TAFTA+COP21, le marteau et l’enclume

par Francis, agnotologue
lundi 14 décembre 2015

Nous assistons aujourd’hui à un événement majeur et grandiose, comme le disent si bien les Tartufes qui manigancent ces choses : la reddition définitive et totale des pouvoirs politiques nationaux devant le pouvoir mondial des multinationales.

 

De quoi s’agit-il ?

Le piège qui réduira les peuples européens à un esclavage de fait sinon de forme, se referme inexorablement devant nos yeux ébahis par le tapage fait autour de la COP21, dont la médiatisation outrancière n’a d’équivalente que la discrétion scandaleuse derrière laquelle se cache une démarche complémentaire et tout aussi inexorable, je parle ici des négociations autour du TAFTA.

Le TAFTA ou TTIP, l’accord commercial secret négocié par Bruxelles et Washington, coûterait à l’Europe 600 000 emplois. En France, l’accord entraînerait aussi une baisse des salaires de 5 500 euros par travailleur et le transfert de 8 % du produit intérieur brut (PIB) du travail vers le capital.

Cet accord négocié en secret par la Commisson européenne sous le contrôle des chefs d'Etats de l'UE , est une resucée de l'AMI négocié lui aussi secrètement entre 1995 et 1997 par les vingt-neuf Etats membres de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Divulguée in extremis, notamment par Le Monde diplomatique, la copie souleva une vague de protestations sans précédent, contraignant ses promoteurs à la remiser. Vingt ans plus tard, le voilà qui fait son grand retour sous un nouvel habillage.

Le piège qui se referme sur nous consiste à nous enfermer entre le marteau et l'enclume, le marteau étant les accords contraignants dans le cadre de la COP21 qui obligeraient nos nations à mettre en œuvre dans des délais à plus ou moins brèves échéance mais sans faute sous peine de lourdes amendes, des politiques supposées réduire nos émissions de gaz dits à effet de serre (GES), pendant que dans le même temps, la Commission fait diligence pour mettre en place l'enclume, je parle du fameux TAFTA : on évoque un aboutissement pour début 2016 

Peu importe aux yeux de ces monstres froids quelles politiques et avec quels effets les Etats mettront en oeuvre, pourvu qu‘elles soient acceptées par les peuples et pour cela, elles seront vendues au motif populiste de préservation de l'avenir de la planète, c’est le but de tout ce tapage médiatique ; au passage, les Etats pourront subventionner largement des énergies alternatives et dites vertes pour le plus grand profit parfois, des pollueurs actuels eux-mêmes : c’est-ce qu’on appelle faire coup double.

 

La suite est parfaitement prévisible 

Les politiques qui seront mises en œuvre avant la date fatidique d’application du TAFTA auront peut-être des chances d’échapper au fourches caudines des tribunaux internationaux. Il en sera tout autrement pour toutes celles, c'est-à-dire la plus grande masse d’entre elles sinon toutes, qui seront prises après.

C’est alors que les pétroliers, gaziers et autres multinationales, mais pas seulement, forts de leurs bons droits, pourront légitimement se prévaloir du TAFTA et ne se priveront pas de nous faire tous les procès qu’ils jugeront utiles dès lors qu’ils pourront invoquer un quelconque manque à gagner réel, supposé ou seulement espéré, occasionné par des politiques étatiques accusées d’obérer leurs activités polluantes et lucratives. Préparez vos mouchoirs, vos potes monnaies, bas de laine et bijoux de famille !

Est-il nécessaire de souligner ici le rôle d’idiots utiles des écologistes sincères dans cette histoire ? Je ne tirerai jamais sur les ambulances.

 

Le Traité transatlantique, un typhon qui menace les Européens : ''Négocié en secret, ce projet ardemment soutenu par les multinationales leur permettrait d’attaquer en justice tout Etat qui ne se plierait pas aux normes du libéralisme''

 ''Le Mécanisme de règlement des différends entre investisseurs et Etats" ou ISDS. C’est un tribunal international secret et qui permet aux entreprises d’attaquer les Etats en justice pour presque n’importe quelle raison qui affecterait leurs investissements.

 

Ce qui nous attend quand le TAFTA sera en vigueur 

SÉCURITÉ ALIMENTAIRE : Nos normes plus strictes que les normes américaines et que les « normes internationales » (niveaux de pesticides, contamination bactérienne, additifs toxiques, OGM, hormones, etc.), pourraient être condamnées comme « barrières commerciales illégales ».
GAZ DE SCHISTE : Les gouvernements européens ne réglementeraient plus les exportations de gaz naturel vers les nations TAFTA. La fracturation hydraulique pourrait devenir un droit pour les sociétés qui pourraient exiger des dommages et intérêts auprès des nations qui s’y opposent.
EMPLOI : Les entreprises souhaitant délocaliser dans les états concernés par le projet TAFTA où les salaires sont inférieurs, seraient protégées. L’Inspection et le code du travail devenant illégaux, plus de préavis de licenciement. Pôle emploi devrait être privatisé ou serait attaqué en justice par les sociétés d’intérim pour concurrence déloyale. Les conséquences du TAFTA sur le taux de chômage en Europe ne seraient que néfastes.
SANTÉ & RETRAITES : Les médicaments pourraient être brevetés plus longtemps, les groupes pharmas pourraient bloquer la distribution des génériques. Les services d’urgence pourraient être privatisés. Les Assurances privées pourraient attaquer en justice les CPAM pour concurrence déloyale. Les retraites par répartition pourraient être démantelées, les compagnies d’assurances se substitueraient aux CRAM,ARRCO, AGIRC…
EAU & ÉNERGIE : Ces biens seraient privatisables. Toute municipalité s’y opposant pourrait être accusée d’entrave à la liberté de commerce, idem pour l’énergie, qu’elle soit fossile, nucléaire ou renouvelable. La sécurité nucléaire serait réduite. Le prix du gaz et du kW seraient libres.
LIBERTÉ & VIE PRIVÉE : Grâce à la révolte publique, les sociétés espérant enfermer et monopoliser l’Internet ont échoué l’année dernière à faire adopter leur ACTA répressif ; des textes plus pernicieux sont dans le TAFTA.
SERVICES PUBLICS : Le TAFTA limiterait le pouvoir des États à réglementer les services publics tels que : services à la personne, transports routiers, ferroviaires, etc. et réduiraient les principes d’accès universel et large à ces besoins essentiels.
CULTURE & PRODUCTION ARTISTIQUE : Les gros producteurs d’audiovisuel pourraient interdire les productions privées ou professionnelles à faible budget comme youtube, vimeo, dailymotion, les financements collaboratifs seraient rendus illégaux. Les musées nationaux perdraient leur droit de préemption sur les trésors artistiques nationaux au profit de collectionneurs privés.
ENSEIGNEMENT : Les universités privées pourraient attaquer en justice l’Éducation nationale pour concurrence déloyale. De la maternelle au doctorat, les sociétés privées contesteraient aux écoles, cantines scolaires et resto U, toutes subventions municipales, régionales ou nationales.


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