Retour aux sources de notre histoire

par Emile Mourey
lundi 20 mars 2017

Dans la crise de civilisation que nous traversons, un seul recours : l'intelligence. Un seul processus : sortir de "l'enfance de l'humanité"... sans remords ni repentance mais en poursuivant dans le courant humaniste que le monde civilisé a enfanté. Pour comprendre l'aventure dans laquelle nous sommes embarqués, il s'agit d'abord de remonter aux sources de notre histoire, d'en revisiter le cours pour en comprendre le sens et de continuer sur un chemin qui monte. Les sources de notre histoire, ce n'est pas au mont Beuvray qu'il faut les chercher - tragique erreur - mais à Tasiacum, Taisey, l'antique Cabillodunum, là où je situe l'Alésia de Diodore de Sicile, foyer et métropole (religieuse) de la Celtique. L'obscurantisme archéologique du mont Beuvray, je le combats pour promouvoir le fil d'une nouvelle "Renaissance" que j'appelle de mes voeux, en contradiction formelle avec la "Décadence" de Michel Onfray (1). Une Renaissance à l'image de celle que Véronèse prônait au XVI ème siècle dans son tableau célèbre Les noces de Cana : un dépassement des croyances religieuses, sans renoncement (2) http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/les-noces-de-cana-de-veronese-mais-190016.

Le choix devant lequel se trouvent nos élus, notamment locaux, est le suivant : ou bien ils acceptent la thèse absurde d'une Bibracte au mont Beuvray en ne se manifestant pas, ou bien ils soutiennent ma proposition d'une antique métropole des Gaules dans le vieux village de Taisey, en exigeant, au minimum, le débat public que je demande au journal de Saône-et-Loire, ou une prise de position claire de la Ministre.(3)

Dominant du haut de sa colline l'antique ville de Cabillo - aujourd'hui Chalon-sur-Saône - le château versaillais de Taisey voyait tout Chalon et tout Chalon voyait le château de Taisey et ses dépendances dont une tour antique tragiquement méconnue, vestige d'une très ancienne fortification "antiquissima". Durant des siècles, les seigneurs locaux ont préservé le point de vue jusqu'à l'aube des temps modernes. Leur succédèrent des propriétaires qui cédèrent les terres à leurs fermiers avec, bien évidemment, l'accord tacite, et peut-être même écrit, qu'ils continuent à préserver l'environnement. 

Puis vint l'affairisme, l'urbanisme sauvage, les arrangements et les tractations.

Les lotissements, les maisons de briques creuses, de béton, et même de bois préfabriqué, montent à l'assaut de nos vieux monuments. Les lois de protection du patrimoine sont interprétées, voire contournées, par les communes et par les services eux-mêmes qui doivent les faire respecter.

C'est ainsi que la construction d'une maison en bois s'est vue autorisée, sans que je sois au courant (4), et par la commune de Saint-Rémy (71) et par les services de l'État, à quelques 50 mètres, au pied de la tour antique dite de Taisey, véritable scandale quand on sait qu'il s'agit de l'illustre vestige, un, du château fort des comtes de Chalon, des rois burgondes et francs, deux, de l'ancien castrum/oppidum gaulois des chartes, trois, qu'il est cité par César et Strabon, et enfin, quatre, qu'il s'agit de l'Alésia dont Diodore de Sicile dit qu'elle était la métropole (religieuse) de la Celtique. Tout cela, je l'ai expliqué publiquement, arguments irréfutables et non contestés à l'appui.(5)

Et pourtant, j'avais reçu l'assurance formelle de la part du dernier architecte des bâtiments de France à être venu me voir que le point de vue serait préservé, la parcelle n'étant pas constructible.

