Sauver la liberté d’expression : Mission impossible ?

par Emin Bernar
lundi 16 janvier 2012

J‘ai relu la rubrique «  Qui sommes-nous ?  » d‘Agoravox :«  Les principales missions d'Agoravox sont l’information à l’égard du public et le soutien à la liberté d’expression  ».

La proposition de loi turcophobe déposée par Mme Valérie Boyer, députée UMP, votée le 22 décembre à l'Assemblée nationale par un quarteron de députés aux ordres, et qui sera soumise au Sénat le 23 janvier, donne une nouvelle urgence à cette mission sacrée ! Car le pire est à craindre …

Que nos politiciens de droite comme de gauche, se prêtent aux manœuvres communautaristes du lobby arménien est profondément choquant du point de vue de la France, première à reconnaître la République de Turquie, créée le 29 octobre 1923 par Mustafa Kemal Atatürk. Notre République est-elle à vendre pour quelques voix de plus ?

Il ne s'agit de rien de moins que de sauver la liberté d'expression. Ce n'est pas moi qui le dit, ce sont deux députés de la majorité : Jacques Myard a ironisé, déclarant à l'AFP : "bientôt, on pénalisera ceux qui contestent que le Christ a été crucifié !" Lionnel Luca a jugé que "l'on est arrivé à un stade où, au pays des droits de l'Homme, il est interdit de parler. On est arrivé à un pays stalinien !"

Ce qui est en cause c'est aussi la liberté des historiens. Le lobby arménien a déjà en son temps tenté d'empêcher la nomination de Gilles Veinstein au Collège de France au motif qu'il ne partageait pas leurs thèses. Désormais leur ennemi numéro 1 qu'ils poursuivent inlassablement dans leurs publications, pour le même grief, est Pierre Nora, le plus éminent des intellectuels de notre pays, président de l'association Liberté pour l'histoire. Aux Etats-Unis, il s'agit d'abord de Bernard Lewis, grand islamologue, qu'ils ont fait condamner par un tribunal français ; et aussi de Guenter Lewy, spécialiste de l'histoire ottomane, qu'ils ont poursuivi en justice pour corruption ; mais ils ont perdu et ont dû se confondre en plates excuses !

Mais quel est le fondement idéologique de cette proposition de loi ?

Samedi matin, sur France Culture, l'émission "Répliques" présentée par Alain Finkielkraut, a permis de tout comprendre ; l'invité était Pierre Nora , président de l'association "Liberté pour l'histoire". Pierre Nora a une fois de plus critiqué la proposition de loi. Au contraire Finkielkraut a défendu les idées du lobby arménien contre la Turquie. Il s’est emporté contre le premier ministre, Recep Tayip Erdogan, et contre son ministre des affaires étrangères Ahmet Davutoglu. Il a affirmé la «  non-européanité  » de la Turquie. CQFD ! Puis il a ré-enfourché son vieux cheval : le problème de la France, ce sont les immigrés. Déjà en 1989, M. Finkielkraut s’alarmait devant des jeunes lycéennes qui portaient un foulard à Creil. Pierre Nora n’a pas manqué l’occasion de prendre Finkielkraut en flagrant délit : «  vous défendez l’idéologie du pouvoir  ! » L'idéologie du pouvoir - et de l’extrême-droite - tel est le fondement de la proposition de loi ; cette idéologie c'est la turco-phobie, l'islamophobie, le racisme, la xénophobie.

 Décidément, il faut sauver la liberté d’expression et en même temps l’amitié historique, qui remonte à François 1er et Soliman le Magnifique, entre la France et la Turquie . Il faudra s’en souvenir dans quelques mois : aux urnes, Citoyens !

 


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