Sanctions contre l’économie russe : le FMI tire ŕ vue !

par Christophe CH
samedi 4 février 2023

Stupeur et tremblements sur les antennes de LCI au rendez-vous quotidien de David Pujadas ! Le Fonds Monétaire International, qu’on aurait quelque mauvaise foi à associer à un organe de propagande russe, vient de lâcher une bombe : contrairement aux prévisions apocalyptiques du prophète de Bercy Bruno Le Maire, l’économie de la Russie, loin de sombrer dans les affres de la récession, connaîtrait pour l’année 2023 une timide croissance de 0.3 %. Pire, pour 2024 et en l’état actuel des données disponibles, elle coifferait sur le poteau les performances européennes et états-uniennes avec une prévision de 2.1 % contre respectivement 1.6 % et 1 %. Pire, la récession prévue par le FMI pour l’année 2022 pour la Russie ne sera finalement pas de 8.6 % mais de 2.2 %.

« Est-ce qu’on se serait planté ? », ose alors la mine grave ce cher David Pujadas, en se tournant vers la journaliste en charge de commenter les graphiques. Et celle-ci d’opiner : oui David, oui on s’est plantés , et pas qu’un peu, avec la cascade des sanctions censées fondre sur le Kremlin telles une invasion de sauterelles. Le rouble qu’on était supposer voir s’effondrer crâne désormais au dessus de l’euro, suite aux mesures immédiates prises par la Banque Centrale Russe. Quant aux exportations de pétrole, de gaz et de charbon, les voilà qui flirtent avec le niveau qu’elles avaient juste avant le démarrage de la guerre en Ukraine ; 24,6 milliards exportés en novembre 2022 ! La Russie en a vendu certes beaucoup moins mais beaucoup plus cher.

Au détriment de qui ?

Aux commandes européennes manquantes, la Russie a substitué de nouveaux clients, sourds quant à eux au langage des sanctions universelles des champions de Washington et de Bruxelles. Au premier rang desquels la Chine (qui a doublé ses exportations), l’Inde (qui les a multipliées par 15) et la Turquie (qui les a multipliées par 3). Nouveaux clients à qui nous rachetons en sous-main et sans trop le dire du pétrole russe à prix fort.

Quant aux embargos sur les micro processeurs et les semi conducteurs qui étaient censés mettre à terre l’économie de l’armement et de produits de grande consommation : là encore la Russie a trouvé la parade. Selon une enquête de l’agence Reuters, la Russie parvient à contourner les embargos sur les semi conducteurs en multipliant les importations depuis Hong Kong, la Turquie et l’Estonie. Quant aux micro processeurs, l’Arménie fournit le différentiel. Soient en tout 2.6 milliards de composants électroniques occidentaux achetés malgré les sanctions.

Face à l’économiste de plateau qui fait mine de découvrir les lois de marché élémentaires en se retranchant derrière celle des grands principes, notre cher David s’emporte presque : « Mais ces sanctions nous ont pénalisé ! », lâche t-il avec plus de six mois de retard comme s’il venait de découvrir la formule secrète des hydrocarbures. « Oui on se sanctionne nous-mêmes », finit par avouer, dépité, le pauvre économiste, avant d’ajouter in fine : « Mais comment pouvait-il en être autrement ? ».

Mis au pied du mur par le rapport de ce Vatican de la Mondialisation Libre et Non Faussée qu’est à leurs yeux le FMI, nos va-t’en-guerre adeptes de la fessée punitive n’ont plus guère de choix que d’admettre s’être plantés dans toutes les grandes largeurs depuis fin février 2022, sans toutefois aller jusqu’à s’en excuser. C’est pas moi c ‘est l’autre ! Autrement dit tous ces pays voyous. Soit au bas mot entre les 2/3 et les 3/4 de la planète qui ont refusé de les suivre dans ce combat perdu d’avance.

Ce qu’on savait pourtant depuis le début.

Laissons si vous m’y autorisez de côté les discours russophobes autant que les envolées poutinolâtres habituelles, desquels l’auteur de ces lignes se tient à juste distance, tant vis-à-vis des uns que des autres. En temps de guerre comme en temps de paix, il est coutume que d’avoir recours à l’arme de la propagande, qu’elle soit d’état ou de nature idéologique, et les deux forces en présence ne s’en sont jamais privées. C’est comme on dit cyniquement « de bonne guerre ».

Ce que loin des postures adoptées sur nos plateaux depuis un an bientôt démontrent les faits, à cette heure où inflation, liquidations judiciaires, dépôts de bilans et appauvrissement d’une part significative de la population occidentale se multiplient, c’est que l’ensemble des orientations et décisions prises par les dirigeants occidentaux se sont révélées, plus que contre productives, suicidaires. Nos champions auto-proclamés du maniement des tableurs Excel se voient dorénavant désavoués par les institutions qu’ils vénèrent et ne peuvent guère qu’hocher de la tête en espérant que l’on regarde ailleurs. Hier l’ONU, forcée de reconnaître qu’à la seule exception de l’Afrique du Sud la politique dite de sanctions économiques prise à l’encontre d’un pays mis au banc des accusés s’était toujours montrée inopérante. Et aujourd’hui le FMI. C’est plus qu’un simple rappel à l’ordre, c’est un désaveu.

Un désaveu qui mériterait – soyons fous – des sanctions.

La petite innovation du jour concernant la Russie, c’est qu’à l’inefficacité systémique de la guerre économique qui lui est faite s’est rajoutée dans la pochette surprise le fait d’avoir tiré une balle dans le pied des intérêts de son propre peuple. Que vous soyez convaincu que le diable se loge au Kremlin ou à Kiev n’y change rien : tous deux y avez perdu. Dixit le FMI.

 


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