phase de croissance de l’économie algérienne s’est accompagnée d’une formidable hausse de l’inflation dans le monde. On peut même dire que la hausse de l’inflation était prévisible en Occident, puisqu’il était le seul détenteur des principales monnaies internationales. Les Américains qui utilisaient la facturation des transactions pétrolières des pays d’OPEP en dollar pour obliger les pays d’Europe et le Japon à acheter massivement des dollars pour leurs importations pétrolières, et par ce biais, financer leurs déficits commerciaux, provoquaient, par cette hausse pétrolière, chez ces derniers, des déficits commerciaux. Certes la demande mondiale a augmenté, grâce au transfert du pouvoir d’achat aux pays pétroliers et à la monétisation des déficits américains, il demeurait pour les pays d’Europe qu’une alternative pour « dégonfler » leurs déficits commerciaux, en particulier énergétique. Seul moyen était de faire comme les Américains, utiliser la planche à billet. C’est ainsi qu’à travers les « changes flottants », le monde une guerre monétaire avec pour conséquence une « hausse de l’inflation à deux chiffres ». Les États-Unis émettaient des liquidités ex nihilo, les pays européens et le Japon émettaient à leur tour des liquidités ex nihilo et un équilibre s’opérait dans les fluctuations erratiques des taux de change. S’il n’y a pas eu de krach de monnaie, l’inflation mondiale par les prix a fortement augmenté.

 

En 1979, le système financier mondial avec le deuxième krach pétrolier – celui-ci était nécessaire pour l’absorption des masses de dollars émises par la Fed américaine –, et le danger d’explosion par la hausse de l’inflation qu’il faisait peser sur l’économie mondiale, rendait à terme le système financier international ingouvernable.

 

C’est ainsi que la Banque centrale américaine prit deux décisions majeures pour combattre l’inflation. Augmenter le taux d’intérêt directeur à court terme, il est passé brusquement de 10 % à 20 %. Il a baissé sensiblement puis de nouveau il a remonté de nouveau. Et ces mesures prises se sont opérées entre 1979 et 1982, provoquant une forte récession économique aux États-Unis. La deuxième décision de la Fed a été de diminuer les émissions monétaires, provoquant un gap du dollar. C’est ainsi que le dollar fort a eu des conséquences graves sur les économies européennes. Le prix du pétrole n’était pas à 36 dollars le baril mais beaucoup plus, à 72 dollars le baril, en 1985, au taux de change constant de 1979.

 

La hausse du taux d’intérêt américain a été une catastrophe pour le reste du monde qui s’est trouvé brusquement frappé par l’endettement. Les pays d’Afrique, d’Amérique latin et dans de nombreux pays en Asie qui se sont endettés à des taux très faibles dans les années 1970 auprès des pays occidentaux, mais contractuellement à des taux variables, se sont retrouvés du jour au lendemain « fortement endettés ». C’est ainsi qu’avec la crise de solvabilité des pays endettés, le Fonds monétaire international s’est trouvé une nouvelle mission. Par le biais du rééchelonnement, les Occidentaux ne pouvant plus percevoir les remboursements, le FMI a eu cette tâche d’aider financièrement les pays en défauts de paiement mais en restructurant leurs économies. Donc toute aide financière est soumise à des conditionnalités.

 

Et quoi que l’on dise, aujourd’hui avec le recul, la reprise économique et les progrès que ces pays ont opérés sur le plan macroéconomique, non seulement les conditionnalités du FMI ont été nécessaires pour l’assainissement financier, mais ces pays ont beaucoup appris dans la gestion de leurs finances.

 

Toujours est-il que si l’Algérie continue à croître avec la première phase d’expansion, celle-ci se terminera en 1985. En effet, les cours pétrolier continuent d’être élevés cette année, mais en 1986, les cours du pétrole chutent, et atteignent 10 dollars le baril. C’est le contrechoc pétrolier, la conjoncture pétrolière se retourne et commence la phase de contraction de l’économie algérienne. 

 

  1. La phase de contraction du premier cycle économique en Algérie de 1986 à 1998

 

 Si l’Algérie a échappé à la crise d’endettement, au début des années 1980, elle commencera à son tour, à ressentir les effets de la dépression économique qui a suivi le retournement de la conjoncture pétrolière.

