Un abstentionnisme volontaire et justifié

par Léonel Houssam
mardi 2 mai 2017

Il est assez stupéfiant de lire, d’entendre et de voir de nombreux médias s’offusquer du positionnement de Monsieur Mélenchon. Pourtant, son message est clair. Il est à rappeler qu’il est le porte-parole et qu’il a été le candidat de la France Insoumise, vaste mouvement regroupant des centaines de milliers de citoyens tous acteurs du programme, des orientations, de la stratégie et de l’avenir de celui-ci. Insoumis… Faut-il rappeler la définition de ce mot ? Apparemment oui : « l'adjectif "insoumis" qualifie ce qui n'est pas soumis, qui ne fait pas preuve de soumission, de docilité, d'obéissance. Un insoumis est une personne qui refuse la soumission, qui se rebelle, qui ne se soumet pas à l'autorité ».

 

On ne donne pas d’instructions de vote à un Insoumis.

Chacun jugera du niveau d’insoumission des adhérents à la France Insoumise en fonction de ses valeurs, de ses préjugés, de ses présupposés et de son regard plus ou moins déformé par les médias mainstream. Quoiqu’il en soit, Jean-Luc Mélenchon n’avait à donner aucune instruction de vote aux insoumis en ce sens que chacun est libre de faire son choix en âme et conscience. La seule règle est tout de même : aucune voix à Marine Lepen qui est à la tête d’un mouvement politique qui a pour objectif affiché d’instaurer un régime autoritaire non-républicain (malgré ses promesses de démocratie dite directe, à la pratique, dans toutes les mairies qu’il contrôle, le FN n’instaure aucune forme de démocratie directe et pire, il impose un maire autocratique balayant toute pluralité idéologique. En témoigne les centaines de désaffection de conseillers municipaux FN en 2016). Les règles sont claires.

Jean-Luc Mélenchon est juste fidèle au mouvement qu’il représente. Les réactions des autres camps, des « hamonistes », aux « macronistes » en passant par tous les « républicains » de tous bords prompts à invectiver ceux qui affichent leur abstentionnisme militant (Leur attribuant les sobriquets vaseux tels que « Collabo », « fasciste » ou « irresponsables ») sont à la hauteur de la vacuité intellectuelle qui régit les médias mainstream et ceux qui s’en abreuvent. Chacun est libre d’aller voter ou non dimanche prochain, que ça plaise ou pas aux petits soldats du « vote barrage ».

 

Quel que soit le résultat du 7 mai, le président sera un capitaliste dur.

La France Insoumise est un vaste mouvement qui prend acte des résultats du premier tour. Le prochain président sera ou un capitaliste ultra-libéral favorable à une casse massive des abandonnés de la mondialisation ou une capitaliste ultra-nationaliste favorable à une casse massive de toutes les minorités ainsi qu’à la puissance culturelle et économique de la France à travers les âges. Doit-on choisir le meilleur du pire ? Chacun fera son choix en son âme et conscience.

 

Quinze ans de trahison démocratique.

 

Il est bon de rappeler ce que représente le vote de « barrage », ou le vote « utile », ou le vote dit « du front républicain » et les conséquences sur la France et ses citoyens depuis 15 ans.

 

2002 : les gens de gauche votent Jacques Chirac pour faire barrage à Jean-Marie Lepen. Résultat : politique de droite dure.

2005 : les gens de gauche (et de droite) votent contre la Constitution Européenne qui souhaitait sanctuariser l’économie de marché comme seule politique économique autorisée. Résultat : en 2007, le Traité de Lisbonne impose tout de même cette règle contre le vote populaire sous l’égide de Nicolas Sarkozy et tous les ultra-libéraux européens.

2012 : Les gens de gauche votent pour « l'ennemi de la finance », François Hollande. Résultat : politique ultra-libérale et destruction du droit du travail, etc.

2017 : Le choix de l’abstention au deuxième tour. Se faire prendre pour des machines à pouvoir quinze années d’affilée, c’est plus que ce que peut en supporter n’importe quel citoyen honnête.

 

Me concernant : j'ai refusé de voter pour Chirac en 2002, et pour Hollande en 2012 ou Royal en 2007 parce que je le disais à tous ceux qui faisaient « barrage » qu'ils se feraient forcément trahir. J'ai voté « Non » en 2005 mais là j'ai été naïf et n'avait pas imaginé que l'oligarchie piétinerait le référendum.

Pour 2017, ni Lepen ni Macron. Je ne vote ni pour le capitalisme ultra-nationaliste ni pour le capitalisme ultra-libéral. Et nous serons nombreux dans ce cas. Je vous laisse entériner un monde d'hyper consommateurs collectivement suicidaires. Il ne s’agit pas d’une consigne de vote, il s’agit d’une opinion tout aussi respectable que celle de ceux qui voteront Macron parce qu’ils sont d’accord avec ses idées ou parce qu’ils veulent faire barrage au FN, et que celle de ceux qui voteront pour Marine Lepen. Le respect de l’opinion et du choix de l’autre est le cœur de la démocratie… Il reste à savoir combien de personnes accepteront une nouvelle fois de se faire voler leur voix. Je comprends les arguments de chacun mais je rappelle qu’un vote « contre » est toujours un vote perdant. Il faut adhérer à un projet et il faut se battre pour qu’il aboutisse sans quoi la frustration et l’échec seront le lot de chacun pour de nombreuses années à venir.

 

Léonel Houssam


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