Riche à partir d’un revenu net de 4 000 € / mois / UC ?

par Aimé FAY
lundi 7 mai 2018

 

Avant d'expliquer pourquoi c'est, a priori, ce montant-là et pas un autre, il convient de savoir ce que l'on entend par riche, par revenu net et par UC.

Riche ? La personne aux minimas sociaux pourra considérer que celle qui gagne 1 500 € net par mois est riche. Selon une autre vision, la personne qui joint difficilement les deux bouts avec un salaire mensuel, tout de même, de 15 000 € net, pourra aussi considérer qu'elle manque de moyens par rapport à celle qui gagne 50 000 € mensuels. Etc., on n'en finit pas !

C'est vraiment subjectif ! Nous dirons donc, arbitrairement, qu'on est riche, au premier degré, avec un revenu net de 4 000 € / mois et par UC.

Plutôt que de parler de riche, parlons de la personne ou plutôt du foyer qui vit confortablement et de manière aisée, sans bling-bling et montre à 25 000 € au poignet − montre qui donne, faut-il le rappeler, la même heure qu'une bonne montre à 199 €, sauf que devant les incultes et les grossiers personnages de la rue d'en bas, cela fait mieux d'avoir une Rolex. Étant aisé, on peut être logé de manière décente et en accession à la propriété, manger bio toute l'année, aller 2 ou 3 fois au cinéma par mois, partir 15 jours en vacances d'hiver et 15 jours en été… bref, avoir une vie relativement sereine permettant aussi d'être riche intellectuellement, culturellement et socialement. Sans ostentation inutile !

Revenu net ? On entend par revenu net, tous les revenus, aussi bien ceux salariaux, que ceux non salariaux par exemple des travailleurs non-salariés (TNS), auxquels s'ajoutent les revenus du patrimoine mobilier (comptes d'épargne, valeurs mobilières, etc.) et immobilier (notamment les revenus fonciers), diminués des cotisations sociales diverses (Urssaf pour les TNS), la CSG-CRDS comprise.

Pour rappel : en 2013 selon l'INSEE, le revenu net moyen mensuel des salariés du privé comme du public était de 2 202 €. On peut estimer, en euro constant, que ce revenu a très peu progressé entre 2013 et 2017, et est donc, de fait, une bonne référence.

UC ? Unité de consommation ! Dans notre approche, nous estimons que l'UC est plus pertinente que la part d'imposition, car l'UC tient compte notamment de l'âge des personnes d'un foyer, ce que le fisc ne fait pas, ou très peu. Selon l'OCDE (et l'INSEE), le comptage en UC se fait ainsi au niveau du foyer :

- le premier adulte = 1 UC,

- les personnes suivantes de 14 ans et plus = 0.5 UC,

- les enfants de moins de 14 ans = 0.3 UC.

Exemple : un couple avec 2 enfants, l'un de 14 et l'autre de 13 ans, comptabilise 2.3 UC (soit : 1 UC + 0.5 UC + 0.5 UC + 0.3 UC).

Ainsi, nous aurions la grille suivante : 

Composition du foyer

Nombre d'UC

Riche avec un

revenu net de

1 personne seule (0 personne à charge)

1

4 000 € mensuels

Un couple (0 personne à charge)

1.5

6 000 € mensuels

Un couple avec 2 enfants (1 mois et 5 ans)

2.1

8 400 € mensuels

Un couple avec 2 enfants (13 et 14 ans)

2.3

9 200 € mensuels

Un couple avec 2 enfants majeurs

2.5

10 000 € mensuels

Etc.

 

 

       

Ces foyers sont-ils aisés ? Ceux qui ont vécu des situations similaires répondront par l'affirmative, sans pour autant avoir une Rolex à chaque poignet et manger midi et soir chez Bocuse ou chez Joël Robuchon, bien qu'un extra par an puisse s'envisager… bien sûr sans déboucher un double-magnum de Cheval blanc 1999 !

Riche en étant dans la grille ci-dessus ? Nous pensons raisonnablement que 97 % des quelque 47 millions d'individus qui composeront en 2019 le corps électoral français des élections européennes, seront d'accord.

Dans cet esprit, quid de l'impôt sur le revenu des personnes physiques (IRPP) ?

Ayant déterminé quel foyer fiscal est loin d'être pauvre (Cf. : la grille ci-dessus), il faut maintenant le fiscaliser de manière juste et équitable sans pour autant être "égalitaire" comme semble, encore, le vouloir l'imposition à la française. En effet, notre fiscalité sur l'IRPP est dite égalitaire, car elle tient compte notamment des revenus, du nombre de personne, mais aussi et surtout du montant des déductions fiscales que le foyer assujetti peut effectuer. Et là, c'est l'inégalité qui l'emporte, car plus on est riche et plus on peut optimiser son revenu fiscal… jusqu'à n'être plus du tout imposable.

De plus, dans le système actuel, ce qui compte ce n'est pas toujours ce que l'on gagne. C'est ce que l'on déclare avoir gagné ! Il y a là une énorme différence, sauf pour la personne salariée, sans aucune niche fiscale, qui voit apparaître, sans rien faire, chaque année sur sa feuille préremplie, son revenu imposable (d'ailleurs toujours supérieur au net, comme cela figure sur sa feuille de salaire) et, d'un seul clic, si elle est sur Internet, le montant de son IRPP.

Pour mettre tout le monde sur le même pied, 2 remèdes sont susceptibles, en première analyse, de promouvoir plus d'équité fiscale :

- la suppression des niches de défiscalisation, à l'exception de celles des services à la personne et des œuvres reconnues d'utilité publique. Avec une telle démarche, l'État décevra plusieurs dizaines de milliers de foyers fiscaux, mais s'assurera peut-être (le contribuable est versatile) le soutien de plusieurs millions, tout en dégageant des dizaines de milliards d'économies fiscales (estimées − par l'État lui-même − à 104 milliards d'euros chaque année 1 (Rapport de l'IGF, en janvier 2011)) ;

- le barème à taux progressif, tel qu'imaginé par Thomas Piketty et ses compères Camille Landais et Emmanuel Saez (Cf. : Pour une révolution fiscale, Édition Seuil (2011) La République des idées, p. 79).

Alors, riche ou pas, dès 4 000 € net par mois et par UC, telle est la question ? Voici un thème qui peut rapporter gros pour l'élection de 2022 ! Quel parti politique − crédible − saura le porter et ne pas le laisser uniquement aux partis − populistes − qui veulent tous, par pure démagogie, raser plus ou moins gratis ?

 

1. C'est : 15 fois le budget 2018 de notre Justice, qui, en part relative, est l'un des derniers de l'UE, Roumanie et Bulgarie comprises ! ; 1,2 fois le déficit budgétaire prévu en 2018 ; 2,5 fois la charge de dette pour 2018 ; 2 fois le budget des politiques sociales prévues en 2018 ; etc.

 

Crédit Photo : tempsreel.nouvelobs.com


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