Réflexion sur le traitement médiatique et politique des gilets jaunes

par republicain
dimanche 27 janvier 2019

 

Lettre ouverte aux gens raisonnables : à ceux qui n’en peuvent plus des gilets jaunes mais également à ceux qui se sentent dépossédés de leur révolte…

 

 

Réflexion sur le traitement médiatique et politique des gilets jaunes

 

Une majorité de Français a exprimé un fort mécontentement, il ne s’agissait pas que des pauvres et des marges de la société mais bien d’une majorité. Elle regroupe en novembre les deux tiers de la population alors que moins de 10% des Français sont considérés comme pauvres. La révolte des gilets jaunes n’est donc pas majoritairement celle des pauvres mais de ceux qui ne sont pas assez riches pour profiter de la politique sociale et qui ne gagnent pas assez pour se sentir en sécurité dans la mondialisation macronienne.

C’est la révolte de ceux qui s’interrogent, ne gagneraient-ils pas plus avec le RSA et la complémentaire gratuite qu’à travailler au smic mais aussi à deux smic et plus … Il n’y a pas que des smicards, il y a aussi ceux qui gagnent 3000 euros et qui paient beaucoup d’impôts ;

Il y a beaucoup de petites retraites, mais souvent des petits propriétaires à la retraite qui n’ont pas droit au fameux « minimum vieillesse » de 800 euros car leur petite maison, leur appartement les rendent trop riches pour y avoir droit, alors ils se contentent de 500 euros…

C’est la révolte de ceux qui ne se considèrent pas riches avec 2000 euros par mois sous Macron ; Hollande plus généreux parlait de riches à partir de 4000 euros…

C’est la révolte de ceux qui découvrent l’insécurité : les commerçants, les artisans, bien des professions libérales, les salariés, de l’employé au cadre, et pratiquement tous les fonctionnaires, et par-dessus tout, les retraités.

Le modèle économique mondialisé, parce qu’il n’a pas de limites, frappe les catégories sociales les unes après les autres. Après les employés, il y a les professions intermédiaires, les jeunes diplômés, et après nous aurons les catégories supérieures. : cela correspond à l’impact de la mondialisation sur la classe moyenne au sens large .

C’est une révolte de ce type qui a porté au pouvoir Trump ou Salvini ….En France, en 2017, par peur des réformes de Fillon ou par peur de Marine Le Pen, cette France a souvent voté Macron ; elle s’en mord les doigts. La majorité de la fonction publique a voté pour lui, la majorité des retraités, presque tous les cadres. Avant de soutenir Trump et Salvini les mêmes catégories sociales avaient majoritairement voté Obama et Renzi…

C’est la révolte de ceux dont ne parle jamais les journalistes sauf sans doute Jean Pierre Pernaud. Ces mêmes journalistes qui ne comprennent pas pourquoi cette France invisible ne les aime pas et qui se rassurent en expliquant combien ces beaufs sont incapables de comprendre leur mission…

 

Les élites ont voulu réduire le mouvement des gilets jaunes à l’extrême pauvreté et à la marginalité , elles ont dénaturé un mouvement qui est majoritaire …

 

La couverture de la majorité des média est symptomatique, réductrice, caricaturale. C’est Christophe Guilluy qui fait ce constat, les gilets jaunes sont présentés comme pauvres, extrémistes ou incultes ou alors ils ne sont pas légitimes. Les plateaux de télévisions ont été construits à partir de là : des pauvres bien soumis comme Mme Levavasseur, des indigents, des excités comme Maxime Nicolle, des beaufs …

Les petits patrons ou ceux qui avaient quelque réflexion ont vite disparu…

C’ est Christophe Guilluy qui fait ce constat,

J’en veux à la production intellectuelle et universitaire parce qu’à partir du moment ou on met les marges en avant, les journalistes vont suivre cette représentation en allant voir une femme isolée dans la creuse qui vit avec 500 euros, en se disant qu’elle est Gilet jaune, tout cela pour se rendre finalement compte qu’elle ne manifeste pas. Parce que quand on est pauvre, on n’a même pas l’énergie de se mobiliser, le but est de boucler la journée. Historiquement, les mouvements sociaux n’ont jamais été portés par les pauvres, et cela ne veut pas dire qu’ils ne soutiennent pas le mouvement.

