Quand un ministre dérape lourdement

par Imhotep
mercredi 17 février 2010

Ce qui m’étonne au plus haut point de ce pouvoir sarkozyaque c’est la facilité de défendre l’indéfendable et d’user d’amalgame, d’argument fallacieux et faux, aussi courts et définitifs que possibles. Ce qui m’étonne de ce pouvoir c’est cette accumulation de dérapages qui ne cessent de succéder les uns aux autres et dont on ignore lequel est le pire ou s’ils sont tous au-delà de l’acceptable. Ce qui ne cesse de m’étonner de ce pouvoir c’est la désinvolture et l’arrogance qu’il a de l’exercer. Ce qui m’horrifie de ce pouvoir c’est qu’il l’utilise à des fins personnels, communautaires et électoralistes. Ce qui me navre c’est qu’il soit encore au pouvoir.

 On se souvient que le Phare Etincelant (le propre d’un phare est de changer de direction d’éclairage à chaque seconde) avait annoncé qu’il ne ferait pas campagne tout en se précipitant pour offrir 2 milliards à la Corse pour l’éviter de basculer lors des régionales. Il continue ses voyages électoraux payés par la République et va se poser 4 heures à Haïti avec ses tireurs d’élites, ses 19 gardes du corps et peut-être un cocktail à 400 0000 €, avant d’aller en Martinique et en Guadeloupe (il pourrait prolonger à Vancouver où nos Français brillent - pas tous, le pauvre Joubert ne s’y fait pas, mais cela ne vaut pas la Chine où il pouvait ignorer la Géorgie et faite le gentil avec ces doux agneaux que sont ces empereurs du Milieu). La Guadeloupe nous y voici, nous y voilà.
 
Marie-Luce Penchard est ministre de l’Outremer après l’éjection bouc émissaire de Jégo qui, évacué manu militari, continue pourtant à brosser le Sarkozy avec de la brillantine. Elle est aussi la fille d’une certaine Michaux Chevry (comme quoi il n’y a pas que le prince Jean qui ait des avantages héréditaires) qui aime la justice (NouvelObs) : Elle est accusée de "favoritisme" et "détournements de fonds publics" pour un montant total d’environ 20 millions d’euros. Dans la mesure où une des personnes mise en examen dans ce dossier est toujours en détention provisoire, le procès devrait avoir lieu rapidement. Par ailleurs, Mechaux-Chevry doit comparaître devant le tribunal correctionnel de Paris dans le cadre d’autres affaires. […] En mai 2000, Lucette Michaux-Chevry a été poursuivie cette fois ci pour concussion, abus de confiance, faux et usage de faux.
 
Je sais, parler de la mère quand on veut parler de la file est un coup sous la ceinture, mais les faits reprochés à la mère ne sont pas non plus des pacotilles et il semble à l’UMP que la théorie du génie héréditaire ou de la délinquance dans les gènes soit appréciée et considérée comme scientifique et avérée. Je ne fais donc que me référer à la théorie officielle qui dirait : telle mère, telle fille. Mais je ne le dis pas, ni ne l’écris. Si je me fonde à la théorie opposée qui dit que tout est culture, alors je peux là aussi supposer que vivre dans ce monde peu glorieux peut imprimer un caractère et le mouler à la louche. La fonction crée l’organe, l’environnement le hors la loi. Mais si on prend un juste milieu théorique, alors on arrive au pire car les gènes et l’environnement font tout pour faire sortir l’enfant du droit chemin. Comme je ne suis pas savant, je ne tiens compte de rien, juste des faits qui sont symptomatiques de ce que devient notre pauvre pays, tout au moins de ce qu’est ce pouvoir qui détruit tout et en plus trouve des arguments pour défendre l’indéfendable.
 
 
Marie-Luce Penchard, donc ministre de l’Outremer, est également candidate UMP en 2è position pour les régionales en Guadeloupe. Il faut tout d’abord ne cesser de répéter qu’un ministre ne devrait en aucun cas être candidat car :
- c’est bafouer la séparation des pouvoirs
- c’est anti-démocratique car cela donne un avantage en notoriété et capacité de proposer qui rend inégal le combat électoral
- c’est incompatible avec le poste de ministre car c’est prendre du temps (rémunéré par la nation) sur le travail de ministre qui doit être extraordinairement prenant ne laissant aucune place à une autre activité.
 
Marie-Luce Penchard s’est exprimée hier lors d’un meeting UMP en Guadeloupe et a tenu ces propos tout simplement ahurissants et inadmissibles : « Nous en sommes à une enveloppe de plus de 500 millions d’euros aujourd’hui pour l’Outre-mer, et ça me ferait mal de voir cette manne financière quitter la Guadeloupe au bénéfice de la Guyane, au bénéfice de la Réunion, au bénéfice de la Martinique.
 
