Tibet et Démocratie

par Whackangel
mercredi 15 février 2012

Le mercredi 8 Février 2012, nous célébrions l’officieuse Journée Internationale pour la Libération du Tibet. J’ignorais ce fait, jusqu’au jour-même, et n’en vu aucune mention dans les médias classiques ; c’est une amie qui me l’a apprit, au détour d’une conversation. Et je trouve cela fort étonnant que, dans une si grande démocratie comme la nôtre, prompte à défendre les peuples opprimés par la tyrannie, le despotisme et le manque de liberté, nous en ayons si peu parlé.

Après quelques recherches, il apparait que seuls quelques blogs amateurs d’étudiants et de sympathisants mentionnaient cette journée, en rappelant la situation critique vécue par les tibétains et les moines bouddhistes, et qui invitaient les lecteurs et internautes à les rejoindre durant la manifestation qui a eu lieu entre l’Assemblée Nationale et l’Ambassade de Chine, à Paris. Mais, à par ça, rien. On parle du froid, des bourdes de Monsieur Guéant, des campagnes des candidats à l’élection présidentielle. Depuis un an, on nous assomme avec le ‘besoin’ démocratique de pays comme la Tunisie, la Lybie, l’Egypte, et récemment la Syrie. La France n’a pas seulement déployé ses philosophes pour l’occasion, elle a aussi utilisé son armée. Elle a même voté pour une intervention de l’Organisation des Nations Unies en Syrie.
Alors pourquoi diable ne parlons-nous pas de la situation du Tibet ? Ou plutôt, pourquoi n’en parlons-nous plus ? Il faut le reconnaitre, la question animait parfois la place publique, lorsque par exemple sa Sainteté le Dalaï-Lama visitait la France et y donnait des conférences et des enseignements, ou lorsque certains évènements pouvaient passer la censure des médias chinois.


J’imagine que chercher à élever la voix contre un dominant, de façon générale, a pour conséquence une réaction assez vive, de la part dudit dominant. Ici, le dominant est un des pays les plus puissants et influant du monde moderne, que ce soit sur un plan démographique, économique ou militaire. Par principe, il n’existe que trop peu de pays qui ont su accorder l’indépendance à leurs colonies sans aucune violence, et dans ce cas, la Chine ne fait aucune exception à cette règle.
Et c’est là, j’imagine, que l’on trouve les limites de la démocratie et de ses défenseurs. Où seraient les intérêts pour la France et les Etats-Unis, de chercher à exercer une pression sur leurs amis chinois, afin qu’ils considèrent l’indépendance du Tibet, je vous le demande ?
De la même manière, nous ne verrons jamais d’efforts diplomatiques concrets de la part des pays occidentaux pour entendre la cause palestinienne. Et quand on entend dire de la bouche de Monsieur Sarkozy que « Israël est un miracle », on croit rêver !
La France, d’ailleurs, ne vaut pas mieux que la Chine ou les Etats-Unis en matière de respect des libertés des peuples, quand on voit l’attitude républicaine à l’égard de la Nouvelle-Calédonie depuis l’époque de sa colonisation. La crise de 1988 a pu révéler le dominion militaire qu’exerçait la France sur ces territoires, et l’état misérable de ses populations qui n’avaient plus de moyens d’exprimer leur frustration et leur soif de liberté que par la violence.
Je suis très loin de vouloir justifier l’utilisation de la violence comme moyen de communication. Il n’empêche. Je regarde aujourd’hui le discours de l’Iran qui veut rayer Israël de la carte, je comprends pourquoi. Et dire que la Troisième Guerre Mondiale pourrait commencer comme ça…

Nous avons suffisamment conscience de ces faits, et nous pourrions nous indigner, pour reprendre le mot d’ordre de Monsieur Hessel, que cette injustice persiste encore aujourd’hui. Ce qu’il y a de très troublant, c’est que nous ne pouvons rien faire d’autre, et que cette indignation est de toutes façons neutralisée par notre pouvoir d’achat : puis-je vraiment protester contre la domination chinoise sur le Tibet si une grande partie de ce que je consomme concerne des produits chinois ? Quand on voit la rapidité et l’efficacité avec laquelle leurs entreprises s’accaparent des marchés européens, je doute qu’il soit possible de vivre sans acheter chinois.
Voilà mon problème aujourd’hui. Voilà pourquoi, quoi qu’on dise ou qu’on pense, nous sommes pris dans ce piège. Qu’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dit : je n’ai rien contre le peuple et les habitants de Chine, mon propos vise le gouvernement. Même chose pour Israël, les Etats-Unis, la France, et tous ces pays dans le même cas.

Est-ce donc cela, la démocratie ? La tyrannie de la majorité sur les minorités ? Je ne suis plus capable d’avoir l’énergie de croire que non.


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