Qui est raciste ?

par Asp Explorer
vendredi 1er août 2008

Quelques mots sur la notion de race en général, et dans la société française en particulier.

Je ne sais pas si vous avez suivi la polémique Val/Siné. Non ? Ben ça vole pas haut. L’autre jour, Laurent Joffrin, le rédac-chef du torchon néolibéral Libération, avait sorti un édito qu’il aurait doublement mieux fait de se taire (je sais ce n’est pas français). Doublement parce que, fidèle à son grand ami Philippe Val, d’une part, il voit des propos antisémites là où il n’y en a pas. Et ensuite, parce qu’il en profite pour apporter son soutien aux juifs en ces termes : "on choisit sa religion, on ne choisit pas sa race". Ce qui fait bondir les beaux esprits, car il n’y a pas de race juive. D’ailleurs, il n’y a pas de races humaines, il n’y a pas de race noire, de race blanche, tous ces trucs. Ceux qui croient qu’il existe des races, eh bien, ce sont des racistes.

C’est quoi, une race, au fait ?


C’est un concept un peu nébuleux, il est vrai. Il est issu du vocabulaire de l’élevage. Il existe des races de vaches, des races de chiens, des races de poules, des races de chevaux. Ce n’est pas un concept très scientifique, c’est plus empirique qu’autre chose. Un petit chien frisé, on dira qu’il est de "race caniche". Bien malin qui peut isoler le gène caniche dans le génome du chien. Bien sot qui dirait qu’un caniche est un meilleur chien qu’un berger des Pyrénées, ou qu’il est inférieur au basset artésien. Bien con qui voudrait exterminer tous les caniches sous ce dernier prétexte.

Il se trouve que pour des raisons historiques, on a étendu ce concept à l’espèce humaine. Constatant que les populations du monde différaient par leur apparence physique, des savants souvent bien intentionnés les ont classées en fonction de critères extérieurs plus ou moins pertinents. Le critère le plus évident, c’est la couleur de la peau, c’est ainsi que sont nées les premières classifications. Puis ils se sont aperçus que d’autres critères se superposaient et, parfois, allaient à l’encontre de ce qu’on pouvait croire de prime abord. Ainsi, les peuples du nord de l’Inde sont blancs de peau. Ceux du sud sont noirs. Où est la frontière entre les deux ? Il n’y en a pas, c’est un continuum, un dégradé. Et pis que tout, les Indiens du Nord comme du Sud considèrent appartenir à une même entité culturelle. En Afrique de l’Est, on trouve des populations noires de peau, mais que les autres caractères physiques rattachent à la race blanche. Qu’en fait-on ?

En fait, la couleur de la peau, bien que la plus visible, est le dernier critère à prendre en compte pour déterminer l’origine d’une population, car c’est ce qui évolue le plus vite. Si une population blanche va vivre dans un pays tropical, les cancers cutanés auront rapidement réduit la proportion de pâlichons et, en proportion, augmenté celle des basanés. En quelques générations, en mille ans, mettons, les blancs deviendront noirs. C’est déjà observable sur la population australienne, constituée principalement de rouquins des îles britanniques. A l’inverse, une population noire s’établissant au Pays de Galle ou dans les Yvelines aurait tout autant de problèmes à s’adapter : la mélanine contenue dans la peau fait écran aux rayons du soleil (c’est pour ça qu’elle est là d’ailleurs). Sauf que, par chez nous, le soleil, il n’y en a pas beaucoup, tellement peu en fait qu’il ne pénètre pas assez d’UV dans le derme pour que s’y produise la synthèse de la vitamine D. Sans vitamine D, les enfants dépérissent, on appelle ça le rachitisme. Or, il est difficile de trouver un partenaire sexuel lorsqu’on est rachitique, donc là encore, la population considérée, noire à l’origine, sélectionnera à toute vitesse les plus clairs, jusqu’à devenir blanche en quelques siècles seulement (ce qui n’est rien à l’échelle de l’évolution). Pour la petite histoire, il vit effectivement des populations noires dans nos contrées, et elles ne semblent pas souffrir de rachitisme. C’est parce qu’à ces enfants on prescrit précisément des suppléments alimentaires à la vitamine D.

Prenons enfin les Asiatiques (Chinois, Japonais, Coréens, Vietnamiens...) : ils descendent de populations d’Asie centrale. Ces régions sont sèches, froides et venteuses. Pour survivre à ces conditions, ces peuples ont évolué de façon à intégrer sous leur peau une couche de graisse protectrice, que n’ont pas les Européens ni les Africains. C’est précisément cette couche de graisse qui sous-tend le derme, et qui permet aux Asiatiques de "paraître jeunes" plus longtemps que les Européens. Oui, mais au cours des siècles, ces peuples sont descendus vers le sud, s’établissant en Mandchourie, en Chine, puis jusqu’à l’actuel Vietnam. Observez un Vietnamien du sud : vous constaterez qu’il est assez sombre de peau, et pour cause, il vit près des tropiques. Sa couleur s’est adaptée aux conditions d’ensoleillement particulières de ces régions. Mais la couche de graisse, elle, n’a pas disparu. Elle ne sert pas à grand-chose, mais elle n’est pas non plus spécialement nocive, et ne coûte donc pas cher, du point de vue évolutionniste. Sa disparition est donc beaucoup plus longue à venir que la mutation de la couleur. Il faut donc être ignorant au dernier degré ou dangereusement infesté par le politiquement correct pour s’imaginer que tous les peuples sont génétiquement semblables. En ce sens, les races humaines existent.

Mais le fait est que les peuples humains migrent et se mélangent, et que personne ne s’est jamais soucié de sélectionner des races pures (en tout cas, jamais assez longtemps pour que ça ait un quelconque effet sur la "pureté" effective des populations). De fait, l’étude des caractères humains est une matière complexe, et contrairement aux chiens et aux poules, donc, nous sommes tous plus ou moins des bâtards. Pour des raisons qui tiennent à l’Histoire, le fait racial est quelque chose que l’on n’ose pas, en Europe, et surtout en France, regarder en face. C’est un tort. D’une part, parce qu’on ne peut pas dire que "les races n’existent pas" à des gens qui les voient tous les matins en prenant le train. On perd toute crédibilité en propageant ces idées certes généreuses, mais sottes. Et d’autre part, parce qu’on se prive d’une partie importante de ce qui fait la culture humaine. Moi, quand je croise une jolie asiatique, ça me plaît de pouvoir dire si elle vient du sud ou du nord de la Chine rien qu’à sa silhouette. Ça m’intéresse de pouvoir reconnaître un touriste anglais d’un Italien à quelques signes subtils. On peut s’intéresser aux races humaines pour d’autres motifs que pour les comparer, les séparer ou les exterminer, par exemple, on peut s’intéresser aux races humaines parce qu’on s’intéresse aux humains.

En tout cas, une chose est sûre : être raciste, ce n’est pas croire qu’il existe des races. Ce n’est pas faire un dessin sur le fils Sarkozy. Ce n’est pas glisser un mot de trop dans un éditorial mal écrit. Ce n’est pas raconter des histoires juives en famille. Être raciste, ça consiste à prendre une barre de fer et à descendre dans la rue avec les copains pour casser du boucaque. Être raciste, ça consiste à prendre sa machette pour couper en rondelles les enfants de l’ethnie d’en face. Être raciste, c’est faire des contrôles d’identité au faciès, c’est indiquer "BBR de pref." dans une offre d’emploi ou de logement. Tout le reste, c’est de la branlette mentale d’intellectuels frustrés qui prêtent bien trop d’attention aux mots, et pas assez aux actes.


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