Une Première mondiale pour le « piano aqueux »

par Fergus
lundi 1er avril 2019

Soirée de gala ce lundi soir à Paris : sur la scène du superbe auditorium de la Maison de la Radio, le compositeur et pianiste hongrois Pal Bismuth interprètera avec l’Orchestre philharmonique de Radio-France qu’il dirigera depuis le clavier la Première mondiale de son « concerto Magyar en mi bémol majeur », spécialement écrit pour un tout nouvel instrument né l’an passé en Autriche, le « piano aqueux »...

C’est au célèbre facteur d’instruments salzbourgeois Sigmund Trinkwasser que l’on doit cet étonnant piano constitué de colonnes d’eau dotées d’un astucieux mécanisme d’altération chromatique qui vient enrichir la famille des claviers. Présenté à la presse l’été dernier dans la ville natale de Mozart à l’occasion du Festival de Salzbourg, ce nouvel instrument a d’emblée séduit les musiciens par la pureté de ses timbres et l’étendue de ses registres. Il a également intéressé les chercheurs spécialisés, à tel point qu’un exemplaire de piano aqueux fait actuellement l’objet de mesures acoustiques des ondes au sein de la chambre anéchoïque de l’Ircam.

D’ores et déjà, plusieurs œuvres destinées à cet instrument ont été mises en chantier par des compositeurs de renom. Parmi les plus connus, l’Estonien Arvo Pärt, dont le projet est tenu confidentiel, le Français Eric Tanguy qui termine une fantaisie à trois voix pour piano aqueux, violoncelle et basson, et l’Allemand Hans-Jürgen von Bose, très discret sur la nature de ses travaux. Thierry Escaich a, quant à lui, d’ores et déjà achevé l’écriture de quatre sonates ; baptisées « Rêve de printemps », « Élégie estivale », « Songe d’automne » et « Langueur hivernale », ces quatre pièces romantiques pour piano aqueux seront interprétées par la grande Martha Argerich lors d’un récital au Palau de la Música de Barcelone le 11 mai prochain.

C’est, on l’imagine aisément, avec beaucoup d’intérêt que les spectateurs privilégiés qui seront présents ce soir dans le grand auditorium de la « Maison ronde » découvriront ce concerto Magyar pour piano aqueux en mi bémol majeur dont on dit le plus grand bien dans les arcanes de la musique classique. Il est vrai que le compositeur, Pal Bismuth, est un surdoué, tant en matière de jeu pianistique que d’écriture. Rien d’étonnant à cela, ce musicien de génie a de qui tenir : il est en effet le petit neveu du compositeur hongrois István Sárkőzy dont nul n’a oublié les œuvres, tout à la fois imaginatives et colorées.

Outre la Première très attendue du concerto de Pal Bismuth, les spectateurs de cette soirée de gala – co-présidée par le ministre de la Culture Frank Riester et le PDG de Radio-France, Sybile Veil – pourront également entendre, en première partie, une courte pièce de concert du Français Enguerrand-Friedrich Lühl-Dolgorukiy suivie d’une transcription pour piano aqueux de la symphonie concertante de Karol Szymanowski. Cette œuvre, signée Nicolas Bacri, sera interprétée par la talentueuse Géorgienne Khatia Buniatishvili sous la baguette du chef titulaire de l’Orchestre philharmonique de Radio-France, le Finlandais Mikko Franck.

Le piano aqueux est-il destiné à un grand avenir dans la musique classique ? Sera-t-il au contraire rapidement remisé dans une salle du Musée de la Musique comme d’autres instruments innovants avant lui, faute de séduire les mélomanes ? Nul ne peut le dire, mais une première réponse devrait nous être apportée dès ce soir par le public de l’auditorium de Radio-France. Les mélomanes présents ne seront toutefois pas les seuls à entendre ce concert : présenté sur place par Frédéric Lodéon, il sera en effet retransmis en direct sur les ondes de France-Musique dès 20 h 30. Un rendez-vous à ne pas manquer !

«  Le vrai n’est quelquefois pas vraisemblable  », a écrit Nicolas Boileau. Et vice-versa !

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