Ce que nous voyons aujourd’hui, ce sont des journalistes qui vont dans les salons des Gilets jaunes pour vérifier s’ils ont un écran plat, un abonnement Netflix, ou un IPhone. Ils sont prêts à les fouiller, cela est dingue. Lors des manifestations de 1995, les journalistes ne sont pas allés vérifier si les cheminots avaient un écran 16/9e chez eux, ou quand il y a eu les émeutes des banlieues, de vérifier si le mec qui brule une voiture vit chez lui avec une grande télé ou pas. Cette façon de délégitimer un mouvement est une grande première. C’est la première fois que l’on fait les poches des manifestants pour savoir s’ils ont de l’argent ou pas, et s’il y en a, on considère que cela n’est pas légitime.

 

 

Les élites ont fait du gilet jaune le responsable des déficits

La réponse du gouvernement s’inscrit dans cette logique : se contenter de donner un peu aux plus pauvres en oubliant ceux qui n’étaient pas assez pauvres.

La réduction des cotisations salariales allait dans le bon sens mais pourquoi avoir sacrifié le pouvoir d’achat de beaucoup de Français qui ne sont pas assez pauvres mais qui ne sont pas riches

Il aurait suffi de prendre des engagements pour réindexer les retraites, toutes les retraites sur l’inflation, cesser de geler le point d’indice de la fonction publique

Alors le gouvernement ressort la question des déficits. Caricatural comme le démontre un économiste qui n’a rien d’un gauchiste, Christian Saint Etienne.

Emmanuel Macron a commis une triple erreur : il n’a pas baissé la dépense publique, a ignoré les deux France du déplacement et n’a pas relancé le moteur industriel.

 Il faut revenir sur l’origine du conflit des « gilets jaunes ». Emmanuel Macron s’est fait élire sur la promesse de réduire la dépense publique mais a tout de suite écarté les mesures qui permettraient de la dégonfler. Puis il a ignoré la division des deux France du déplacement. Enfin, il n’a pas relancé le moteur industriel. Ce faisant, il a contribué à enfoncer davantage encore la voiture France dans l’ornière en dépit de l’utile réforme du marché du travail. Analysons ces différents points.

 La dépense publique française dépasse celle de la moyenne des dix-huit autres pays de la zone euro de 9 points de PIB et celle de l’Allemagne de 12 points de PIB. Les dépenses de retraite atteignent 14 points de PIB, soit le quart d’une dépense de 56 points du PIB. Pas de baisse de la dépense publique sans réforme des retraites. Or Macron a triché en prétendant régler le problème par un régime par points qui n’est qu’un mode de calcul des droits à retraite. De plus, cette réforme est contestable, car elle méconnaît les besoins différents des trois catégories de travailleurs : les fonctionnaires, dont certains sont planqués mais un grand nombre travaillent à la dure – qui veut être flic à 1 500 euros net par mois ou infirmière d’urgence à 1 600 euros net par mois ? – ; les salariés, dont la retraite est essentiellement financée par les charges patronales – cotiseront-ils suffisamment lorsqu’ils devront accumuler des points pendant quarante-quatre ans pour une retraite qui semble loin des besoins immédiats ? – ; et les indépendants qui arbitrent entre retraite et constitution d’un patrimoine. Il convient de passer des 42 régimes de retraite existants à 3 régimes adaptés à ces trois catégories avec les mêmes règles : âge de départ à 64 ans, avec décotes et surcotes pour introduire de la flexibilité, une durée de cotisation de quarante-quatre ans dès 2024 et des règles appropriées pour les emplois pénibles.