Faisant fi de ma réaction pourtant abondamment argumentée, cette construction a néanmoins été réalisée dans des conditions discutables que M. le Préfet de région n'a pas voulu éclaircir, allant même jusqu'à me refuser le classement de la tour sous le faux prétexte d'un intérêt d'art insuffisant. Dans sa lettre du 18. 8. 2005, signée Paul Roncière, préfet de la région Bourgogne, celui-ci va même jusqu'à préciser que la dite tour "bénéficie déjà d'une protection au titre des abords" du fait de la présence tout à côté du château. Une protection des abords qui a permis la construction d'une maison moderne en bois à son pied, à quelques 50 mètres ! Cest vraiment se moquer du monde ! Ce préfet n'a pas compris qu'il se faisait abuser par sa DRAC (Direction régionale des affaires culturelles). Il faut savoir, en effet, que les archéologues des DRAC, sont, en majorité, des soutiens inconditionnels de la thèse du mont Beuvray et, par conséquent, adversaires de la mienne. Il faut savoir que tout le montage médiatique beuvraysien avait pour but avoué de valoriser la profession d'archéologue ... et pour but non clairement avoué de faire voter en sa faveur un statut avantageux que préparaît en secret la Sous-direction de l'archéologie... un statut mort-né quand le ministre et le président de la République d'alors ont été informés de l'erreur de localisation. Ceci étant dit, ce n'est pas à moi de payer les pots cassés.

Bien que j'ai reçu l'assurance écrite que de tels manquements à la loi ne se reproduiront pas, si tel n'était pas le cas, je ne manquerai pas de porter l'affaire en justice et de demander sanction et réparation, que ce soit pour une modification de l'environnement existant, pour une nouvelle implantation ou même pour l'ancienne.

Le 14 avril 1999, suite à mon interview sur FR3 Bourgogne, M. Vincent Guichard, directeur du centre archéologique européen du mont Beuvray, en manque d'arguments, déclarait que, dans la communauté scientifique, ça fait belle lurette que plus personne ne doute. Ça fait au moins 130 ans que plus personne ne doute de la localisation de Bibracte. M. Vincent Guichard omet de dire que la thèse de Bulliot a été contestée dès le début par les érudits d'Autun, les textes latins ne permettant pas une telle localisation (6). Moi-même, j'explique, entre autres, que le grec Strabon dit clairement que le pays éduen s'étendait entre la Saône et la Dheune, et non entre la Saône et le Doubs, traduction absurde ; et que, par conséquent, le mont Beuvray, qui est au-delà de la Dheune, ne peut pas être Bibracte.(7)

Depuis le temps que je publie et que j'alerte, y compris en m'adressant directement à M. Guichard, l'affaire est claire. Alors, pourquoi persiste-il dans l'erreur ? Je ne vois qu'une explication : l'aveuglement (8). Mais s'il se refuse à entrer dans le débat, d'autres que lui se chargent de me discréditer (9). M. Vincent Guichard ne veut pas comprendre que les très nombreux débris d'amphores retrouvés sur son site ne s'expliquent que par une occupation de troupes militaires lors du conflit de frontière qui opposa les Arvernes et les Éduens, avant l'arrivée de César. Il ne veut pas comprendre que les très nombreuses monnaies découvertes ne s'expliquent principalement que par le fait que le mont Beuvray était un site mystique où on y faisait des offrandes à Jupiter, d'où le nom de Montjeu - mont Jovis - qui a subsisté près d'Autun pour désigner la montagne. M. Vincent Guichard rêve d'une grande ville en bois qui n'a jamais existé sur ce mont pelé, d'une archéologie nouvelle à partir d'une prospection généralisée de trous de pieux. Il réinvente la Gaule, sa Gaule à lui. Les maquettes qu'il construit deviennent pour lui des réalités. Il remplit les vitrines de son musée de copies de vestiges qui viennent d'ailleurs.

 Tout cela est insensé. Incroyable paradoxe, alors qu'à Taisey, la tour antique est menacée de toutes parts, au mont Beuvray, faux site de Bibracte, non seulement on protège drastiquement l'environnement, mais on achète à grands frais des hectares et des hectares de forêt en croyant préserver l'ancien pays des Éduens. On prospecte à tour de bras dans l'espoir d'y retrouver, ou un trésor révélateur ou une ancienne mine d'or, témoins de la grandeur des Celtes. Dans ce bateau fou conduit par des archéologues aveugles, véritable tonneau des Danaïdes, on entraîne toutes les têtes pensantes, spécialistes de l'antiquité européenne.

