Tourcoing brūle-t-il ? Une course poursuite, un accident de voiture, un mort, une semaine d’agitation

par Saltz
lundi 22 juin 2015

Dans la nuit du 31 mai au 1er juin, une voiture a fini dans un arbre, rue du Tilleul près de la gare de Tourcoing. Pierre-Eliott Zighem, le passager de 19 ans assis à la place du mort est décédé. Le conducteur est grièvement blessé. L'autre passager souffre d’une fracture du fémur.

Selon une source judiciaire, citée par La Voix du Nord publié le 01/06/2015 - Mis à jour le 01/06/2015 à 11:58 « Il n’y a pas eu de course-poursuite. On ne sait même pas si le conducteur a vu le véhicule de police et s’il a voulu échapper à un possible contrôle. Cela dit, quand la patrouille est passée près de la gare de Tourcoing, elle a aperçu la Peugeot 106 encastrée dans un arbre. Les policiers n’ont pas vu l’accident. Constatant la gravité des blessures des passagers, ils leur ont porté les premiers soins tout en appelant les pompiers et le SAMU. » Et toujours dans le même journal "Selon plusieurs sources, les victimes seraient, pour la plupart, originaires du quartier de l’Épidème."

 

L'épidème est un quartier pauvre qui jouxte le quartier de l'Union. Carreaux cassés ici, batiment abondonné là, des pancartes tentent l'optimisme en vantant des révalorisations. Mais à vrai dire c'est franchement la zone. Les politiques qui ont fini par s'en apercevoir ont déclaré "zone franche". Une zone franche (en anglais free zone) est une zone géographique à l'intérieur d'un pays présentant des avantages fiscaux afin d'attirer l'investissement et de développer l'activité économique. Les entreprises qui s'y installent bénéficient d'un environnement fiscal et réglementaire plus favorable que celui en vigueur dans le reste du pays.

 

Je connais des entreprises qui y installent une filiale dans laquelle ceux qui travaillent ne sont pas de la commune. Ils arrivent le matin dans la ruche d'entreprise, réchauffent leurs plats dans la cuisine et repartent sans même aller dans la petite épicerie locale. Le bilan écologique est négatif, plombé par le transport. Le bilan économique est nul parce que l'entreprise aurait de toute façon créé sa filiale, ici ou ailleurs. Le bilan administratif est lourd parce qu'il faut mettre des structures en place et des fonctionnaires à disposition. Les politiques se sont fait plaisir en créant une usine à gaz mais en ont-ils jamais réalisé un bilan ?

 

Le jeudi 4 juin, M6 avait une autre version des faits. La tension est palpable à Tourcoing (Nord), après la mort d’un jeune automobiliste lundi, en tentant d’échapper à un contrôle de police. Depuis, la ville est le théâtre d’émeutes urbaines. Le préfet appelle au calme.

L'une des versions que j'ai entendu est celle d'un conducteur sans assurance qui a voulu échappé à un controle de police.

Un habitant du quartier a confiée à l'AFP que lors d'"une course-poursuite de 10 à 12 minutes, les policiers ont donné des coups de pare-choc qui ont envoyé la voiture dans l'arbre". En l'absence de caméra, il est difficile de démêler le vrai du phantasme.

 

Une marche silencieuse avait rassemblé le mercredi une centaine de participants qui voulaient la vérité sur le drame.

 

Une centaine de personnes (les mêmes ou d'autres ?) ont participé aux violences de mercredi à jeudi, au cours desquelles 14 poubelles et 16 voitures ont été brûlées. Pas de blessé mais 20 gardes à vue "ont été prises pour des violences sur policiers, soit par jets de projectiles, soit avec l'utilisation de véhicules pour foncer sur les policiers, et d'autres gardes à vue ont été prises pour participation à attroupement", a indiqué à l'AFP Bruno Dieudonné, procureur adjoint de Lille.