 Macron a également annoncé la suppression de la taxe d’habitation, qui est pourtant un impôt juste s’il est calculé sur des bases locatives actualisées, car il correspond à un service rendu localement. Cette suppression conduit l’État à faire en urgence les fonds de poche des Français pour compenser le trou de recettes qui atteindra 20 milliards d’euros à l’horizon 2020. On avait ainsi prélevé 3 milliards d’euros sur le gasoil, quelques centaines de millions d’euros en supprimant les crédits d’impôt sur les fenêtres, etc., avant d’annuler ces mesures. La réforme des retraites présentée précédemment permettrait d’économiser progressivement 25 milliards d’euros par an d’ici à six ans. Macron s’est ainsi privé d’une augmentation de ses marges de manœuvre de 45 milliards d’euros par an qui auraient pu être utilisés pour réduire le déficit de 25 milliards d’euros et pour financer à hauteur de 20 milliards d’euros par an la réindustrialisation et la numérisation du pays. Ce trou de 45 milliards d’euros annuels dans les finances publiques va le hanter jusqu’à la fin de son quinquennat qui semble aujourd’hui largement compromis.

 Enfin, face à l’équation de la croissance durable, Macron a ignoré l’existence des deux France du déplacement. La population métropolitaine de 65 millions d’habitants se scinde en 25 millions vivant dans des grandes villes connectées avec des transports en commun et des marchés de l’emploi dynamiques et une France de 40 millions d’habitants vivant dans des villes moyennes ou des zones rurales sans ou avec peu de transports en commun. Cette deuxième France ne vit pas forcément mal, mais elle a besoin de sa voiture pour vivre, travailler, aller chez le médecin ou emmener les enfants à l’école. Miser la transformation environnementale sur une hausse massive du prix du gasoil alors qu’on a encouragé pendant trente ans la deuxième France à s’en équiper – chauffage ou voiture au gasoil qui émet beaucoup moins de CO2 et pas tellement plus de particules pour les moteurs les plus récents – est une atteinte à sa dignité autant qu’à son portefeuille.

 Enfin, Macron n’a pas plus que ses prédécesseurs compris la nécessité de réindustrialiser le pays après une vague massive de désindustrialisation pendant vingt ans fondée sur le mythe de l’entrée dans un monde post-industriel et post-travail alors que nous sommes dans la révolution du numérique et de la robotique. « Pas d’industrie » veut dire pas d’exportation et pas de R&D, car partout la R&D industrielle représente plus de 80% de la R&D des entreprises. Il a pris quelques mesurettes, comme une annonce de 1,5 milliard d’euros d’investissements dans l’intelligence artificielle sur la durée de son quinquennat, alors que sur la même durée il alloue 50 milliards d’euros en cumulé pour supprimer la taxe d’habitation.

 Certes, le « gilet jaune » est l’habit commode de tous les désarrois et la couverture d’une insupportable violence, mais sans création d’emplois rémunérateurs dérivés de l’industrie et des secteurs qu’elle entraîne, il ne peut pas y avoir de hausse réelle du pouvoir d’achat.

 

Il s’est agi de cacher cette réalité : les statistiques de la première année de macronisme sont mauvaises et ce avant les gilets jaunes :

https://pgibertie.com/2018/11/28/economie-macron-obtient-enfin-des-resultats-ils-sont-catastrophiques/

 

 Faire peur et culpabiliser une majorité de Français pour les mobiliser contre le populisme

Une colère qui mobilise 70% de la population ne peut être que dangereuse, il faut donc la réduire à l’expression des marges : les pauvres et les extrémistes. Pour ce faire les casseurs et les images de violence sont bien utiles.

Mais cette vidéo m’interpelle :

 

Tout a été filmé dans Par Jerome Rodrigues dont la vie a basculé.

Tout même l’arrivée des black bloc

Je pose la question de la responsabilité du ministre Castaner

 

Les élites ont parlé de fascistes, de racistes pour décridibiliser le mouvement

Christophe Guilluy

On a présenté les Gilets jaunes comme étant un mouvement de blancs « Ah..ils sont blancs », comme si cela était une surprise de voir des blancs dans les zones rurales françaises. Mais ce que l’on ne voit pas, c’est que beaucoup de Français issus de l’immigration participent à ce mouvement et qu’ils ne revendiquent aucune identité, ils sont totalement dans l’assimilation. Ils font partie d’un tout qui s’appelle la classe moyenne, ou l’ancienne classe moyenne. Le mouvement a été très fort à la Réunion, on voit donc bien que cela n’est pas ethnique. Mais cela a été présenté comme cela parce que cela permettait d’avoir le discours sur l’antiracisme et l’antifascisme. Il y a eu une ostracisation des Gilets jaunes par la gauche bienpensante parce que trop blancs