 

Cependant, on est en droit de s’interroger comme le contrechoc pétrolier a surgi en 1986 ? Si les chocs pétroliers sont aisément compris compte tenu de l’obligation des États-Unis de financer ses déficits commerciaux par le reste du monde, dont l’Europe qui a refusé et s’est mise aux changes flottants, le contrechoc pétrolier de 1986 est certainement motivé économiquement. La crise d’endettement a opéré des ravages dans le reste du monde. La demande mondiale en Europe, au Japon et surtout dans le reste du monde s’est fortement affaissée. Par la hausse des taux d’intérêt, les États-Unis ont siphonné une grande partie des liquidités en dollars en circulation dans le monde. L’inflation mondiale a fortement baissé. Par conséquent maintenir des cours pétroliers élevés ne ferait qu’asphyxier encore plus l’économie mondiale. Donc creuser des déficits commerciaux dans les pays du reste du monde (Afrique, Amérique du Sud, Asie), et le recours incessant du FMI pour les pays en cessation de paiement de la dette, et la pénalisation de l’Europe, du Japon et des nouveaux pays industrialisés en Asie par un prix du pétrole élevé et la contraction de leurs exportations vers les pays du reste du monde.

 

Le contrechoc pétrolier de 1986 s’avérait donc une mesure salvatrice pour relancer l’économie mondiale. Mais c’était déjà trop tard, par l’endettement mondial qui a fait régresser fortement l’absorption mondiale, le mal était déjà fait.

 

Un paradoxe cependant par ce que renferme ce contrechoc pétrolier. Peut-on dire que la crise pétrolière qui a débuté en 1986 comme d’ailleurs la crise d’endettement des années 1980 ont été négatives pour l’Algérie comme pour le reste du monde, comme même pour l’Occident ? Elles l’étaient certainement compte tenu des émeutes du pain, de la semoule, dans les pays d’Afrique, dans le monde arabe, d’ailleurs l’Algérie n’en échappera pas, avec ses cohortes de victimes, de morts, de blessés par balles, la paupérisation des masses populaires, mais malheureusement c’est le prix à payer pour les peuples pour qu’ils avancent.

 

L’histoire de l’humanité n’est pas une existence en sinécure, c’est un combat perpétuel pour l’existence depuis la nuit des temps. L’homme ne se sentant vivre qu’en luttant pour sa vie, et on comprend le sens des guerres, des crises, et les sacrifices des peuples.

 

Pour cause, l’Algérie, dans cette phase dépressive, a été aussi touchée par les stratégies de déstabilisation menées par les États-Unis pour dominer le monde. L’utilisation des mosquées par le duo États-Unis-Arabie saoudite depuis le premier choc pétrolier et l’islamisme dans ce qu’on a appelé une « ceinture verte », dans les années 1980, pour protéger les gisements pétroliers arabes, et devaient compenser l’affaiblissement des États-Unis face aux avancées soviétique en Asie centrale. Le danger concernait essentiellement les gisements pétroliers et tout rapprochement de la puissance adverse, l’ex-URSS, mettait en péril les acquis américains dans cette région centrale du monde.

 

C’est ainsi parallèlement aux guerres qui faisaient rage en Afghanistan, en Iran, en Iran, au Liban, des guerres pour ainsi dire par procuration, et les coups de boutoir d’Israël pour profiter de la situation et s’agrandir avec ce concept fou le « Grand Israël » alors que la population juive n’était que de 4 millions en Israël (source Banque mondiale).

 

En Algérie, aussi naissait un mouvement islamiste, et prenait progressivement de l’ampleur, aidé certainement par la gabegie du système de gouvernance algérien. Avec les richesses pétrolières, sans contre-pouvoir pour contrôler les finances publiques, la situation devenait, en plus de la crise économique, erratique, compte tenu de la corruption et des détournements à des deniers publics à grande échelle. Le système politique et économique était ce qu’il était et relevait d’une phase historique que le pays devait absolument traverser Et la corruption n’a pas cessé encore aujourd’hui, et cela est dû au sous-développement. En clair, la corruption n’est pas une fatalité, elle disparaîtra ou diminuera fortement au fur et à mesure que son système politique, économique et social se développera et se démocratisera. Et c’est un cours que l’Algérie atteindra inéluctablement comme sont déjà passés les autres pays « avancés ».

 

Ce qui nous fait dire que la situation conflictuelle dans le monde, le retournement pétrolier mondial depuis 1986, le mouvement islamiste en Algérie et dans le reste du monde, qui vont rebattre les donnes dans le monde s’inscrivent dans le développement de son histoire et du monde.

