Une voix près ! Triste jour...
par Imhotep
mardi 22 juillet 2008
Ça y est, la démocratie a gagné. C’est Sarkozy qui, de Dublin, le dit. Lang et Baylet, seront récompensés. 906 parlementaires, 905 votants, 896 suffrages expirés, majorité des 3/5 à 538, pour 539, contre 357. Le guide, empereur de la désunion, pourra faire son discours de l’Union et il pourra par exemple dire en rassembleur et démocrate : « Une fois de plus, le camp du mouvement, du changement, de la modernité l’a emporté sur le camp de l’immobilisme, de la rigidité et du sectarisme » (Le Figaro). Le mépris et l’arrogance, il est tombé dedans quand il était petit. Encore heureux que par étapes : il a habité la fonction, il a été guidé par Cécilia, calmé par Clara et qu’il avait changé. Il n’a pas la victoire douce, celui-là. Alors qu’il ferait mieux de la calmer quand on achète les votes, la victoire n’est pas glorieuse, mais honteuse.
Les menaces, les marchandages, les achats de votes n’auront pas manqué. Lang sera président de quelque chose ou ministre, Baylet qui a joué le coucou (cuculus) au sein du Parti socialiste aura son groupe parlementaire et sa presse aura été remplumée, normal pour un coucou, nombre de sénateurs UDF auront apporté leur pierre (Arthuis présidence de commission du Sénat sauvée, et Mercier en tête avec poste de ministre à la clé puisque maintenant il n’y aura plus de risque il pourra retrouver son siège après la période ministérielle) et la France entre dans une phase de présidentialisation extrême avec le pouvoir de la majorité renforcée, la séparation des pouvoirs détruite, le début d’un régime de partis avec déstabilisation, la disparition du Premier ministre et l’hypocrisie comme symbole. Debré doit être fier de lui.
Il faut remarquer que c’est aussi la logique des clans qui l’a emporté. En effet 17 socialistes étaient ouverts à voter pour (à leur décharge des 5 des propositions jugées nécessaires à leur vote aucune n’a été acceptée, ce qui prouve comment le pouvoir en place a mené ce qu’il appelle le consensus renvoyant le PS à ses responsabilités supposées). Mais de l’autre côté, ils étaient plusieurs dizaines à ne pas vouloir du texte et pourtant ils ont voté pour.
Commençons par cette manière insupportable de présenter les choses. Les nominations seront sous contrôle de l’Assemblée. C’est ce qui est dit. Il faudra une majorité qualifiée. Certes. Mais pour quoi faire cette majorité qualifiée ? Pour la nomination ? Non pour sa réfutation ! C’est donc l’inverse. C’est la minorité disqualifiée qui acceptera la nomination. C’est comme de faire croire à un référendum d’initiative populaire alors que pour être mis en œuvre il nécessitera la bagatelle de 200 parlementaires et plus de 4 millions de signatures, autant dire à l’américaine : mission impossible. Voilà ce qui entre dans les textes de cette nouvelle Constitution, l’arnaque des mots. Sarkozy marque au fer rouge les fondements de la République en faisant graver les mots qui sentent la turpitude politique la plus absolue. Nous serons ce pays-là, celui qui inscrit cela dans le marbre, une façon honteuse et méprisable de gouverner.
Le président, non responsable devant le Parlement, court-circuitant définitivement le Premier ministre fera son discours d’Orientation générale. Sarkoléon sera le premier président à le faire et il entrera dans l’Histoire, il n’en quittera pas moins les histoires. Celles-là sont plus petites.
Ce qui est aussi néfaste c’est ce qui n’est pas inscrit : une meilleure justice électorale, la liberté de la presse, le respect de la séparation des pouvoirs.
Mais ce qui va poser de très gros problèmes, en plus du blocage du Sénat en cas de majorité différente à l’AN, c’est la possibilité de retrouver son siège de parlementaire après sa période ministérielle. Quelles en seront les conséquences potentielles ?
- En premier lieu c’est la mort de la séparation des pouvoirs, déjà bien moribonde. Le lien consanguin entre exécutif et législatif est consommé.
- Le président va jouer du bâton et de la carotte à outrance. Ministre pas sage dehors. On veut récompenser un député, il devient ministre. Alors que ce sont des métiers à temps plein qui nécessite un temps d’adaptation voilà qu’il risque d’y avoir un turn-over digne des sociétés de porte-à-porte.
- Cependant, si la force s’inverse, danger que les bons conseillers et les votants ont soit non vu, soit sous-estimé, soit vu mais accepté, elle passe du côté du député. Si celui-ci est une forte tête. Après le temps nécessaire pour se faire sa retraite ou se faire un carnet d’adresses enfin le temps de bien en profiter, que peut-il faire ? Tout simplement démissionner, sans souci. Il a son parachute. Sarkozy qui voulait, sans le faire bien sûr puisqu’il en a offert un en or incrusté de diamants à Tapie, moraliser ces parachutes dorés, vient de l’inventer pour le pouvoir. Il reste à trouver l’équivalent des stock-options. Pas d’inquiétude. Ces stock-options-là, il y a longtemps que les hommes politiques les ont trouvées, en ont usé et abusé. L’ex-parlementaire, futur ex-ministre et néo-parlementaire jouera sur du velours. Suivant son intérêt : se présenter en héros devant ses frères d’armes et ou ses électeurs, ou jouer du chantage au pouvoir : si je n’ai pas ceci ou cela, je démissionne. Qu’aura-t-il à craindre ? Ne pas redevenir ministre ? Et encore est-ce sûr ? On entre dans un engrenage dont on mesure mal les dégâts que cela pourra faire. Il se peut que tel est pris qui croyait prendre. C’est une arme à double tranchant. Et dans ce jeu, si fort se croit-il, il y aura plus malin ou plus tordu que lui. Certains crient déjà au retour à la IVe, République méprisée et méprisable selon eux. Cela laisse un goût amer à ces républicains-là d’autant qu’ils avaient écouté bouche bée leur Kondukator tenir ce discours de rejet de cette façon de gouverner.
Liste des votes et votants