Standard & Poor’s : La vérité est ailleurs

par kali
lundi 16 janvier 2012

Début janvier, Nicolas Sarkozy annonçait son intention de mettre en oeuvre la taxation des transactions financières. Lors d'un discours à l'Elysée vendredi 6 janvier, il déclarait "Le fait que les transactions financières soient les seules transactions exonérées de toute taxe, c'est inacceptable".

Autant dire que ce discours a échaudé la plupart des dirigeants de la zone euro. Le président du Conseil italien Mario Monti, a rappelé qu'à ses yeux, il était "nécessaire que les différents pays européens n'aillent pas en solitaire dans l'application". L'Allemagne est favorable au principe d'une telle taxe, mais veut une solution européenne. (challenges.fr)

Moins d'une semaine plus tard, l'agence Standard & Poor's dégradait la note de la France, qui perd ainsi son fameux 3A.

La France sort donc du peloton de tête des 5 pays arborant un AAA et se retrouve "isolée de l'Allemagne", expression largement diffusée depuis cette annonce dans les médias.
 
 
Tout cela n'arrive évidemment pas par hasard. A trois mois des élections présidentielles françaises et..quelques jours après l'entreprise téméraire de notre hyper président consistant à vouloir faire cavalier seul sur la taxation des transactions financières histoire de nous montrer ses biscoteaux.
 
Or, taxer les transactions financières ne pouvaient que déplaire aux banques - qui l'ont exprimé- et aux groupes financiers qui vivent de la spéculation. Même si l'annonce du déclassement de la France est assortie de celles de la dégradation d'autres pays.
 
Etranges chronologies...
 
D'abord, ce qui est frappant en général, ce sont les séquences de la relation anachronique qui s’est instaurée entre l’Europe et les agences de notation.
Prenons une chronologie constatée au mois de décembre dernier :

Lundi 5/12 : Merkel et Sarkozy se rencontrent pour préparer leur projet de nouveau traité européen. Le projet prévoit d'instaurer des sanctions en cas de dérapage des finances publiques et des règles d'or imposant le retour à un quasi-équilibre budgétaire.
Lundi 5/12 soir : "Standard & Poors annonce le placement sous surveillance la note de de six pays européens bénéficiant encore du plus haut rang, AAA : l'Allemagne, la France, les Pays-Bas, l'Autriche, la Finlande et le Luxembourg -ainsi que neuf autres pays de la zone euro. La notation pourrait être abaissée d'un cran au niveau de AA+ et même de deux crans dans le cas de la France."
http://www.lesechos.fr/entreprises-secteurs/finance-marches/actu/0201779661591-standard-poor-s-menace-de-degrader-la-france-et-l-allemagne-258803.php

Jeudi 8/12 : Un accord est trouvé entre 23 pays de l’Europe.

Vendredi 9/12 : L’agence Moody’s annonce l’abaissement de la note de 3 des plus importantes banques françaises. http://lci.tf1.fr/economie/conjoncture/moody-s-degrade-trois-banques-francaises-6869971.html
 
Pour le présent, cette dégradation de la note française est-elle un avertissement, une façon de tancer très vertement le président sarkozy au travers de ce camouflet ? Car elle survient bien à-propos, même si elle est assortie d'annonces concernant d'autres pays.
 
 
 
Qui est derrière Standard and Poor's ?
 
 
 
 "Le site Internet de S&P nous indique que l’entreprise fondée en 1860 a été racheté par McGraw-Hill Companies en 1966. Mais qui est McGraw Hill ?
Quand on s’intéresse aux possesseurs de McGraw Hill, on retrouve de drôles d’entreprises :
- Capital World Investors, banque d’investissement dont l’objet est de spéculer sur les marchés internationaux.
- The Vanguard Group banque d’investissement dont l’objet est de spéculer sur les marchés internationaux.
- State Street Corporation, banque d’investissement dont l’objet est de spéculer sur les marchés internationaux.
- Oppenheimer Funds, banque d’investissement dont l’objet est de spéculer sur les marchés internationaux.
- Jana Partners, banque d’investissement dont l’objet est de spéculer sur les marchés internationaux.
- Price Associates, entreprise de consulting en management.
- Dodge & Cox, banque d’investissement dont l’objet est de spéculer sur les marchés internationaux.
- BlackRock Institutional Trust Company, banque d’investissement dont l’objet est de spéculer sur les marchés internationaux.
- Fiduciary Management, banque d’investissement dont l’objet est de spéculer sur les marchés internationaux.
- Ontario Teachers’ pension plan board, fonds de pension dont l’objet est de spéculer sur les marc
Le site Internet de S&P nous indique que l’entreprise fondée en 1860 a été rachetée par McGraw-Hill Companies en 1966...
 
Les grands actionnaires de Standard & Poor’s sont donc majoritairement des banques d’investissement qui utilisent les informations de S&P pour spéculer et gagner plus d’argent grâce aux prédictions auto-réalisatrices de l’agence de notation comme l’explique cette étude du FMI de 1998 qui conclue que « les crises monétaires peuvent être totalement obtenue par la spéculation d’acteurs privés et décorrélées des politiques publiques. Plus spécifiquement, les crises monétaires peuvent résulter de pensées auto-réalisatrices auprès des spéculateurs du marché des changes. » Dont Standard & Poor’s est l’entreprise qui donne le la."
 
 
 
"Elles n'en sauraient pas plus que vous et moi ? 
 
 
Si on écoute l’interview de David Thesmar (France info le 9 décembre), Professeur d’économie à HEC et auteur du « grand méchant marché", on est frappé de l'entendre dire clairement que ces agences n’en savent pas plus que vous et moi sur la situation des pays et des banques. En gros, les consultants glanent les informations qui fondent leurs alertes sur... le web !
 
Ecouter l'interview de David Thesmar sur france info (à partie de la minute 4°51) :
 
 
 
 
 
Conclusion


Si ces agences ont un rôle de "certification" de la solvabilité des pays, quel est leur code de déontologie ? Car on ne peut s'auto-proclamer censeur sans avoir une charte d'éthique, ainsi que des règles partagées et transparentes..Ce qui ne semble pas être le cas.
 
En effet,
 
"Fin 2003, le groupe italien Parmalat coule, un trou de 14 milliards d’euros dans les comptes. Quelques semaines avant le krach, l’antenne italienne de Standard & Poor’s créditait encore Parmalat de son triple AAA- couvrant, volontairement ou non les malversations. Courant 2008, la crise des subprimes s’étend. Les banques vacillent ou s’écroulent, bourrées de titres financiers pourris. Des "junk bonds" pourtant évalués par les agences – crédités même d’un triple AAA pour la moitié d’entre eux. Et en France même : pour l’Assemblée générale de 2008, Fitch Ratings, Moody’s et Standard & Poors accordent tous des A, des AA et des + à Natixis."


 Deux poids, deux mesures..
 
 
Hypothèse
 
La dégradation de la note de la France à trois mois des élections, serait-elle d'abord une sanction de la France pour avoir voulu toucher aux sous des spéculateurs au travers de la taxe sur les transactions financières ? Accessoirement, ce serait une mise en garde adressée au prochain président et son gouvernement, et ce, avant d'être la sanction de l'état de la dette.
 
Peut-être. Cette hypothèse est envisagée par plusieurs analystes. Mais alors, qui tire les ficelles ?

Lire l'article complet, et les commentaires