 

Sur le plan géopolitique, les premières conséquences de la crise économique mondiale, majeure pour le développement ultérieur du monde, ont été la chute du Mur de Berlin, en 1989, la fin de l’existence de l’URSS en décembre 1991 et la dislocation de la Fédération de Yougoslavie en 1992. Une transformation d’une grande importance pour l’humanité puisqu’elle marque la « fin d’un monde bipolaire », et cette menace qui pèse sur le monde, le risque très fort d’une troisième guerre mondiale dans un monde bipolarisé.

 

Sur le plan géopolitique, la deuxième conséquence touche le Japon, dont l’économie subira une double crise boursière et immobilière en 1990, qu’il ressent encore aujourd’hui. Et même les quantitative easing dénommés « abénomics », dans les années 2010, ne concourent qu’en partie à la croissance économique du Japon. Elle touchera aussi les États-Unis qui entreront en récession en 1992, et l’Europe qui entre en récession en 1993.

 

Pour l’Algérie, la situation économique était catastrophique à la fin des années 1980. Tant sur le plan politique que sur le plan économique. Les émeutes des d’octobre 1988 allait changer complètement le cours de l’histoire algérienne. En effet, les limites du système politique socialiste sont atteintes. Le socialisme en fait qui a commencé bien n’était qu’une « illusion économique », cependant il était un passage obligé pour ces pays.

 

Tant que l’économie tient, le socialisme tient. Mais précisément l’économie relève des aléas de l’histoire et des avancées des peuples. Et les émeutes d’octobre qui surgissent pratiquement du néant vont donner le déclic au pouvoir en place d’ouvrir une nouvelle page de l’histoire. Le lourd bilan des manifestations qui se compte en plusieurs centaines de morts et de blessés, et pour prévenir d’autres émeutes, du fait même qu’il n’y a pas de solution économique qi permettrait d’acheter la paix sociale.

 

Par conséquent seule la promesse d’une ouverture politique et économique était susceptible de calmer le peuple. Approuvé par référendum le 23 février 1989, la nouvelle constitution algérienne abolissait le système politique du parti unique. Son Printemps, elle va le vivre plus de vingt ans avant le Printemps arabe de 2011. Rapidement, avec le multipartisme décrété, plusieurs partis vont se constituer (FFS, FIS, PAGS, RCD.)... La liberté d’expression devient aussi une réalité à travers la libération de la presse. De nombreux journaux apparaissent. Les quotidiens El Watan, LE Matin, Liberté, El Khabar donnent un nouveau visage démocratique de l’Algérie.

 

Au final, grâce à la crise économique qui a suivi le contrechoc pétrolier, l’Algérie qui s’engage dans un processus de démocratisation certes balbutiant encore, reste un cas unique, que n’a vécu aucun pays du monde arabe. C’est dire l’importance de l’Algérie dans le concert des nations arabes et dans le monde. Tous les pays arabes regardent avec crainte le nouveau régime politique en Algérie, et la peur d’une contagion de ses avancées démocratiques dans leurs systèmes politiques.

 

Sauf que dans cette démocratisation de l’Algérie, des dérapages vont commencer et se terminer par une effusion de sang pendant plusieurs années. En effet, une décennie noire qui va commencer pour le peuple algérien en prise avec le terrorisme islamique. Un processus s’inscrivant dans cette « ceinture verte stratégique », pensée par le duo États-Unis-Arabie Saoudite, et dont le peuple en sortira victorieux.

 

Sur le plan économique, après des restructurations, le FMI fit son passage en Algérie, comme il le fit dans d’autres pays. En 1994, un accord dit « stand-by » a été scellé avec les autorités financières algériennes. Le dinar dévalué à 40,17 % de sa valeur, une restructuration drastique de toute l’industrie publique avec liquidation et privatisation des entreprises pour la plupart déficitaires, les chiffres en Algérie donnent environ 400 000 salariés (mis à la retraite ou indemnisés) ont été mis au chômage. La situation était très précaire au double plan économique et politique. Si des succès étaient remportés contre le terrorisme islamique, la situation économique risquait d’hypothéquer toute sortie de crise.

 

  1. La période critique de la phase de contraction du premier cycle économique en Algérie

 

 Nous arrivons à la période critique de la phase de contraction du premier cycle économique de l’Algérie post-indépendante. L’accord Stand by signé avec le FMI en en avril 1994 était inévitable, le service de la dette allait absorber la totalité des recettes d’exportations d’hydrocarbures. Par conséquent, l’Algérie ne pouvait que se plier aux conditionnalités du FMI. Les autorités algériennes n’avait plus de choix, il fallait faire sauter le tabou tenace qui concernait le rééchelonnement de la dette extérieure.

