Retour sur les émeutes de l’automne 2005

par romG
mercredi 14 juin 2006

Alors que le ministre de l’intérieur, M. Sarkozy, revenait récemment sur les suites pénales - jugées décevantes - des arrestations ayant eu lieu durant les événements de la fin de l’année dernière dans les banlieues, sortait aux Presses de Science-Po un ouvrage intitulé « Emeutes urbaines et protestations ». Fruit des travaux d’Hughes Lagrange, directeur de recherche au CNRS, et de Marco Oberti, sociologue et maître des conférences des universités à Sciences-Po, il étudie les facteurs constants dans les zones où les émeutes ont été les plus fortes.

Les observations menées par ces chercheurs ont porté sur plus de deux cents villes, pour tenter de comprendre ce qui avait poussé certaines à s’embraser alors que d’autres étaient restées calmes. Plusieurs facteurs semblent décisifs, alors que d’autres étaient attendus (taux de chômage des jeunes, classement du quartier en zone urbaine sensible).


Tout d’abord, certains quartiers présentaient une pyramide des âges typique des processus révolutionnaires, avec une proportion de jeunes de moins de 20 ans de 35 % (contre 25 % pour la moyenne nationale). Les contrastes de richesse sont un autre facteur important : les quartiers pauvres dans des villes plus riches ont vu surgir le ressentiment de jeunes confrontés quotidiennement aux contrastes des niveaux de vie. La dégradation de l’habitat est aussi mise en cause, les villes concernées étant souvent l’objet des premières conventions avec l’Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU). Enfin, le facteur le plus corrélé avec la survenue d’émeutes est aussi le plus complexe à étudier : le taux de familles de plus de six personnes.
Les résultats de cette étude devraient donner de la matière aux politiques sociales pour orienter les choix. Et si les revendications des émeutiers ne semblaient pas à première vue d’ordre politique, la demande d’Etat que l’on peut y lire constitue en soit un acte politique.

La réaction récente du ministre de l’intérieur est à replacer dans ce cadre. Alors que la Justice avait reçu de toutes parts des éloges pour son travail, M. Sarkozy donne l’image d’un gouvernement incapable de tirer les leçons de cette crise. Et en essayant de botter en touche alors que sont montrées du doigt les erreurs de la police (voir la réaction du président du Tribunal pour enfants de Bobigny sur ce point), tout comme en soutenant peu les responsables locaux dans leur lutte contre la précarité.
Par ailleurs, on comprend mieux que le gouvernement n’ait pas souhaité enfoncer le clou en revenant sur le quota de logements sociaux imposé par la loi
« relative à la solidarité et au renouvellement urbains » (SRU). Le développement urbain a plus que jamais besoin de mixité sociale, de redistribution de la richesse et d’engagement politique au profit des plus défavorisés.

Pour approfondir le thème : les violences urbaines, par Wikipedia.


Lire l'article complet, et les commentaires