Après, on pointe le fait qu’ils sont contre l’immigration, ce à quoi on peut répondre « comme tout le monde », soit une très large majorité de Français. Le plus important est que nous avons sous les yeux un peuple qui veut faire société et des élites qui ne veulent plus faire société, comme je le disais dans « No Society ». C’est un moment de rupture historique entre un monde d’en haut, intellectuels, politiques, showbiz etc.… qui a peur de son propre peuple. Ils ne veulent plus faire société avec un peuple qu’ils méprisent. C’est la thèse de Christopher Lasch de la « sécession des élites ». On le voit aussi avec le discours anti-média des Gilets jaunes qui ne fait que répondre à 30 ans d’invisibilisation de ces catégories. Les classes populaires n’étaient traitées qu’au travers des banlieues et ils payent aujourd’hui ce positionnement.

Je n’ai pas de jugement moral sur les classes populaires, je prends les Français tels qu’ils sont. Je ne demande à personne d’arrêter de penser ce qu’il pense, notamment sur l’immigration. De toute façon cette question va être réglée parce que 80% des Français veulent une régulation, et qu’on ne peut pas penser cette question comme on le faisait dans les années 60, parce que les mobilités ont évolué. La question n’est même plus à débattre. Les gens que je rencontre en Seine Saint Denis qui sont majoritairement d’origine maghrébine ou sub-saharienne veulent l’arrêt de l’immigration dans leurs quartiers. C’est une évidence.

 

C’est pour cela que je dis que le mouvement des Gilets jaunes n’est pas une résurgence de la révolution française ou de mai 68, cela est au contraire quelque chose de très nouveau : cela correspond à l’impact de la mondialisation sur la classe moyenne au sens large : de l’ouvrier au cadre supérieur. La classe moyenne ce ne sont pas seulement les professions intermédiaires, c’est un ensemble, ce sont les gens qui travaillent et qui ont l’impression de faire partie d’un tout, peu importe qu’il y ait des inégalités de salaires.

La réalité est qu’à partir du moment où l’on travaille sur les classes populaires de banlieues, soit 7% de la population, on sait qu’il manque quelque chose, c’est-à-dire tout le reste. Ce qui était frappant lorsqu’on a fait les premières cartes de cette représentation était que ces territoires étaient toutes les périphéries des grandes métropoles mondialisées : les périphéries de la mondialisation. Il y a donc un aspect géographique, un aspect social, un aspect économique – parce que l’on retrouve les territoires les moins dynamiques économiquement – et puis, et surtout, un aspect culturel, puisque ce sont des catégories qui sont sorties des écrans radar de la classe politique, du monde intellectuel, du monde universitaire et du monde syndical.

 

C’est pour cela que j’avais annoncé, au début des années 2000, que s’il y avait un mouvement social, la contestation viendrait de ces territoires, de cette géographie, de cette sociologie, et que celle-ci pourrait être politique, sociale, ou les deux à la fois

 

Toute une stratégie de communication se dévoile simplement, il y a d’un côté les gens raisonnables, ouverts et non racistes, capables de comprendre les réalités économiques. Ils doivent se rallier derrière le Président

Il y a de l’autre les marges soutenues par les extrémistes, les populistes, les irresponsables. Les élections européennes se profilant la sortie de crise passera par un choix caricatural : Macron contre les populistes.

Le soutien des juppéistes à Macron conforte l’analyse et comme si cela ne suffisait pas il faut rendre inaudible toute alternative « raisonnable » au macronisme .

Quant aux gilets jaunes « modérés » Bernard Tapie propose une liste clef en mains menée par des macronistes. Objectif : démontrer que la révolte ne concerne pas 70% de la population mais dix fois moins.

Mais est-il raisonnable de soutenir Emmanuel Macron ?

La réponse se trouve sans doute dans d’autres questions :


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