 

Le terrorisme islamique frappant l’Algérie, les usines tournant au ralenti, les opérations de liquidation en cours d’une partie importantes des entreprises productives et commerciales publiques, le plan de stabilisation macro-économique (qui devait corriger les politiques monétaires passées) offrait une bouffée d’oxygène puisqu’il donnait voie à de nouveaux financements des institutions internationales et, en outre différait les remboursements des autres composantes de la dette extérieure (Clubs de Paris et de Londres). Il restait à « savoir » la dévaluation de 40,17 % du dinar par rapport au dollar en avril 1994 si elle allait suffire pour combattre le taux d’inflation qui était élevé.

 

Et manque de chance pour l’Algérie, des événements négatifs extérieurs que l’on peut appeler des « forces exogènes » vont influer négativement sur l’économie algérienne. Trois crises successives vont impacter l’économie mondiale, durant la décennie 1990. La crise « téquila  » mexicaine en 1994, la crise asiatique de 1997 et la crise russe et brésilienne en 1998. Ces crises, compte tenu de la dépression économique en Asie, en Russie et au Brésil, et donc de la fuite ou plutôt du retour des capitaux vers l’Europe et les États-Unis, qui s’accompagnent d’une baisse de la consommation pétrolière dans le monde, vont amener la Banque centrale américaine (Fed) à freiner les émissions monétaires ex nihilo en dollar.

 

La conséquence ne se fait pas attendre, le prix du baril de Brent descend à moins de 10 dollars fin 1998. Pour l’Algérie c’est la catastrophe. La dette extérieure s’élevait à 30,473 milliards de dollars, en 1998. (Projet de Rapport de la Conjoncture économique du Second semestre 1998. CNES Algérie mai 1999 (page 51)) A cette époque, le président Liamine Zéroual démissionnait.

 

Il est évident que si le prix du pétrole ne se relève pas, l’Algérie aura beaucoup à en souffrir. Tous les succès qu’elle a enregistrés dans la lutte antiterroriste risquaient d’être vains. Il faut rappeler que les exportations d'hydrocarbures représentent environ 97 % de la totalité des exportations algériennes, et le secteur industriel pèse moins de 5 % du PIB. Une telle situation des prix pétroliers de l’économie ne laisse aucune marge pour le pays à s’en sortir. Telle est la malédiction du pétrole qu’a un pays de dépendre que des revenus pétroliers pour financer son économie, et assurer ses importations.

 

Mais alors d’où va venir le miracle pour redresser les prix pétroliers et permettre à l’Algérie de sortir de cette mauvaise passe que vit son économie et qui pourrait bouleverser son devenir ? Évidemment, la théorie économique telle qu’elle est enseignée en Europe, aux États-Unis, et partout en Occident, ne parle pas des forces exogènes dans un système économique ni de la dynamique métaphysique de sa structure.

 

Pour avoir une idée tant de l’unicité que de la rationalisation d’un système économique ou autre, prenons l’exemple le plus visible, le plus manifeste chez l’homme, l’œil. Qu’est-ce que l’œil ? C’est l’organe de la vision de l’être humain. Cet organe est essentiel dans la prise de réalité du monde immédiat, proche et lointain. C’est lui qui permet à l’homme d’agir, d’analyser, d’interagir avec son environnement. L’aveugle ne le peut pas, il a besoin d’être soutenu, d’être accompagné. Sans l’aide d’un autre être qui voit, l’aveugle ne peut pas vivre. Et pourtant l’aveugle pour vivre, pour exister, a besoin de l’autre qui voit pour le guider. Et celui qui voit a besoin de ses yeux qui voient pour vivre, pour exister. Et qu’est-ce que cet œil miraculeux que la « Nature a prêté à l’homme », et il faut le souligner « prêté à l’homme » pour qu’il voit ? Un organe contenu et si bien agencé dans son corps, que l’on peut dire que toute cette miraculeuse constitution, et l’œil n’en est qu’une partie, qui fonctionne admirablement, n’en fait de l’homme que le « véhicule » et aussi l’« actionneur » de cette formidable machine humaine. Et l’homme n’est pas conscient de cette machine qui est en lui.