 

Dans les trois nuits suivants le drame, la préfecture a déclaré jeudi que des véhicules (une quarantaine) et des poubelles (personne ne les auraient comptées) ont été incendiés, des véhicules de police (six) ont été endommagés ainsi que des bus (deux), et des personnes ont été interpellées (24).

 

La préfecture a annoncé un renforcement du dispositif en vue des prochaines nuits. "Près de 150 policiers et gendarmes sont engagés sur le terrain, un hélicoptère appuie l'intervention des forces de l'ordre", peut-on lire dans son communiqué.

 

On m'a parlé d'hélicoptère de police qui avait fouillé la nuit tourquennoise avec un projecteur et qui avait choqué "on n'est pas en Amérique".

 

L'édition lilloise de 20 minutes du lundi 8 juin parle lui du quartier de Bourgogne, qui est à l'opposé du quartier de l'Epidème, et des condamnations lors des audiences en comparution immédiate de 6 et 7 mois de prison ferme. Il rapporte que le conducteur était toujours plongé dans le coma. Il dit aussi que plusieurs habitants dénonçaient une provocation liée au déploiement "disproportionné" des forces de l'ordre et qu'un homme de 68 ans remarquait que "quand il n'y a pas de policiers, les jeunes restent tranquilles".

 

La Voix du Nord du vendredi 5 juin parle du quartier de Bourgogne, de son taux de chomage de 40 %, de sa délinqance endémique, de son trafic de stupéfiant, mais n'incrimine pas tous ses 8 000 habitants sur une populatin de 92 700 à Tourcoing.

 

Le procureur déclarait le jeudi qu'une patrouille de police a vu à 2h15 une Peugeot 106 griller un feu rouge, l'a poursuivi sur 1,7 km, soit une minute et quatorze secondes. L'auto faisait une mesure d'immobilisation pour défaut d'assurance. Le conducteur risquait une amende de 450 euros.

 

Et le procureur d'avouer qu'il a du mal à comprendre les réactions de violence de ces derniers jours.

 

Tout est dit.

 

C'est l'incompréhension totale des uns et des autres.

 

Chacun vit dans son monde, l'un de sécurité, l'autre de précarité avec le sentiment de se trouver dans une impasse entre deux hauts murs.

 

Pendant ce temps-là, je n'ai pas entendu la presse nationale s'étendre sur le sujet. J'ai surtout entendu la télévision parler d'un match de foot qui valait le déplacement d'un Falcom, d'un premier ministre qui avait si hâte de parler à Michel Platini, le président de l'UEFA, qu'il ne pouvait pas attendre sa visite prévue deux jours plus tard à Paris, et qui avait tellement l'esprit de famille qu'il s'était fait accompagner de ses enfants. Une chroniqueuse du samedi soir ne voulait pas entendre parler des pays scandinaves et anglo-saxons qui auraient lourdement sanctionné un ministre pour un tel vol. Elle a sans doute l'esprit républicain aussi court que ses habits.

Ce qui avait choqué autour de moi était la présence des enfants dans l'avion, à l'heure où le gouvernement taillait dans les salaires et les retraites.

J'imagine le pauvre président qui voyait son plan de communication anéanti. Quelques temps auparant, le fils de son ex favorite s'était déversé devant les caméras pour dire tout le bien qu'il pensait de son ex presque beau-père. Pensez, le président éteignait lui-même les lumières des salons pour chasser le gaspi.

 

Sans autre rapport que l'actualité, une vidéo circulait qui montrait un policier américain sortir son arme contre des jeunes désarmés qui s'amusaient dans une proprité privée. Ses collègues avaient stoppé son geste disproportioné et évité une bavure.

 

Revenons en France. Les autorités de Tourcoing veulent éviter toute huile sur le feu. Pour la fête de la musique, elles ont donc annulé le spectacle de chansons de la compagnie belge Thank You For Coming à cause du titre de leur spectacle, Boudin et chansons. Elles avaient peur que le mot "boudin" soit provocateur.

 

En France tout finit par des chansons, disait Baumarchais ...

... ou en eau de boudin.


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