Siné contre Torquemada

par Lavigue
vendredi 1er août 2008

L’affaire Siné n’éclate pas dans le ciel serein de la période estivale, elle couvait depuis de nombreuses années et était amenée à connaître un dénouement ubuesque. Val détestait cordialement Siné qui le lui rendait bien.
Tout les opposait : le vieux trublion resté fidèle à ses idéaux de toujours et le directeur de Charlie devenu néo-conservateur, dans la mouvance d’une intellingentsia française revenue de ses années gauchistes ou communistes, ne cachait pas sur les plateaux télévisés son antipalestinisme, son islamophobie et sa sympathie à l’égard des Etats-Unis.
Il lui fallait un prétexte : un propos supposé antisémite, crime impardonnable que d’aucuns considèrent comme un péché irrémissible passible de l’exclusion de la vie intellectuelle.

Dans une chronique, Siné fustige l’opportunisme du digne fils de son père Jean Sarkozy s’apprêtant à épouser Jessica Darty et à se convertir au judaïsme. "Il ira loin ce petit", ajoutait-il.

Val n’a pas lu l’article, mais M. Askolovich accuse dans une intervention à la radio Siné d’antisémitisme et le traite d’ordure. Il prend soin de dire que ces indignes propos antisémites ont été tenus dans un journal (Charlie Hebdo) qui lui ne l’est pas.

Dans le sillage de cette intervention, Val met un terme à la collaboration de Siné au journal.
Bref le caricaturiste iconoclaste est viré.

Dès lors, la mise à mort peut commencer.

En France, on croit rêver, des commissaires politiques du politiquement correct et de la bien-pensance ruent dans les brancards.

L’ex-communiste Adler de L’Humanité, aujourd’hui au Figaro, désigne Siné à la vindicte publique, BHL se fend d’un article déplorable où, au passage, il égratigne Badiou (un vrai philosophe lui) et avec les jugements à l’emporte-pièce qui le caractérisent parle de "l’antisémitisme rance de Siné".



Joffrin, jamais en reste, confond vitesse et précipitation et développe un argument spécieux, les musulmans choisissent leur religion alors que les juifs ne peuvent pas choisir leur race. Bigre ! Les juifs, une race ? De deux choses l’une où il s’est pris les pieds dans le tapis poussiéreux de sa pensée, ou il essentialise, il biologise le judaïsme, ce que nous pensions tous être une religion.

Il est vrai que les délires nazis semblent avoir profondément marqué les esprits.
Et le retour du refoulé, comme le disait Freud, personne n’en est à l’abri.

SOS Racisme, le Crif et le ministre de la Culture se rangent du côté des spadassins de la pensée unique.

Siné est voué aux gémonies, cloué aux piloris aujourd’hui, et demain une Fatwa de nos ayatollah de la rupture avec la tradition des lumières ordonneront qu’un bûcher soit dressé : il faut éradiquer la bête immonde.

Ce que je veux dénoncer c’est la mise en place d’une police de la pensée qui balise le terrain de la liberté d’expression.

Une novlangue support de cette pensée s’installe insidieusement en France.

J’en veux pour preuve le glissement du sens des mots. Un anti-sioniste est un antisémite, la critique de l’Etat d’Israël a conduit honteusement Edgard Morin à être condamné pour antisémitisme, jugement invalidé en appel pour l’honneur de la France. Norman FINKIELSTEIN, intellectuel juif américain, a été écarté de son poste de professeur à l’université pour avoir écrit un brûlot sur l’instrumentalisation de la Shoah à des fins politiques par Israël.

L’éditeur français dut s’excuser devant ses futurs juges comme en 1936 dans les pires procès staliniens. J’ajoute que cet homme fut arrêté à l’aéroport de Tel-Aviv et refoulé par les autorités Israéliennes, considéré comme persona non grata.

Noam Chomsky, autre citoyen américain d’origine juive et intellectuel de renom international, fait l’objet de campagnes de calomnies : révisionnisme, Pol Potien, défenseur de Faurisson alors que cet homme consacre sa vie à questionner et à tenter de comprendre le monde dans lequel il vit. C’est vrai qu’il défend les opprimés, ceux que son pays anéantit dans des guerres ignobles.

Nous savons le parcours de Siné qui ne prétend pas à la sainteté, mais qui prit fait et cause pour l’indépendance de l’Algérie, signa une pétition pour que l’Etat français reconnaisse sa responsabilité vis-à-vis des juifs que l’on conduisait à la mort dans les camps de concentration. Dans le droit fil de ces engagements, Siné continue envers et contre tous à soutenir le droit aux Palestiniens à faire valoir leurs droits sur la terre ancestrale dont ils furent dépossédés.

Nos maîtres-censeurs, en service commandé, veulent faire taire et empêcher de dessiner cet éternel révolté. Comment s’y prennent-ils ? Ils l’accusent d’antisémitisme, l’opprobre des temps modernes qui vous retranche de l’espèce humaine, qui fait de celui qui en est simplement soupçonné un mort-vivant.

VAL, ADLER, ASKOLOVICH, BHL, JOFFRIN, je vous le dis en portant une telle accusation à l’encontre d’un homme de 80 ans, bien moins irréprochable que vous, c’est un mort que vous assassinez.

 


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