 

Dès lors la machine économique mondiale, à l’instar de la nature-monde, reflète en elle tant de l’unicité qui est présente en elle que tout ce qui la rationalise dans son évolution. Il ne peut être autrement, la seule difficulté est que l’homme perçoit peu dans cette complexité phénoménologique de l’évolution du monde. Aussi, peut-on dire que si la phase de contraction du premier cycle économique de l’Algérie reste dans cette note catastrophique des cours pétroliers, qui est extrêmement négative pour sa stabilité politique et sociale, il demeure que l’espoir est permis pour elle puisque l’année 1998 qui a vu le cours de pétrole baisser à moins de 10 dollars va justement marquer la fin de cette phase. Et ouvrir une nouvelle phase d’expansion du 2ème cycle économique pour l’Algérie. Et que des « forces exogènes » vont traduire dès 1999. 

 

  1. Le miracle dans la phase ascendante du 2ème cycle économique de l’Algérie post-indépendance

 

 En revenant au miracle qui va sauver l’Algérie d’une débâcle économique et d’une souffrance sociopolitique qui sera inévitable, si le prix du baril de pétrole serait resté bas dans la décennie 2000, quel sera-t-il ? La réponse viendra de l’Europe ! Elle procèdera au lancement de la monnaie unique en janvier 1999. Mais pourquoi la monnaie unique européenne qui n’a rien à voir avec la difficile conjoncture algérienne en 1998 ? Pourtant c’est elle qui va changer la conjoncture dans un premier temps, et un autre événement tout aussi majeur qui viendra renforcer la conjoncture favorable pour l’économie algérienne.

 

Dès le lancement de l’euro, le 4 janvier 1999, tous les marchés financiers des onze pays de l’Union économique et monétaire (marchés de change, marchés boursiers et marchés dérivés) basculés irrévocablement en euros. Trois jours après, le 7 janvier 1999, Keizo Obuchi, le Premier ministre japonais, viendra lui-même en Europe saluer l'heureux événement, « l'entrée de l'euro dans l'économie mondiale », laquelle va ouvrir de nouvelles perspectives et de nouveaux horizons à l’ensemble de l'humanité. A Paris comme à Rome et à Francfort, le Premier ministre propose déjà que le yen devienne, avec le dollar et l’euro, le troisième pilier d'un nouveau système monétaire international.

 

A son entrée en lice sur le marché monétaire, l’euro en haussé reflétait la bonne santé de l'économie européenne, la baisse du prix du baril de pétrole compris en moyenne dans une fourchette de 10 dollars en février 1999 à 14,5 dollars en avril 1999 sera conjugué à ce suc­cès. Mais, dès avril 1999, l'envolée du cours du prix du baril de pétrole comme le glissement continu à la baisse de la nouvelle monnaie européenne, l'« euro » par rapport au dollar, viendra déchanter les Européens, et l'euphorie qui a prévalu au tout début de l'avènement de l’euro, fera place à la morosité.

 

Ce retournement de situation avec ces deux contraintes majeures sera un indice suffisant pour montrer l'âpreté de l'opposition que mènent les tenants de l’ordre monétaire mondial. D'où une guerre sourde et sournoise qui opposera les deux grands pôles de l’Occident, i.e. les États-Unis et l’Europe. D’autre part la monnaie commune de onze pays est ouverte, donc en attente que d’autres pays de l'Union européenne rejoignent cette puissance monétaire. Le conflit à cette période avec les États-Unis est bien plus une remise en cause du statut de la monnaie américaine, le dollar, et, à moyen terme, le partage des privilèges de cette monnaie-centre avec l’euro.

 

Si, dès son entrée sur le marché monétaire international, les investisseurs internationaux ont semblé décidés à acquérir des actifs libellés dans la nouvelle monnaie qui offrait une alternative aux placements en dollar, à tel point que cela n'a pas cessé d'inquiéter les autorités monétaires soucieuses de prévenir une trop rapide appréciation de la devise européenne qui pénaliserait la zone en rendant plus chers les produits d'exportations. Mais cette euphorie sera de courte durée, après avoir atteint des niveaux élevés, à sa naissan­ce, la monnaie européenne n'aura de cesse depuis de se déprécier.

 

En juillet 1999, l'euro va encore osciller autour de ses taux les plus bas face au dollar, de 1,182 à sa naissance à 1,0161 dollar le 10 juillet 1999. Tant que les tensions inflationnistes restaient faibles, la Banque centrale européenne (BCE) n'avait pas de raison de relever le taux directeur dans la zone euro, fixé à 2,5%. Cette situation contrastait avec celle des Etats-Unis où la Réserve monétaire (FED) a relevé d'un quart de point, à 5%, le niveau du loyer de l'argent en juin 1999, afin de contenir une trop forte hausse des prix à la consommation. Et après plusieurs hausses, le taux d’intérêt directeur de la Fed atteindra 6,5 %, en 2000. Quant à la BCE, le taux d’intérêt directeur atteignait 4,75 % en 2000.

