Quelle « école de la République » … pour les dirigeants ?

par Marcel MONIN
vendredi 19 novembre 2021

 

Quelle « école de la République » … pour les dirigeants ?

 

On est frappé par le fait que les dirigeants contemporains manifestent quelques difficultés intellectuelles à imaginer des solutions à des problèmes qui existent et qui empirent, ou qui surgissent hors du domaine dans lequel ils n’ont qu’à obéir mécaniquement à ce qui leur est dicté de l’extérieur (par la Commission européenne dans l’état actuel du droit).

Certaines décisions prises pendant la diffusion du virus covid 19 font penser à du « n’importe quoi ». A l’issue des cinq ans d’exercice du pouvoir par l’équipe en place, on constate le développement de l’insécurité et l’extension des territoires hors contrôle. A quoi les cerveaux ont-ils été utilisés pendant ces cinq ans ?

Et quand on constate la désindustrialisation de la France, le chômage, les mauvaises conditions de vie de larges couches de la population, qui sont la conséquence de décisions prises par les politiques, qu’entend-on ? Qu’il faut prendre les mêmes décisions, mais en plus musclé. Et qu’il faut en rajouter de nouvelles de la même veine.

 

Situation en apparence étrange au regard de l’idée que l’on se fait souvent (de ce qui serait la « qualité ») des cursus suivis par les membres de « l’élite ». Situation qui est possiblement (ou probablement ? ) liée au contenu de leur formation commune. Laquelle leur donne la certitude qu’ils sont (un peu comme ces gens qui sortent des écoles coraniques salafistes), « dans le vrai » quand ils s’y conforment. Avec l’assurance hautaine et même l’autoritarisme qui vont avec. ( cf. la pratique des gens actuellement « au pouvoir »). 

 

Ce « formatage » ne peut que laisser ensuite des traces.

Lorsque E. Macron parle, il nous rappelle (déformation professionnelle) les candidats aux épreuves. Candidats qui doivent séduire le jury en disant à ce dernier ce qu’ils ont appris à dire (quasi mécaniquement) pour que ledit jury délivre une bonne note. A cet égard, la forme des oraux de E. Macron est la même. Le fond de ses discours est modulé en fonction de l’auditoire et des attentes de ce dernier. Ce qui conduit des observateurs, qui comparent le fond des prestations sans prendre en compte le fait que les auditoires peuvent ne pas être les mêmes, à tenir les différences pour des incohérences.

 

C’est que si l’on met en cause ce qui se passe à l’école, au collège et au lycée, on oublie (ou on n’ose pas le faire) de s’intéresser également aux programmes, au contenu des cours des facultés et des grandes écoles de l’Etat ( dont sortent ceux qui vont être aux commandes) et …à « l’idéologie » que peuvent véhiculer les enseignements qui y sont distribués.

Et on oublie, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, que la réussite aux examens et aux concours (certains étant précédés de la soutenances de thèses, si possible sous la direction d’un universitaire lui-même conforme aux normes de l’institution, si l’on ne veut pas compromettre son avenir) dépend de la conformité dont les candidats auront fait la preuve tant au fond, que dans la forme, lors des épreuves. Réussite académique qui peut ne révéler rien d’autre chez certains.

 

Parlons concrètement …

Selon qu’un cours d’économie politique reprend la philosophie de Milton Friedman ou celle de J-M. Keynes, l’élève ne peut pas penser de la même manière en sortant de la salle de cours.

Selon que l’on regarde « l’Europe » après avoir entendu un professeur giscardien ou un professeur gaulliste, on ne peut faire plus tard que des politiques opposées.

Selon qu’en faculté ou qu’à l’ENA, on fait de la description de l’existant, ou qu’on introduit dans l’enseignement ne serait-ce que l’explication de l’existant (en faisant appel à des connaissances historiques, sociologiques, de géopolitique …) on forme des diplômés qui auront des « réflexes » différents, lorsqu’ils auront le cas échéant des fonctions au sein de l’appareil d’Etat. Et ceux qui auront subi le premier type enseignement auront (en paraphrasant Montaigne) plus probablement une tête … et mal faite, et pas pleine (1) .

 

C’est la raison pour laquelle il serait opportun que l’on analyse le contenu des programmes et qu’on les modifie pour produire une élite de meilleure qualité (2). Plus capable d’imaginer des remèdes et d’agir pour régler les problèmes qui ne l’ont pas été jusqu’alors (3).

 

 

Marcel-M. MONIN

m. de conf. hon. des universités.

 

(1) « Mieux vaux tête bien faite que tête bien pleine » Montaigne.

(2) Et ce n’est évidemment pas en supprimant telle école, même l’ENA, ou en y admettant des quotas de populations venues hors des beaux quartiers, que la formation des élites politiques sera meilleure et plus efficace. Etant entendu que les autodidactes ayant du bon sens, font souvent de meilleurs « responsables » et qu’il conviendrait de ne plus attacher aux diplômes des vertus magiques.

(3) Etant entendu que reste posée la question des rapports entre l’élite politique et l’élite économique. Question qui nécessite des mesures d’une autre nature. V. sur Agoravox : « E. Macron et l’auto- entreprenariat d’Etat » ; « Economie et politique … pour la séparation des pouvoirs »

 


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