Parce que, même si je vis en Métropole, mon coeur est ici et restera ici, et je n’ai envie de servir qu’une population, c’est la population guadeloupéenne ! » 
Vous pourrez écouter sur le site rue89 cette déclaration, ce qui ne laisse aucun doute quant à cette retranscription.
 
 
On peut se demander comment en si peu de mots on peut dire autant de choses insupportables. Bien que ministre de l’ensemble de l’Outremer, la candidate UMP se permet de dire que l’ensemble de l’enveloppe budgétaire devrait être réservée à la Guadeloupe. Mais elle ne s’arrête pas à cette énormité. En plein débat sur l’identité nationale (en fin non nous sommes en queue de comète de ce débat noir et absurde) elle parle clairement d’une population, donc d’une scission de l’unité nationale, d’une population dont elle si proche que son cœur lui est entièrement acquis y compris quand elle est à Paris. Cela veut dire en clair qu’elle est incapable d’être ministre de la République, de l’ensemble du peuple français, de l’ensemble de l’Outremer, car elle ne se sent que Guadeloupéenne. Elle est donc prête pour une campagne électorale à considérer que sa position de ministre doit être sous l’influence de son lieu de naissance et de ses préférences partisanes. Cela va si loin qu’elle le dit avec assez de violence qu’il serait inacceptable que la Réunion, la Martinique aient quoi que ce soit. C’est proprement hallucinant.
 
Ce qui l’est encore plus, ou tout au moins à part égale, ce sont les réactions de soutien. On croit tout simplement faire de mauvais rêves. Elle même déclare : Marie-Luce Penchard ne s’exprimait donc pas en tant que ministre de l’Outre-mer. (…) Elle a toujours été attentive à séparer rigoureusement son engagement politique local et ses responsabilités ministérielles. » Mais on a bien sûr l’aboyeur en chef qui prend sa défense (Le NouvelObs) : "Il faut que le PS arrête ses mensonges généralisés et ses manipulations en tout genre pour détourner l’attention du bilan catastrophique de l’ensemble de ses présidents de région en matière de fiscalité, de sécurité et d’emploi !", selon le porte-parole Frédéric Lefebvre.
 
Et le gendre idéal, le Luc Chatel y va de soutien (Le Figaro)  : "Il ne faut pas sortir ces propos de leur contexte. Marie-Luce Penchard était auprès des Guadeloupéens en campagne électorale", a déclaré M. Chatel sur RTL. "Dans ses propos, elle n’était pas secrétaire d’Etat à l’Outre-Mer", a-t-il ajouté.
 
"Allez assister à des meetings de responsables politiques de toutes sensibilité dans leur département : vous verrez ce qu’ils disent de la façon dont ils se sont battus pour leur département, de tout ce qu’ils ont obtenu", a expliqué le porte-parole du gouvernement.
 
Voilà ce qui peut nous faire bouillir d’indignation. Non seulement ces UMP prennent la population pour des imbéciles ("Dans ses propos, elle n’était pas secrétaire d’Etat à l’Outre-Mer") mais ils utilisent des slogans qui permettent d’évacuer tout raisonnement par quelques mots qui font croire à une vérité immédiate. Et alors qu’est-ce que cela peut faire de dire qu’elle ne s’est exprimée qu’en tant que candidate ? Est-ce que cela ne rend pas pour autant ses propos scandaleux ? Ainsi ces politicards malhonnêtes détournent-ils le sens même de l’expression par un tour de passe passe comme si la nature du poste de la personne qui s’exprime, dans ce cas précis, changeait la nature exécrable des propos. Il s’agit bien d’une personne en tant que telle qui s’exprime et non la fonction. Le débat entre personne publique et personne privée n’est déjà pas clos, car la direction de la politique dépend évidemment du caractère et celui-ci n’est ni privé ni public, il est lié intimement à la personne. Maintenant il faut faire une distinction entre le poste de ministre et celui de candidat, la personne étant encore dans l’exercice de ses fonctions.
 
Ajouté à cela ce fameux contexte, comme si le contexte était tout alors que les propos sont suffisamment longs et clairs pour que le contexte n’y ait aucune part.
 
Et évidemment comme d’habitude, et aussi honteusement que d’habitude, ces Unis des Malhonnêtes Professionnels, excusent ces propos indéfendables par ceux de candidats adverses, comme si un meurtre pouvait être excusé par un autre.
 
Et je ne peux que sans arrêt me poser cette question : Que pensent-ils d’eux-mêmes avec ces mensonges et ces arguments d’une malhonnêteté rare ? Que pensent d’eux leurs proches ?
 
On peut se poser cette question : Dans quelle France vivons-nous ?
Vignette Wikipédia Guadeloupe
 

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