 

Et on comprend pourquoi, par le seul fait du différentiel des taux d’intérêt, donc plus attrayants pour le dollar, les capitaux étaient attirés vers les États-Unis au détriment de la zone euro. Et les Américains, depuis longtemps, financent leurs déficits courants en empruntant des dollars à l'étranger, ces mêmes dollars qu'ils émettaient. De plus l’augmentation ou la restriction du volume de la masse monétaire ne dépend que de la décision américaine. L’impact, on s’en doute bien, c’est l’action indirecte sur les fluctuations des cours de change monétaires internationaux, et par ricochet sur les cours boursiers ainsi que des biens immobiliers et des matières premières, et donc sur toute l'économie mondiale.

 

La situation devenait complexe, la donne pétroliè­re avait aussi fait irruption sur la scène économique mondiale. Les prix à l’importation lit-on dans le quotidien français Le Figaro économie du 22 août 2000 : « Au moins 20% ! C'est l'augmentation des prix à l'importation dans la zone euro en avril, puis en mai 2000. En annonçant cette hausse impressionnante, la Bundesbank l'a attribuée à la flambée des prix du pétrole, mais aussi à l'érosion continue de la valeur de l'euro. La monnaie unique a perdu face au dollar 23% de sa valeur du 1er janvier 1999. Le 11 août 2000, l'euro est descendu jusqu'à 0,9022 dollar, se rapprochant de son plancher historique 0,8907 dollar. »

 

On peut comprendre que ce qui importe pour les autorités monétaires de la zone euro est avant tout la diffusion de la monnaie unique, l'euro, dans les différentes Banques centrales du monde. Ce processus est évidemment long et justement les stratèges européens visaient le facteur temps pour asseoir la monnaie unique en monnaie de réserve voire en une unité de compte internationale. Et c'est précisément là où entre la stratégie des États-Unis qui est de faire barrage à la monnaie unique. Il est donc hors de question que l’euro s'implante dans les Banques centrales en quantité importante.

 

La donne pétrolière va jouer un rôle important dans la guerre monétaire qui se jouait entre les États-Unis et l’Europe. En mars 1999, le prix du baril de pétrole atteignait 14 dollars. En août 1999, il était à 20 dollars, en janvier 2000, à 26 dollars, en septembre 2000, à 33 dollars.

Dans un journal algérien, le « Liberté économie » du 26 juillet au 1er août 2000, dans un entretien avec M. Lorenzo Sanchez, ambassadeur, chef de la délégation de la commission européenne « Algérie-Union européenne : un accord d'association en 2001 », on lit :

Entretien :

Question de l’hebdomadaire économique « Liberté économie » :
La monnaie d'échange dans le bassin méditerranéen sera-t-elle l’euro ? Qu’est-ce que les pays tiers méditer­ranéens auront à gagner en adop­tant la monnaie unique de l’Euro­pe ?
M. Lorenzo Sanchez :
« La monnaie européenne est appelée à devenir une monnaie solide. Sa gestion par la Banque centrale européenne se fera d'une façon orthodoxe. Ce sera une monnaie stable, d'où l'intérêt de son adoption par les pays du bassin méditerranéen. Cette stabilité offrira la sécurité face aux fluctuations des autres monnaies et donnera confiance aux opérateurs économiques. Elle pourra également servir de monnaie de réserve dans les banques centrales des pays tiers méditerranéens. L'intérêt de l’euro, c'est la stabilité dans les transactions commerciales. Je pense que la monnaie européenne aura dans le futur une place considérable dans les transactions internationales. »

Liberté-économie :
Quel est l'en­jeu pour les pays européens ?
M. Lorenzo Sanchez :
« C'est de concurrencer le dollar et mieux maîtriser notre inflation. Nous avons en ce moment en Europe des problèmes d'inflation à cause de la dévaluation du dollar et du fait que nos importations de pétrole soient libellées dans cette monnaie. A l'avenir, nous espérons qu'une partie de ces importations de matières premières énergétiques soient facturées en euro. Ce qui donnerait beaucoup plus de stabilité à nos économies. En plus, si l’euro sert de monnaie de réserve dans les banques centrales des pays du bassin méditerranéen et qu'il est utilisé dans les transactions commerciales internationales, nous aurons le même privilège que les Etats-Unis aujourd'hui, qui, grâce au dollar, font face aux déficits commerciaux énormes et à l'endettement - c'est le pays le plus endetté au monde - justement par cette capacité qu'ont les Etats-Unis de renvoyer chaque année leur déficit commercial au reste du monde. »

