Sainte « ANPEDIC », priez pour nous, pauvres chômeurs

par Yohan
mardi 6 mai 2008

La fusion de l’ANPE et de l’UNEDIC peut-elle s’envisager dans le sens d’une amélioration des services rendus aux demandeurs d’emploi ?

Deux signaux récents laissent présager du contraire.

Ainsi, le durcissement du contrôle sur les chômeurs, sanctionnant ceux qui refuseront deux offres d’emploi valables, vient ajouter encore à la culpabilisation des chômeurs.

A quoi bon ergoter sur le sens de cet "OVE" quand on connaît la difficulté de l’ANPE à proposer ne serait-ce qu’une offre d’emploi réellement valable à chacun. Combien de chômeurs se sont vu répondre "le poste est déjà pourvu" à une mission proposée par l’agence ?

Seule exception peut-être, ce sont ces emplois dits en tension, que le gouvernement espère céder aux plus faibles, quitte à passer au forceps.

Prompt à brandir ces fameuses 500 000 offres d’emploi qui ne trouveraient pas preneur, ce dernier omet d’en dresser la liste. Concernant les secteurs en tension, il oublie également de préciser combien les conditions de travail y sont parfois intolérables.

La distribution, l’hôtellerie, la propreté, la sécurité, le BTP, les services à la personne font partie de ces branches dites en tension. Soumises à un turn-over récurrent, lié pour partie à un déficit d’attractivité des salaires ou à des considérations de pénibilité, ces secteurs continuent cependant d’être "bichonnés" par l’Unedic et l’ANPE.

Les conseillers de l’agence sont sommés de se mettre en quatre, afin de pourvoir les postes vacants, quitte à financer sur les deniers de l’Assedic des formations qualifiantes, pour remédier au problème de la pénurie des vocations. Une largesse qui pourtant se refuse au quidam qui entendrait tout simplement suivre son propre cheminement professionnel hors de ce chemin balisé et pas toujours pavé des meilleures intentions.

Il est à craindre que le gouvernement ne préfère pour l’heure se tourner vers le modèle britannique de traitement du chômage, avec sa potion amère qui laisse l’individu devant la perspective d’une allocation indigne, afin de stimuler son désir de renouer au plus vite avec le travail.

Ce que l’on sait moins, c’est que les chômeurs français comptent déjà parmi les plus mal lotis de l’Union, s’agissant de l’indemnisation moyenne du chômage, nos voisins hollandais et danois se montrant par exemple plus généreux.

Si ces derniers ont eux aussi durci les conditions d’accès à l’assurance chômage, la durée d’indemnisation peut aller chez eux jusqu’à quatre ans et les dépenses de formation y sont nettement plus élevées que chez nous.

Deuxième sujet d’inquiétude est la question des arbitrages futurs sur les prestations d’accompagnement des demandeurs d’emploi, que la fusion ne va pas manquer de requestionner.

Jusqu’ici, l’Assedic s’est montrée bien généreuse avec ses grands opérateurs privés qu’elle rémunère en moyenne autour de 3 800 € pour un accompagnement à l’emploi, une prestation dont l’efficacité est par ailleurs contestée tant par les syndicats que par l’Agence pour l’emploi.

L’ANPE se montre moins diserte sur ses propres opérateurs privés qu’elle rémunère pourtant à un taux bien inférieur que sa confrère : 780 € en moyenne pour le suivi de près de trois millions de chômeurs.

Des prestataires au demeurant aussi dociles qu’efficaces, témoin une étude récente de l’ANPE qui souligne par exemple l’efficacité du BCA (bilan de compétences approfondi) en matière de retour à l’emploi qualitatif. Un rendement qui apparaît bien supérieur aux autres prestations de l’agence et ceci pour un prix très sage.

Aussi, à l’heure du renouvellement de ses marchés publics, on pensait que l’ANPE allait marquer sa satisfaction en récompensant ses loyaux sujets.

Las ! l’examen des premiers résultats montre que l’agence opère un revirement totalement incompréhensible en écartant massivement les opérateurs historiques, ceux-là mêmes qui avaient fait l’objet de l’étude, renouvelant pour le coup son vivier de prestataires sur la base d’un cahier des charges nettement moins ambitieux.

Encore une fois, une décision qui confirme que les rapports ne sont faits que pour être enterrés, une fois lus.

Vu le prix scandaleusement bas où se signent, en ce moment même, les nouvelles habilitations (autour de 400 €), il est clair que la qualité du service n’est plus une priorité pour l’agence.

Un bilan de compétences au rabais semble se profiler, auquel il convient sans hésitation de retirer le A de Approfondi. D’aucuns allant même plus loin, en suggérant de retirer le B de Bilan.

Ainsi, il apparaît clairement que derrière le discours volontariste, c’est bien l’obsession du chiffre qui transparaît en filigrane de ces derniers arbitrages.

Il est clair que dans notre pays, le fossé entre salariés et demandeurs d’emploi continue de se creuser.

 

 


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