Loin de moi l'idée de dénigrer le mont Beuvray, site de Gorgobina cité par César, mais s'il est une chose absolument certaine, c'est que ce n'était pas la capitale des Gaules... et cela change tout. Et pendant ce temps-là, dans notre monde instable qui ne veut pas renaître, j'essaie de sauver en solitaire le plus authentique, le plus important et le plus ancien témoin d'une présence civilisatrice dont notre pensée judéo-chrétienne est issue. 

Emile Mourey, 20 mars 2017, site internet www.bibracte.com

Destinataires en envoi lettre :

Notes

(1) M. Michel Onfray est un philosophe. Très virulent concernant le passé de notre civilisation judéo-chrétienne qu'il voit aujourd'hui en perdition, fataliste sur la montée de l'islam, il n'a toujours pas répondu à la question que je lui ai posée dans mon article Agoravox du 21 mars 2016 http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/penser-l-islam-monsieur-michel-179040 Comment comprenez-vous l'énigme que pose la sourate 18, versets 8 à 25 ou 26 ? C'est pourtant la question principale qu'il faut se poser avant tout le reste.

(2) À l'opposé de Michel Onfray, Luc Ferry et André Comte-Sponville, prônent, ou plutôt prônaient, une vision d'avenir dans leur ouvrage commun "La sagesse de Modernes" : Sur le chemin, qu'est-ce qui doit éclairer la pensée ?... Il s'agit bien là, pour les Modernes que nous sommes tous, de la question préalable à toute autre : Quitter l'enfance de l'humanité (Luc Ferry, page 529). Dans son célèbre tableau "Les noces de Cana", bis repetita, Véronèse avait déjà montré le chemin de l'esprit qui, pour grandir, s'appuie sur un passé culturel tout en s'en libérant. D'autres, dans les périodes de crise de leur histoire, ont prôné le retour aux sources de leur culture et de leur civilisation pour "repartir". C'est ce que dit très clairement le tympan de la cathédrale d'Autun http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/le-tympan-de-la-cathedrale-d-autun-115239

(3 Citation : Vous comprendrez dans ces conditions que nous ne souhaitons pas nous lancer dans un tel débat incompréhensible pour la majorité de nos lecteurs, d'autant qu'il risque de ne jamais être véritablement tranché (le directeur départemental du journal de Saône-et-Loire, 29.9.2016). Concernant la ministre de la Culture, voyez ses réponses "langue de bois" publiées au Journal Officiel http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/cette-plaisanterie-de-bibracte-au-189584 Notez également que depuis la mort du président François Mitterrand, la seule visite sur le mont Beuvray d’un ministre de la Culture est celle du ministre du Burkina Faso.

(4) Et pourtant, je consulte régulièrement le site internet de ma commune.

(5) Ma lettre du 16.9.2004 à DRAC Bourgogne, copie à M. l'Architecte des Bâtiments de France, à Mâcon. Mon article Agoravox http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/au-sujet-de-taisey-antique-185151

(6) Du véritable emplacement de Bibracte par C. Rossigneux, Officier de l'instruction publique, Revue des questions historiques - Tome Ier, 1866. http://www.mediterranee-antique.fr/Auteurs/Fichiers/PQRS/Rossigneux/Bibracte/Bibracte.htm

(7) http://www.agoravox.fr/tribune-libre/article/bibracte-au-mont-beuvray-182758

(8) France-culture le 11/02/95, Vincent Guichard : on ne va pas recommencer pour Gergovie une polémique d'Alésia. Régulièrement, la presse aime relancer le débat sur la localisation des sites d’Alésia de Gergovie ou de Bibracte : la preuve par la pioche, exposition au mont Beuvray, 2002...

(9) Un des plus virulents étant le modérateur de Wikipédia qui me dénigre et m'interdit tout accés au site : Luscianusbeneditus, professeur.


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