 

Au vu de ce qui précède, on comprend dès lors que les États-Unis n’avaient pas d’autre parade pour faire rempart à la nouvelle monnaie européenne que de lui faire « barrage » ou lui « créer des problèmes ». Ce qu’expliquait le différentiel des taux d’intérêt plus fort pour la FED que pour la BCE, afin d’attirer les capitaux européens et convertis en dollars ne ferait, par la masse des euros qui augmentait sur les marchés, que déprécier l’euro. De même la forte hausse des prix pétroliers en 2000, alors que durant toutes les années 1990, ils étaient bas et évoluaient en moyenne autour de 17 dollars le baril, et l’OPEP ne pouvait rien faire pour redresser le prix de pétrole. Il fallut attendre que la guerre monétaire éclate entre les États-Unis et l’Europe, dès 1999, pour faire redresser le prix du pétrole.

 

Et l’Algérie va précisément, grâce à cette « guerre monétaire intra-occidentale », bénéficier de cette « hausse miraculeuse du pétrole ». On sait très bien que le pétrole des pays arabes qui sont majoritaires au sein de l’OPEP, et imposé le libellé des transactions pétrolières en dollars à tous les pays-membres, obligera les institutions économiques et financières européennes à rechercher plus de dollars pour leurs achats de pétrole. La monnaie unique n'y peut rien, sinon à se déprécier davantage. On comprend que cette donne va profiter doublement, tant aux Américains qu’aux pays producteurs de pétrole. Et surtout que les excédents pétroliers, en grande partie, non consommés par les pays producteurs de pétrole, dont l’Algérie, et qui constituaient en somme les « réserves de change », sont investis dans les places financières américaines, en bons de Trésor généralement (fonds souverains). Ces excédents conjugués aux autre flux financiers étrangers permettaient de financer les déficits de la balance des paiements américaine.

 

Le deuxième « facteur exogène », celui-ci est simple, c’est la fuite en avant des États-Unis contre l’Irak en 2003. Les déficits courants américains vont exploser, ils nécessiteront des liquidités considérables émises ex nihilo par la Fed américaine. Donc la « planche à billet » va travailler à fond ce qui nécessiterait pour pondérer la dépréciation du dollar américain durant toute la guerre menée au Moyen-Orient, contre l’Irak et l’Afghanistan, une hausse élevée et continue du prix du pétrole. Le prix du baril de pétrole atteindra, au plus haut de la crise financière à l’été 2008, le sommet historique de 147 dollars le baril, et l’euro s’échangeait à 1,60 dollar. C’est dire la formidable création monétaire aux États-Unis durant ces années de crise et de guerre.

 

  1. Conclusion de la première partie

  Cette première partie de cette étude prospective est intéressante dans le sens qu’elle essaie de montrer que l’économie algérienne n’est pas livrée à des forces erratiques, incohérente, dépendant du hasard. Non, elle a une unicité très claire dans sa marche dans l’histoire du monde. Et les cycles économiques montrent non seulement que l’économie est non seulement reliée, mais fait partie et surtout dépendante de l’économie mondiale. Et réciproquement puisqu’elle participe aux économies des grandes puissances. Par le libellé monétaire en dollar, par les réserves de changes qui se trouvent investies en fonds souverains aux États-Unis, par ses exportations pétrolières pour les consommations industrielles et domestiques occidentales et non occidentales, et bien entendu par ses importations.

 

Ceci, étant, l’étude du cycle économique en Algérien est très intéressante dans la mesure où il permet d’évaluer la distance parcourue dans le cycle tant dans sa phase ascendante que dans sa phase descendante. Il permet aussi en lien avec les forces extérieures dites « exogènes » de cibler l’évolution économique mondiale et cibler aussi sa propre évolution dans les désordres économiques, financiers t monétaires qui, en fait, ne sont qu’apparents. En réalité, il y a une marche très rationnelle de l’économie mondiale.

