Une guerre civile nucléaire imminente

par PELLEN
mardi 19 mai 2015

Il ne fait pas de doute que la vérité est têtue. Hélas, la plupart du temps, toute sa rudesse ne se révèle que trop tardivement à la collectivité. Il en ira sûrement ainsi de la révélation des vertus du surgénérateur, dont une infamie politique a privé le pays en 98. Les fossoyeurs de Superphénix étaient d’ailleurs les premiers persuadés que le temps de gestation de cette vérité là n’est pas du tout à l’échelle du temps de leur irréversible sabotage.
Aussi, parce que l’Histoire cherche sournoisement à se répéter, y-a-t-il urgence à jeter une lumière crue sur la genèse d’une telle forfaiture politique et à tenter de l’empêcher de sévir à nouveau ; d’autant que, dans un pays aussi turbulent que la France, on se pince pour croire à la passivité de corporations du nucléaire persistant à ne pas regarder en face la véritable nature du danger qui menace leur existence.

Lorsque les mouvements de cheminots, d’aiguilleurs du ciel, de routiers ou de taxis prennent la population laborieuse en otage, ils n’ont aucune légitimité objective à se comporter ainsi, car la plupart de leurs compatriotes sont eux-mêmes confrontés aux conséquences d’une mécanique économique implacable ou mal maîtrisée, voire dévoyée par certains dirigeants d’entreprises, à l’origine de leurs principales revendications.

La mise en coupe réglée de notre industrie électronucléaire ne s’inscrit en rien dans un tel schéma socio économique et il va bien falloir que lesdites corporations se décident un jour à appeler un chat un chat, à avoir le courage de dénoncer publiquement d’où vient le péril.

Le péril ne vient pas de conclusions objectives à tirer d’une non compétitivité inter énergétique du nucléaire, des dangers avérés qu’il ferait courir aux Français ou à leur environnement, encore moins d’une obsolescence de type « train-cheval » découlant du progrès technique. Non, le péril vient tout bonnement du fait qu’une part de la population française a déclaré la guerre à notre industrie nucléaire, qu’elle en veut la mort à n’importe quel prix et, par conséquent, veut la mort économique de ceux qui en vivent.

Or il faudrait être aveugle pour ne pas voir que cette France là est aujourd’hui au pouvoir, qu’elle agit sournoisement et avec une redoutable efficacité, par le biais d’instruments institutionnels, industriels et de contrôles ô combien légaux !

Je ne reviendrai pas sur l’étonnante mutation politique de la plupart des grands organismes fondés par De Gaulle et par ses fils spirituels, auxquels nous devons l’excellence de notre industrie nucléaire. Mais je ne peux pas ne pas m’arrêter sur la consternante profession de foi d’un Jean-Bernard Lévy, découverte sur le dernier « Vivre EDF l’Hebdo ».

À la lecture de sa dithyrambe sur le bien fondé et sur le contenu implicites de la « transition énergétique » française, comment ne pas soupçonner ce soi-disant capitaine d’industrie d’être un homme lige du pouvoir politique. Avoir le culot de se féliciter de l’avenir radieux et prometteur des filières éolienne et photovoltaïque d’EDF, quand on sait mieux que quiconque ce qu’elles ne cesseront jamais de coûter au contribuable (et à EDF !), relève en effet du cynisme, sinon de la provocation. Un cynisme d’autant plus intolérable, quand on sait à quel point ces deux filières étaient dramatiquement « florissantes » chez un Areva qui n’avait pas l’avantage de se trouver aux deux extrémités du système pervers de l’obligation d’achat.

En résumé, les nucléaires d’Areva, d’EDF et de leurs partenaires ont toute légitimité à ne pas se laisser assassiner par des compatriotes organisés qui leur ont déclaré une authentique guerre civile implicitement appuyée par le pouvoir. La fourberie de cet appui tenant dans ces deux constatations objectives : pas de marché intérieur ; une publicité délibérément calamiteuse de la technologie nucléaire française à l’export.

Ainsi, les corporations attaquées par un certain corps social et institutionnel n’ont-elles désormais d’autre choix que livrer bataille sur le terrain de leurs adversaires, c’est-à-dire faire mouvement (social) à l’instar des cheminots, aiguilleurs, routiers et autres taxis. Le lecteur aura parfaitement compris qu’il s’agit pour eux de prendre légitimement en otage la population qui leur veut du mal, sans pouvoir, hélas, la distinguer de celle qui leur veut du bien.

C’est ce qui s’appelle mettre le nez du gouvernement dans la mouise, l’obligeant de la sorte à déployer des compétences et à prendre ses responsabilité auxquelles il ne nous a guère habitués, une fois de plus dans l’urgence et sous la pression de l’agitation sociale. De toute façon, c’est lui qui a fait en sorte que le possible salut des corporations nucléaires ne puisse désormais sortir que d’une confrontation de ce genre, entre deux Frances antagonistes : c’est donc à lui de trouver une issue à cette confrontation, dont notre économie et notre confort ne fassent pas les frais.


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