Retraites, 5 décembre : pourquoi les populistes ont eu raison de soutenir le mouvement sans forcément manifester
par Florian Mazé
jeudi 5 décembre 2019
Marine Le Pen (qui a ses qualités et ses défauts, la question n’est pas là) annonce depuis quelques jours qu’elle soutient le mouvement du 5 décembre 2019 sur les retraites, sans pour autant qu’elle-même ou les cadres du RN soient forcément présents aux manifestations syndicales. On pensera ce qu’on voudra de Mme Le Pen, mais elle a parfaitement raison.
C’est un parti populiste, nationaliste, partisan de frontières solides et, donc, non-immigrationniste, mais ce n’est pas un parti de droite. Sur la question sociale, cela fait belle lurette que le RN défend des positions socialisantes, presque marxistes, et l’on ne peut que l’en féliciter : bons salaires, bonnes retraites, bons services publics, économie mixte, pas trop étatique, pas trop libérale non plus. Il n’y a que la bourgeoisie capitaliste décomplexée, incarnée par les gros partis (Larem, LR et PS) pour s’en offusquer.
Le social-populisme constitue ce qu’il y a de mieux dans l’offre populiste : qui, en effet, mis à part quelques bourgeois cyniques, pourrait chercher à dissocier la question identitaire de la question sociale ? Devrait-on exclure du populisme les employés, les ouvriers, les petits paysans, les petits patrons, les petits fonctionnaires, et tout le peuple qui trime pour ne gagner pas grand-chose ? Absolument pas. Un populisme dissocié de la question sociale n’est qu’un faux-nez du Capital mondialisé.
Le RN d’aujourd’hui, en gros, c’est un peu le Parti Communiste de Georges Marchais, au début des années 1980 (et l’on n’a pas oublié le discours de son truculent secrétaire général, lorsqu’il s’exprimait sur les dangers d’une immigration non contrôlée). Mais c’est là précisément que joue le Système – et ses complices – pour empêcher toute velléité de social-populisme. Le peuple en lui-même n’a rien contre le populisme social, sinon le RN n’engrangerait pas les scores importants qu’il produit à chaque élection, grande ou petite. Mais ce qui empêche toute convergence des luttes entre un certain socialisme et un certain populisme ce sont les franges extrémistes, les ultras de droite comme de gauche, que ces franges soient directement financées par le pouvoir (ce qui n’est jamais impossible) ou qu’elles aient simplement le statut d’idiots utiles du Système.
Commençons par l’ultragauche.
Chacun sait que si un cadre un tant soit peu célèbre du RN pointe son nez dans une manifestation syndicale, toute la clique des antifas-anticapitalistes va lui pourrir la vie par des violences. Quitte à choquer de braves syndiqués de base beaucoup plus tolérants, et dont certains ont même une carte au RN. Les violences ne seront évidemment pas réprimées par la magistrature aux ordres, ou très peu, et bien au contraire, une victime nationaliste qui se serait fait casser la gueule se retrouvera en taule, éventuellement sans aucune remise de peine, si elle a tenté le moindre petit début de légitime défense. Ce « deux poids, deux mesures » a très bien été théorisé par des criminologues comme Xavier Raufer, des journalistes comme Zemmour, ou de célèbres romanciers comme Laurent Obertone, qui, je le signale, vend à des centaines de milliers d’exemplaires, ce qui témoigne du soutien du public.
Envisageons maintenant l’ultradroite. C’est la pire des cliques. A la différence de l’ultragauche elle ne se donne même pas (ou très peu) la peine d’infiltrer les manifestations pour casser la revendication sociale. Non, elle se produit essentiellement sur internet en répandant sa moraline conspirationniste. Elle milite ouvertement (c’est son seul courage) contre le camp national lui-même, en répandant force rumeurs sur des complots toujours plus grotesques, quand elle ne produit pas carrément des attaques en dessous de la ceinture. Karl Marx est un protestant germanique d’origine juive ? Il n’en faut pas plus à l’ultradroite pour discréditer toute tentative d’approcher la question sociale. Si vous lisez Karl Marx vous irez en enfer ! Tel cadre populiste est gay, tel autre vit en concubinage avec sa compagne ? Allez hop ! Le RN devient, pour ces gens, un parti sataniste au service de la débauche. Et de nouveau, l’eau bénite et le signe de croix. Vivement qu’on rétablisse l’inquisition ! Etc. Etc. Et je ne vous parle même pas du national-sionisme d’Alain Soral, le dernier truc à la mode pour casser toute velléité revendicative. Tu approuves le Système ? Tu es sioniste. Tu désapprouves le Système ? Tu es national-sioniste. Comme ça au moins, pas de jaloux ! Et comment sortir du Système alors ? En achetant les bouquins à la con écrit par cette clique de dissidents de pacotille. C’est ainsi que beaucoup de jeunes et de moins jeunes s’imaginent qu’ils vont « vaincre le Nouvel Ordre Mondial » en gueulant je chie sur Marx, j’enc… Darwin, je b… Hannah Arendt ou je défonce Voltaire et Rousseau…
Ah, les cons !
Le lecteur de bon sens aura compris le message.
L’ultragauche s’attaque physiquement et judiciairement au social-populisme.
L’ultradroite, c’est pire : elle énerve, divise, amoindrit, affaiblit, salit la sensibilité social-populiste en calomniant le camp national et en présentant un visage terrifiant qui dégoûterait n’importe qui. Elle est à la fois un repoussoir qui éloigne les électeurs tentés par le vote populiste et une véritable plaie interne à la dissidence qui ne guérira pas de sitôt.
C’est pourquoi Marine Le Pen a eu raison de vouloir protéger ses cadres et ses militants.
Et il n’y a rien d’autre à dire.
Vive la grève générale sur les retraites ! Et merde à l’ultradroite comme à l’utragauche !
Référence : discours de Marchais
https://www.youtube.com/watch?v=sCfVkATt1vs
Florian Mazé,
écrivain modéré