 

Et précisément, nous aurons à le montrer dans la phase ascendante qui a commencé en 1999 et s’est terminée en 2014. Avec les crises successives entre 2000 et 2009. Des valeurs technologiques en 2000, la récession aux USA en 2001, l’attentat du 11 septembre 2001 contre le contre le World Trade Center (WTC), les crises boursières en cascades 2002-2003, la crise immobilière de 2007, la crise financière mondiale de 2008, la récession généralisée pour tous les pays occidentaux en 2009.

 

Nous tenterons de montrer que la fin de la phase ascendante, avec la fin des quantitatives easing QE1, QE2, QE3 et l’opération twist, était, non seulement, avec le recul, prévisible mais nécessaire. Il y a avait de grands déséquilibres macroéconomiques entre les Pays occidentaux et les pays émergents et exportateurs de pétrole, qui rendaient la situation de le compense mondial intenable.

 

Dans l’étude prospective du deuxième cycle économique de l’Algérie, nous tenterons de développer les réalisations économiques dans la phase ascendante, allant de 1999 à 2014, faire ressortir pourquoi la phase de contraction qui a suivi dès 2014, était nécessaire, nonobstant la fonte des réserves de change de l’Algérie et la décélération économique en Algérie. Que cette phase de contraction était aussi salutaire pour le monde, en particulier pour l’Occident qui était asphyxié par la crise économique et financière de 2008, et par la dette publique montante. Et que cette phase de contraction n’était pas destinée par les « forces exogènes  » seulement à l’Algérie, à l’ensemble des pays hors-Occident, dont les pays importants, i.e. les pays émergents Chine, Russie, Brésil, Inde et Afrique du Sud (BRICS) et les pays exportateurs de pétrole qui ont accumulés des réserves de change faramineuses provoquant un déséquilibre mondial. 

 

La fin de la phase de contraction dans le deuxième cycle économique en Algérie se situera à l’horizon 2022-2023, selon l’analyse que l’on aura à développer. Et certaines prédictions du FMI le confirment déjà, le prix du pétrole évoluera autour de 55 à 60 dollars dans les cinq années qui viennent.

 

Par conséquent, le troisième cycle économique qui commence à cette date et dont la phase d’expansion débutera à cette date, en 2023, et que l’on projette de même, à sa suite, une phase de contraction qui peut aller jusqu’en 2035, ou autour de cette date, et ce en regard qu’il n’y aura pas de guerres monétaires en perspective, comme ce qui s’est passé avec l’euro, ni de guerres chaudes comme en Irak, en Afghanistan et en Syrie.

 

Pour le premier point, i.e. les guerres monétaires, le yuan chinois est devenu une monnaie internationale depuis 2016 et n’a pas posé de problèmes majeurs. Elle est la cinquième monnaie avec le dollar, l’euro, le yen et la livre sterling dans le panier e monnaie du FMI qui détermine les droits de tirages spéciaux.

 

Pour le second point, les guerres chaudes, les États-Unis en recul sur le plan géostratégique et militaire dans le monde, plus isolationniste aujourd’hui, l’étude prospective ne projette pas de guerres chaudes comme ce qui s’est passé avec l’administration Bush en Irak, en Afghanistan, de même, sous la présidence d’Obama, avec la crise syrienne qui, aujourd’hui, depuis l’entrée de la Russie, dans le conflit en septembre 2015, est en voie de solution.

 

Par conséquent, le troisième cycle économique qui doit être étudiée à la lumière de ces changements dans le monde et des mesures protectionnistes prises par les États-Unis vis-à-vis de l’Europe, de la Chine, du Canada, du Japon et du Mexique, et des accords qui ont découlé déjà avec le Canada et le Mexique, et ceux non encore résolus avec les autres partenaires commerciaux. Surtout la Chine avec qui les négociations, après plusieurs rounds, sont encore en cours. De même, il faut prendre en compte les politiques non conventionnelles de la Fed américaine et de la Banque centrale européenne, et de ce qu’il en sort dans les années à venir. Et tout laisse prévoir que les quantitative easing américain et européen, y compris des trois autres puissances monétaires (Chine, Royaume-Uni et Japon), reprendront à l’horizon 2023.

 

Compte tenu aussi du niveau d’endettement des pays occidentaux qui est très important pour un grand nombre de pays proche de 100 %. Seule l’Allemagne, son taux d’endettement a diminué est passé de 80,9 % en 2010 à 64,1 % en 2017. L’endettement de la France par contre a augmenté, passant de 85,3 % en 2010 à 97 % en 2017.

 

Medjdoub Hamed
Chercheur spécialisé en Economie mondiale,
Relations internationales et Prospective
www.sens-du-monde.com


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