Retraites à moitié prix

par Christophe Bugeau
mardi 5 avril 2016

L’accord passé sur les retraites complémentaires en octobre dernier entre syndicats et patronat est passé quasi-inaperçu. Celui-ci permet pourtant de sauver l’ARRCO et l’AGIRC de la faillite. Mais à quel prix ? Les retraites seront fortement et rapidement amputées. Les générations nées dans les années 60 verraient déjà une forte baisse. Et les suivantes seront dans une situation pire encore.

Rappelons le problème de base : du fait d’un fort chômage réel (4,5 millions de chômeurs, mais plus probablement 7 en comptant les mi-temps ou l’Interim), nous n’avons pas assez de cotisants alors que les générations qui partent à la retraite sont celles du Baby-Boom d’après-guerre qui sont nombreuses (voir http://www.christophebugeau.fr). Le nombre de retraités augmente alors que le nombre de cotisants ne suit pas et qu’il est difficile d’augmenter les taux de cotisations.

Il faut donc gérer la pénurie : pour cela, les retraites doivent baisser et c’est exactement ce à quoi parvient cet accord sur une durée très rapide : jusqu’en 2020. Comment baisser les pensions ? En changeant les règles prévues initialement. Un système de forte décote est mis en place : un cadre partant à la retraite au moment où il peut le faire sur le régime de base perdrait pour ceux né en 1959 14,5 % de sa retraite complémentaire et pour ceux né en 1990 ce sera (provisoirement) 17 % et jusqu’à 18 % pour les non-cadres.

Rappelons que le régime de base ne donne droit au maximum qu’à 50% des anciens salaires. Et que ce sont les régimes complémentaires qui permettaient d’assurer un remplacement correct des salaires lors du départ à la retraite. Les modifications du régime général additionnées à celles des régimes complémentaires, vont entraîner une forte baisse des retraites : la génération née entre 1965-1970 verrait selon les calculs du Conseil d’Orientation des Retraites son niveau de remplacement à la suite de son dernier salaire passer en dessous de la barre des 66 %.

Rappelons que jusqu’au début des années 2000 les retraités ayant cotisés à temps pleins partaient souvent avec 75-80 % de leur ancien salaire. Ce temps là est bien révolu !

La question qui se posera pour les futurs retraités à ce rythme-là est bien de savoir s’ils conserveront même la moitié de leur dernier salaire. Car cet accord ne sauve que provisoirement les régimes complémentaires.

Il est donc temps d’envisager d’autres pistes de réflexion : la relance de l’emploi est bien sûr nécessaire ce qui implique de changer de politique économique. Mais si le retour au plein emploi s’avère impossible, un nouveau partage de la valeur ajouté est nécessaire : les riches sont de plus en plus riches car nous acceptons une modération salariale qui nuit de facto à notre système de protection sociale. La part de la valeur ajoutée qui va aux apporteurs de capitaux ne fait qu’augmenter et les inégalités ont retrouvé leur niveau d’avant la seconde guerre mondiale !

Ou nous révisons la copie et envisageons une nouvelle logique ou nous allons vers un monde de plus en plus dur avec de plus en plus de pauvres et notamment de retraités pauvres !  


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