Qu’est-ce qu’il nous arrive ? L’étrange défaite

par Breton8329
samedi 20 mars 2021

La situation de la France n’est pas brillante. Le monde est engagé dans une course aux ressources mais la France semble l’ignorer. L’histoire de l’humanité est un combat de dominants et de dominés et la France, qui faisait partie du premier groupe, ce qui lui a permis d’assurer un confort inouï à ses citoyens, bascule dans le second.

En assurant l’exploitation directe des matières premières, selon l’équation bien connue un légionnaire, un missionnaire, un fonctionnaire et un percepteur, le modèle colonial avait permis d’amorcer la pompe à richesse avant d’atteindre un rendement maximum bridé par l’augmentation exponentielle de ses coûts de fonctionnement. A la fin de l’époque coloniale, les bénéfices servaient surtout à assurer le train de vie des trop nombreux Français des colonies et à financer des investissements locaux demandés par les fonctionnaires ; ce n’était pas vraiment le plan initial. Ce modèle avait alors été remplacé par un modèle néocolonial plus performant, fondé sur le percepteur et le légionnaire, c’est-à-dire la mise en place et le maintien au pouvoir d’un homme de paille chargé tout d’abord d’endetter son pays puis d’obtenir le paiement des intérêts par sa population, de garantir l’accès aux matières convoitées, voire – cerise sur le gâteau – de garantir l’ouverture du marché local ; en échange de ce service, le légionnaire assurait sa pérennité en le défendant contre d’éventuels opposants, la police choyée assurant sa protection contre les populations. Le missionnaire avait été prié de rentrer chez lui puisque son dieu avait été remplacé par la dette toute puissante et les activités du fonctionnaire ont été remplacées par les conseils avisés d’organismes bien intentionnés comme le FMI, qui à travers ses mesures d’ajustement structurelles (réduction des services sociaux et en particulier l’accès au soin et à l’enseignement), s’assurait que l’essentiel de la richesse produite serait bien orientée vers le paiement des intérêts et que les forces de police seraient toujours en nombre suffisant pour que le légionnaire n’ait pas à bouger de sa caserne, sauf cas de force majeure. Un modèle incroyablement perfectionné, qui a permis d’extraire la substantifique moelle des néo colonisés à moindre coût.

Mais voilà, les modèles trop performants font des jaloux et l’Occident, qui se croyait unique sur le marché de l’exploitation humaine, fait désormais face à une concurrence redoutable, parfois moins gourmande, avec l’arrivée d’autres acteurs qui veulent leur part du gâteau. Les hommes de paille ont de plus en plus de mal à résister à la pression de leur population choyée par une Chine qui a rapidement compris la faille du modèle : le légionnaire. La cupidité des maîtres de notre système d’exploitation a entraîné une optimisation des coûts qui a réduit les capacités du pauvre légionnaire à un niveau de crédibilité ridiculement bas, à tel point que l’homme de paille a souvent bien plus à craindre de sa population, pour peu qu’elle soit unie, que du légionnaire. Et les Chinois savent y faire pour créer l’unité des populations au service de leurs intérêts. Moins gourmands que les Occidentaux, en apparence tout au moins, leurs efforts se concentrent sur les services sociaux, les infrastructures utiles, avec bien entendu la même contrepartie : l’accès aux ressources et l’ouverture du marché. Simplement, les Chinois ont remplacé le légionnaire par un fonctionnaire moins coûteux et ont transféré les économies réalisées vers le financement des infrastructures au service de la population locale. Magique car cela fonctionne. Mais les Chinois ne sont pas les seuls. Moins subtile, la Turquie revient dans le jeu avec un modèle purement colonial dont on connaît d’ores et déjà le résultat, puisque nous sommes passés par là. Quant à la Russie, gavée de ressources sur un territoire qu’elle ne parvient déjà pas à exploiter, elle semble surtout occupée à jouer les trouble-fêtes en contrariant l’Occident partout où il pourrait avoir des intérêts stratégiques, c’est-à-dire un accès à des ressources vitales pour développer son modèle. Lorsqu’on est un réservoir convoité, la seule stratégie de défense est d’empêcher ses adversaires de devenir trop confiants. Mais la Russie sait probablement qu’elle doit trouver des alliances si elle ne veut pas elle-même finir au « menu » de la Chine.

Chacun aura remarqué que la France n’apparaît nulle part dans ce paysage. Ni l’Europe du reste. La Grande-Bretagne y a sa place. Elle aussi court après les ressources. Sa décision de muscler sa « défense » montre qu’à l’évidence, elle s’achemine vers un modèle légionnaire-dette, cohérent avec sa puissance financière et avec son histoire. Sur les 192 pays que compte le monde, il se trouvera certainement quelques hommes de paille pour accepter le deal avec le diable de la finance. L’amour de la patrie n’est pas toujours la principale qualité des dirigeants et quand bien même, ils sont remplaçables ; le MI6 a certainement de l’expérience en la matière. La France quant à elle fait partie d’un ensemble baigné par une idéologie qui réfute l’histoire, qui réfute l’idée même de loi naturelle, l’idée de domination et qui prenant acte de l’agitation ambiante, entend ramener tout le monde à la stabilité de l’ordre antérieur. Cela n’arrivera évidemment pas. Les agneaux qui négocient avec les loups finissent toujours par être dévorés. Il faut dire que la France, tout comme l’Union européenne, a été façonnée par les USA, puissance égarée, qui ne craignaient rien plus que la connexion entre les ressources russes et la technologie occidentale puisqu’une telle connexion aurait permis l’émergence d’une puissance capable de réduire leur hégémonie. Ils ont donc fait en sorte que cela n’arrive pas. Ce faisant, ils ont tué les perspectives d’avenir d’un continent qui ne dispose pas des ressources nécessaires au développement de son modèle.

Ayant perdu l’accès aux ressources en même temps que les recettes de son succès, la France réserve à sa population le même avenir que celui qu’elle réservait jadis aux populations colonisées. Dans ce monde, lorsqu’on ne veut pas être un chasseur, on devient inévitablement une proie. Les dirigeants du pays, mis en place par les liquidateurs, finissent la vente des biens de valeurs. Les Français n’ont toujours pas compris ce que sont ces créances contractées en leur nom pour faire face à la crise du COVID : il s’agit d’une créance sur le travail de leurs enfants, sur les actifs de valeur du pays et la finance sera en mesure de réclamer l’un et l’autre, probablement dans les prochaines années. Le signe annonciateur est le renforcement de la police et la réduction des dépenses sociales ; la France a basculé dans le modèle néo colonial. Chacun reconnaîtra l’homme de paille. Quant à la finance, elle a simplement basculé ses intérêts en Chine ; elle n’a plus besoin ni de la France, ni de l’Europe. Après la liquidation de l’un et l’autre, son défi consistera à mettre la main sur les ressources russes. Peut-être trouvera-t-elle quelque chose à faire en Amérique du Sud.


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